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Cet article a été publié au numéro
126 d'octobre 2003.
Une décision du tribunal de grande instance
de Paris (1) a débouté
" les Congés Spectacles " de leur demande
de communication des déclarations de rémunérations
secondaires versées aux artistes au titre des rediffusions
et des demandes de paiement des cotisations congés
payés afférentes.
Le fondement de
la position des Congés Spectacles
Les congés spectacles fondaient leurs demandes
sur les dispositions des articles L. 762-2 du code du
travail et L. 212-6 du code de la propriété
intellectuelle selon lesquelles la fraction des rémunérations
secondaires versées aux artistes qui nexcède
pas les bases fixées par la convention collective
ou laccord spécifique est considérée
comme un salaire.
Les congés spectacles sappuyaient également
sur une lettre du ministre du travail, de lemploi
et de la formation professionnelle en date du 31 mai 1995
qui considère que la rémunération
secondaire des artistes, lorsquelle a la nature
de salaire doit effectivement être assujettie à
une cotisation congés spectacles.
Le tribunal déboute les Congés Spectacles
Le tribunal a rappelé que larticle L. 762-2
du Code du travail énonce que nest pas considéré
comme salaire la rémunération due à
lartiste à loccasion de la vente ou
de lexploitation de lenregistrement de son
interprétation, exécution ou présentation
par lemployeur ou tout autre utilisateur dès
que la présence physique de lartiste nest
plus requise pour exploiter ledit enregistrement et que
cette rémunération nest en rien fonction
du salaire reçu pour la production de son interprétation,
exécution ou présentation, mais au contraire
fonction du produit de la vente de lexploitation
dudit enregistrement.
Le tribunal note toutefois que larticle L. 212-6
du CPI précise que ces dispositions ne sappliquent
quà la fraction de la rémunération
versée en application du contrat excédant
les bases fixées par la convention collective ou
laccord spécifique.
Le tribunal note ensuite que " le droit aux congés
payés est accordé dès lors quil
est justifié dun travail effectif minimum
déterminé par la loi auxquels sont assimilées
certaines périodes énumérées
par larticle L. 223-4 du code du travail ; que la
notion de travail effectif sentend de la période
durant laquelle le salarié exerce son activité
sous lautorité de son employeur et ne peut
vaquer à ses occupations personnelles ; que tel
nest pas le cas lors des rediffusions duvres
audiovisuelles auxquelles a participé lartiste,
celui-ci nétant plus alors à la disposition
de lemployeur à légard duquel
il a retrouvé sa liberté de se livrer à
dautres activités professionnelles ; que
lemployeur ne peut donc être tenu, du fait
de ces rediffusions, au versement dune contribution
au titre du droit à congés payés.
"
Les congés spectacles ont en conséquence
été totalement débouté de
leurs demandes.
Les rémunérations secondaires peuvent dans
certains cas être assujetties à congés
payés
Si nous pensons que le raisonnement du tribunal et la
solution quil a donné au litige sont logiques,
et indépendamment de la requête des congés
spectacles dont nous pensons par ailleurs que la légalité
est discutable (2), nous considérons
que le débat nest pas aussi simple, que dans
certains cas, les rémunérations secondaires
doivent être assujetties à congés
payés, et que le tribunal aurait pu aboutir à
un jugement opposé si la problématique avait
été autrement posée.
En effet, pour quelle ne soient pas considérées
comme un salarie rémunérant la prestation
initiale, il est nécessaire quil ait existé
une rémunération distincte pour cette prestation
initiale. Or, les accords collectifs organisant les rémunérations
des artistes interprètes dans le domaine audiovisuel
ne prévoient pas de rémunération
pour la fixation de linterprétation, mais
uniquement pour les différents modes dexploitation.
Dès lors si le producteur nest pas en mesure
de justifier du paiement à lartiste dune
rémunération pour la fixation de linterprétation
distincte des rémunérations payées
au titre des cessions de droit, la jurisprudence considère
que les rémunérations secondaires rémunèrent
la disponibilité de lartiste pour la fixation
et que la totalité des rémunérations
secondaires a alors la nature de salaire sur le plan social.
Dans un tel cas, la rémunération liée
à lexploitation perd sa nature de rémunération
secondaire pour venir rémunérer dans sa
totalité la prestation initiale qui na pas
été rémunérée. Conformément
à la réglementation sur les congés
payés, et dans un tel cas, cette rémunération
liée à lexploitation rémunère
alors le travail effectif, et doit être assujettie
à congés payés. Ce qui est donc favorable
à lartiste, puisque cette rémunération
égale à 10 % de la rémunération
brute se rajoute aux droits de lartiste tels que
prévu au contrat et/où à laccord
collectif et ne simpute pas sur ces pourcentages,
sauf à ce que le contrat ait expressément
mentionné que le pourcentage de rémunération
secondaire inclut les congés payés. Bien
entendu, lentreprise peut alors payer directement
cette rémunération au salarié sans
passer par les congés spectacles.
Dans ce contexte, il eut donc été possible
de demander à lentreprise exploitant les
uvres audiovisuelles de justifier du paiement des
salaires initiaux des artistes, seule justification à
même de lexonérer du paiement des congés
payés.
(1) TGI Paris, 6 décembre
2002, n° 01/19264.
(2) Une demande de nullité
de cette association est pendante devant le Tribunal de
Grande Instance de Paris à la requête de
la société Nodula. Largumentaire
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