Avertissement
:
Nous avons légèrement modifié ces conclusions
par rapport au dossier déposé au Conseil dEtat
afin de ne pas publier de faits qui relevaient en leur temps
dinfractions pénales et qui sont aujourdhui
prescrits. Ces faits pouvaient figurer dans des conclusions
non publiques, mais ne peuvent être publiés
à nouveau dans le cadre dun site internet.
Requérant: Société GR.A.C.E. "
Groupement des Artistes et Concepteurs-Créateurs
d'Environnements"
Représentée par Maître Roland LIENHARDT,
avocat à la Cour.
Contre : La ministre de la culture et de la communication
Représentée par la S.C.P. d'avocats au Conseil
d'Etat Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.
La
Société Grace a l'honneur de demander l'annulation
du décret n° 98-1040, de Monsieur le Premier
ministre en date du 18 novembre 1998 portant modification
de la partie réglementaire du code de la propriété
intellectuelle.
A cette fin, voici les réponses aux remarques soulevées
par le défendeur, dans son mémoire en réplique
du 13 mars 2000, se rapportant à la requête
initiale déposée par la Société
GR.A.C.E. datée du 18 janvier 1999.
Les faits
La société GR.A.C.E. met en cause la légalité
du décret n° 98-1040 du 18 novembre 1998 (pièce
n°1) portant modification de la partie réglementaire
du Code de la propriété intellectuelle (CPI).
Le
décret attaqué modifie l'article L. 321-9
du CPI (pièce n°2), qui oblige les sociétés
de perception et de répartition des droits à
affecter certaines des sommes qu'elles recueillent à
des actions d'aide à la création, à
la diffusion du spectacle vivant et à des actions
de formation d'artistes, en disposant que :
" les sociétés civiles
de perception et de répartition des droits d'auteur
et droits voisins des droits d'auteur doivent utiliser à
des actions d'aide à la création, à
la diffusion du spectacle vivant et à des actions
de formation d'artistes :
- 25 p. 100 des sommes provenant de la rémunération
pour copie privée
- La totalité des sommes perçues en application
des articles L. 122-10, L. 132-20-1, L 241-1, L. 217-2 et
L 311-1 et qui n'ont pu être réparties à
l'expiration du délai prévu au dernier alinéa
de l'article L. 322-1 ".
Le second alinéa de l'article 321-9 du
CPI prévoit que :
" Le montant et l'utilisation de ces sommes font
l'objet chaque année, d'un rapport des sociétés
de perception et de répartition des droits au Ministre
chargé de la Culture..."
Le décret attaqué contient deux articles.
Si le premier organise bien les modalités de communication
des comptes qui doivent être communiqués au
Ministre chargé de la culture, le second modifie
substantiellement l'article L. 321-9 du code de la propriété
intellectuelle en venant étendre de façon
illégale son champ d'application.
Le nouvel article R.321-9 du CPI, étend le domaine
d'intervention des sociétés civiles en précisant
que l'aide à la création mentionnée
à l'article L. 321-9 s'entend :
" a) D'une part des concours apportés à
la création d'une uvre ou d'une interprétation,
à la première fixation d'une uvre ou
d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme;
b) d'autre part à des actions propres à assurer
la défense et la promotion des artistes."
" L'aide à la formation d'artistes mentionnée
au même article s'entend de la formation d'auteurs
et de la formation d'artistes interprètes".
L'élargissement par le décret, de la notion
"d'aide à la création" et l'assimilation
des auteurs aux "artistes", modifie substantiellement
le sens initial de la loi et fait par conséquent
l'objet de la contestation de la Société GR.A.C.E.
Dans son mémoire en réplique daté du
13 mars 2000 (pièce n°3), le Ministre de la culture
conteste tant dans la forme que sur le fond la recevabilité
du recours de la Société GR.A.C.E.
I Quant à la forme
Développements de procédure supprimés
II - Quant au fond
2°-Sur le détournement de la loi :
* Selon le ministère de la culture, il
n'y a pas lieu de considérer que le décret
contesté élargissant le domaine d'utilisation
des fonds par une définition extensive de la notion
"d'aide à la création" telle
qu'elle est prévue par l'article L. 321-9 du CPI,
est constitutif d'un détournement de la loi. "
La société requérante ... se borne
à prétendre que la définition de l'aide
à la création, mentionnée à
l'article R. 321-9 ajouté par le décret attaqué
au CPI ne serait pas conforme à celle figurant dans
la loi de 1985".
* Pour la Société GR.A.C.E., si en effet,
l'objet de l'article R. 321-9 du CPI est de renforcer le
contrôle de l'utilisation des sommes affectées
aux actions d'intérêt général
en imposant aux SPRD la description analytique de cette
utilisation et en précisant le domaine d'utilisation
des sommes affectées à ces actions, il ne
doit pas pour autant vider la loi de sa substance, telle
qu'elle a été voulue par le législateur
et exprimée par ce dernier dans les débats
parlementaires.
S'agissant d'un règlement d'exécution de la
loi, il convient de vérifier si ce règlement
est nécessaire à son application, et s'il
n'a pas excédé les limites de la mission attribuée
au pouvoir réglementaire par la loi. Or, en signant
ce décret, la Société G.R.A.C.E considère
que le Premier Ministre et le ministre de la culture ont
contrevenu aux dispositions légales voulues par le
législateur, en élargissant les notions
" de spectacle vivant" et " d'aide
à la création".
2.1 - Sur la notion daide au spectacle vivant :
Le Ministre de la culture prétend que "les
actions d'aide à la création, telles qu'elles
sont visées par le premier alinéa de la disposition
législative, sont conçues parallèlement
aux actions d'aide à la diffusion du spectacle vivant
et ne peuvent être limitées à la seule
création de spectacle vivant".
* Pour la Société GR.A.C.E., larticle
L. 321-9 du CPI est issu de larticle 38 de la loi
du 3 juillet 1985 n° 85-660, dont les dispositions ont
fait lobjet dune mesure de codification le 1er
juillet 1992. Lors des débats parlementaires, cette
disposition de la loi a été lobjet de
longues discussions.
Cet article dispose que les Sociétés de perception
et de répartition des droits :
" utilisent à des actions d'aide à
la création, à la diffusion du spectacle vivant
et à des actions de formation d'artistes:
1°- 25% des sommes provenant de la rémunération
pour copie privée;
2°- la totalité des sommes perçues en
application des articles L. 122-10, L. 132-20-1, L. 214-1,
L.217-2 et L.311-1 et qui n'ont pu être réparties
à l'expiration du délai prévu au dernier
alinéa de l'article L. 321-1".
Or, le texte du décret, chargé en principe
dexpliciter la loi énonce que :
" L'aide à la création mentionnée
à l'article L. 321-9 s'entend :
a) D'une part, des concours apportés à la
création d'une uvre, à son interprétation,
à la première fixation d'une uvre ou
d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme;
b) D'autre part, des actions propres à assurer la
défense et la promotion de la création".
Pourtant, lanalyse des débats parlementaires
montre clairement quil navait pas été
question détendre laide à la création
aux aides à la fixation des phonogrammes et vidéogrammes.
L'aide à la création vise en effet exclusivement
les spectacles vivants.
Si le texte initial du gouvernement sur cette question n'évoquait
pas la répartition des fonds, le projet de loi adopté
par l'Assemblée nationale en première lecture
était rédigé de la façon suivante
:
"Les sociétés de perception et de
répartition des droits doivent utiliser à
des actions d'aide à la création et à
la diffusion présentant un intérêt économique
pour leurs associés au moins 25 % des rémunérations
qu'elles perçoivent en application des articles 24
et 34" (pièce n°10 ).
Dans ce premier texte, l'aide est destinée à
la création et à la diffusion (la conjonction
de coordination "et" n'est pas exclusive, mais
inclusive, ce qui implique d'après la glose du texte
que la création et la diffusion appartiennent cumulativement
à la même idée). Ces deux objets dintervention
nétant de plus possible que sous la même
condition de "l'intérêt économique"
des associés des SPRD.
Cet article 36 de la loi de 1985, a fait lobjets dâpres
discussions et de plusieurs moutures. Lors de son adoption
en première et deuxième lecture au Sénat,
il était ainsi rédigé :
" Ces sociétés doivent utiliser à
des actions d'aide à la création, à
la diffusion de spectacle vivant et à des actions
de formation d'artistes, la totalité des sommes non
répartissables perçues en application de l'article
20 ci-dessus et 25% des sommes provenant de la rémunération
pour copie privée" (pièce n°11).
Dans sa version définitive, la commission mixte paritaire
retiendra les suggestions du Sénat.
Les réécritures successives de ce texte aident
à comprendre le sens qua voulu lui donner le
législateur.
Lors de la présentation de larticle 36 par
la commission paritaire, le rapporteur, Monsieur Alain RICHARD,
tout comme le Sénateur rapporteur Monsieur Charles
JOLIBOIS, a clairement rappelé que cette disposition
ne contenait que deux idées et non trois:
" Nous avons préféré, lors
de la transaction, fixer de manière rigide les pourcentages
qui seraient prélevés en faveur de l'action
d'aide au développement des professions artistiques
plutôt que de laisser chaque année aux sociétés
de perception le soin d'apprécier, dans un vote éventuellement
disputé, les sommes qui seraient ainsi utilisées.
Cela débouchera rapidement sur l'affectation à
la création ou à la formation des artistes
de sommes importantes, d'une certaine façon distraites
de l'augmentation potentielle du revenu des artistes. Nous
effectuons, ce faisant, un transfert revenu-aide à
l'emploi qui va dans le sens de la recherche d'un avenir
plus fructueux pour les professions artistiques, que l'on
sait menacées de ce point de vue " (pièce
n°12).
Il ressort de la glose de ce dernier paragraphe, qu'en prenant
à contrario les affirmations du rapporteur de la
commission mixte paritaire, le texte dissocie l'affectation
des sommes visées à :
- la création ;
- la formation des artistes.
La conjonction "ou" est bien exclusive,
ce qui vise à distinguer les deux idées qu'elle
sépare.
Le Sénat a limité les actions d'aide à
la diffusion à la seule "diffusion du spectacle
vivant" entendu comme tout "spectacle qui
ne résulte pas d'un enregistrement préalable"
(séance du 4 avril 1985, intervention du Sénateur
Charles JOLIBOIS, Journal Officiel du Vendredi 5 avril 1985,
page 157). Dans cette même intervention, le Sénateur
rapporteur Charles JOLIBOIS explique que :
"Cet amendement contient deux idées. La première,
que nous reprenons, d'ailleurs, dans le texte qui nous vient
de l'Assemblée nationale, est de saisir l'occasion
de la création de nouvelles ressources pour contribuer
à la diffusion du spectacle vivant. Cette expression
peut choquer certains, mais il n'y en a pas d'autre. Nous
entendons par là un spectacle qui ne résulte
pas d'un enregistrement préalable et pour lequel
de grands besoins d'aide et d'encouragements se font sentir
à l'heure actuelle.
La deuxième idée, que personne ne devrait
contester, consiste à promouvoir les actions de formation
d'artistes." (pièce n°13, A).
Le rapporteur est suffisamment clair, et il ne peut y avoir
d'ambiguïté. Le texte adopté par l'Assemblée
nationale retient cumulativement dans la première
idée, l'aide à la création et à
la diffusion du spectacle vivant. En y ajoutant la deuxième
idée de la formation d'artiste et en limitant la
première idée au spectacle vivant, il convient
de comprendre que la limite s'applique à la première
idée dans sa globalité; c'est à dire
à la création et à la diffusion.
N'existant "pas d'autres expressions",
et afin d'éviter une rédaction trop lourde,
la limite au "spectacle vivant" ne fut
rédigée qu'une seule fois à la fin
de la première idée qu'est la création
et la diffusion. D'après les débats, il est
donc légitime de considérer que le texte limite
également l'aide à la création aux
spectacles vivants.
Cette position est confirmée lors de la même
séance, par lintervention du ministre de la
culture, lequel s'était formellement opposé
à l'adoption de l'amendement n° 57, qui prévoit
la limitation des aides aux spectacles vivants. Monsieur
Jack LANG marquait sa réticence sur ce point, en
déclarant que "la commission limite le domaine
d'affectation des sommes à laide à la
création, à la diffusion de spectacles vivants
et à la formation des artistes".
Monsieur Lang poursuivait en demandant "Pourquoi
les industries du phonogramme et du vidéogramme ne
pourraient-elles pas lancer des actions d'aide à
la diffusion du film ou du disque (...)?". Enfin
pour conclure, il exprima son souhait de "solidarité
interprofessionnelle entre le spectacle vivant et le spectacle
enregistré" (pièce n° 13).
Le ministre sétait donc exprimé sur
ce point et na pas été suivi par le
parlement qui adopta cet amendement n° 57 ; lequel se
retrouve tel quel dans le texte définitif ; contre
lavis du gouvernement qui a clairement indiqué
lors des débats les raisons de son désaccord.
L'analyse des deux chambres est concordante, et comme nous
l'avons souligné précédemment, il ne
peut y avoir d'ambiguïté.
Cette analyse juridique est confortée par le "rapport
de la mission d'audit de l'ADAMI" (pièce
n°14) établi par Monsieur Francis BECK, inspecteur
général de l'administration des affaires culturelles
et Madame Anne BOLLIET, inspecteur général
des finances. Il sagit de lune des sociétés
de perception et de répartition des droits relevant
du Titre II, Livre III du CPI. Suite aux critiques relatives
à la gestion de l'ADAMI, émanant dun
certain nombre dassociés, la crédibilité
de la société quant à la conformité
de son fonctionnement avec la réglementation pouvait
être remise en cause.
Cela expliqua cette mission daudit qui s'inscrit dans
le cadre de l'article L. 321-12 du CPI (prévoyant
la transmission au ministre chargé de la culture
des comptes annuels et de tous documents relatifs à
la perception et à la répartition des droits
par les SPRD). Les deux inspecteurs étaient chargés
par le ministre de la culture de notamment, lui "donner
un avis (...), à partir des comptes et des procédures
mises en uvre, sur la conformité de la gestion
et de la répartition des droits avec la réglementation
en vigueur et, plus largement, avec les intérêts
des ayants droits".
À lannexe 11 page 3 A de ce rapport qui date
de février 1997, il est indiqué à juste
titre que :
"le texte de la loi exclut donc du champ d'application
de l'article L. 321-9 du CPI, les actions d'aide à
la diffusion de films, de disques et de tous spectacles
enregistrés au préalable" (pièce
n°15).
Les rapporteurs constatent ensuite que lADAMI par
une interprétation extensive de l'article L 321-9
du CPI a clairement étendu les aides à des
activités de production phonographique et audiovisuel
:
"L'ADAMI participe régulièrement au
financement d'actions concernant la diffusion d'uvres
cinématographiques ( telles le Festival de Cannes
ou Unifrance-films), alors que le législateur a limitativement
énuméré les objectifs que doivent viser
ces actions artistiques : création, diffusion du
spectacle vivant et formation d'artistes. Les travaux préparatoires
de la loi du 3 juillet 1985 sont très clairs à
cet égard, et notamment la séance du 4 avril
1985 au Sénat au cours de laquelle le ministre de
la culture avait déploré la limitation au
seul spectacle vivant des actions de diffusion concernées"
(voir le rapport page 45 § 3 - a, et annexes n°
11, page 2 ; pièces n° 14 & 15).
Les rapporteurs reconnaissent que cette interprétation
extensive de larticle L 321-9 du CPI nétait
pas conforme à la loi. Ils énoncent ainsi
:
"le ministère de la culture n'a jamais contesté
cet élargissement du champ d'application de la loi
dans la mesure où il n'a jamais formulé aucune
observation sur ce point à l'ADAMI, ni d'ailleurs
aux autres S.P.R.D. qui interprètent également
de manière très souple les critères
fixés par la loi" (pièce n° 15,
annexe n°11, p.3, B).
Il peut être intéressant de noter, en réponse
à un autre argument invoqué par la ministre
de la culture dans ses conclusions en réplique, que
linspecteur général des affaires culturelles
en charge de ce rapport, Monsieur Francis BECK, a été
nommé PDG de lINA (pièce n°16),
établissement public industriel et commercial (Loi
du 30 septembre 1986, article 49) (pièce n°17
) sous tutelle du ministère de la culture et de linspection
générale des affaires culturelles.
Cette nomination pourrait être sanctionnée
en vertu de larticle 432-12 du code pénal (pièce
n°18) qui vise la prise illégale d'intérêt.
Grâce au décret attaqué, Monsieur Francis
BECK, peut directement en sa nouvelle qualité de
chef dentreprise et dans le cadre de ses nouvelles
activités de producteur duvres audiovisuelles
bénéficier des dispositions attaquées
et ne sera sans doute pas tenté de rappeler les critiques
quil avait formulées dans son rapport.
Cette analyse date de février 1997. Si à l'époque
les inspecteurs généraux du ministre de la
culture et du ministère des finances pensaient que
cette utilisation des fonds de la copie privée remis
à des SPRD nétait pas conforme à
la loi, un décret ne peut évidemment pas les
rendre davantage conforme à cette même
loi. Seul le Parlement était en mesure de revenir
sur la conception restrictive quil avait entendu donner
à cette intervention des SPRD en 1985.
Il est intéressant de noter quun nouveau rapport
(n° 2000/09 sur les SPRD, rapport dit "Mariani-Ducray"),
émanant lui aussi des services du ministère
de la culture (inspection générale de l'administration
des affaires culturelles), et publié en février
2000 confirme à nouveau lanalyse de la société
GRACE.
En effet, il y est formulé quelques observations
d'ordre général sur la nature des activités
conduites par les SPRD dans le cadre de l'article L 321-9
du CPI. Le rapport précise ainsi que :
" ces activités recouvrent un champ infiniment
plus vaste que celui couvert par la loi : aide aux structures,
aide à la diffusion (disques, films, télévision...),
action internationale, actions d'intérêt général
pour les professions concernées, attribution de prix..."
( pièce n° 19, A, §.IIIC5, p. 105).
Il ressort de ce rapport que le décret du 18 novembre
1998 précise des modalités de gestion des
dépenses engagées au titre de l'article L
321-9 du CPI, mais la notion d'aide à la création
fait l'objet, dans ce même texte, d'une double interprétation
: restrictive et ouverte. Ainsi, les activités artistiques
des SPRD se sont révélées infiniment
plus larges que le champ des dépenses visées
par la loi et couvrent, en fait, des dépenses d'une
nature différente (pièce n° 19, le rapport
§ IIIA4, p. 85 et s.).
Il convient de préciser également que ce rapport,
sur les SPRD, rédigé entre autre par Madame
Francine Mariani-Ducray, chef du service de l'inspection
générale de l'administration des affaires
culturelles, nignore pas que le décret fait
lobjet dun contentieux :
"Il convient de noter, enfin, que toutes les sociétés,
pratiquement, financent au titre de l'article L 321-9 trois
types d'actions sans doute conformes à la lettre
du décret du 18 novembre 1998. Ce décret fait
actuellement l'objet d'un contentieux au Conseil d'Etat."
(pièce n° 19, § IIIC5, p.107).
" Cette situation, relevée dans le rapport
d'audit sur l'ADAMI effectué par Madame Bolliet en
1997 a fait l'objet de quelques contentieux à l'encontre
des SPRD de la part d'associations ou individus."
( pièce n°19, A, § IIIA4, p.86).
C'est donc à juste titre que la requérante
considère que le décret susvisé, ne
peut intégrer comme bénéficiant de
l'aide à la création prévue par l'article
L. 321-9 du CPI, ni les aides apportées à
linterprétation, ni celles apportées
à la première fixation dune uvre
ou dune interprétation sur un phonogramme ou
un vidéogramme.
La requérante demande en conséquence au Conseil
d'État de rejeter le troisième moyen, avancé
par le ministre de la culture, pris en sa première
branche, et d'annuler larticle R. 321-9 du CPI issu
du décret attaqué.
2.2 - Sur la première fixation d'une uvre
:
* Selon le Ministre de la culture, L'aide à
la création implique, bien entendu, des concours
apportés à la création d'une uvre,
à son interprétation, mais peut également
comprendre, sans méconnaître la loi, une aide
pour faciliter la première fixation d'une uvre
ou d'une interprétation sur un phonogramme ou un
vidéogramme, cette première fixation supposant,
nécessairement, une prestation des auteurs et des
artistes interprètes. Cette première fixation
d'une uvre ou d'une interprétation constitue
pour les intéressés un concours non négligeable
à la création et à sa diffusion ultérieure
au regard de la lourdeur de l'investissement que constitue
la réalisation d'un "master .
Le décret étend en effet les possibilités
dintervention des SPRD aux aides destinées
à la première fixation d'une uvre ou
d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme;.
*Selon la Société GR.A.C.E., le ministre de
la culture tente de justifier lextension des aides
au motif que la première fixation dune uvre
sur un phonogramme constitue pour les intéressés
"un concours non négligeable à la
création et à la diffusion ultérieure
au regard de la lourdeur de linvestissement que constitue
la réalisation dun master" (pièce
n° 3, argument de la défense p. 6). Le décret
d'élargit donc bien l'aide à la diffusion
des uvres sur support phonogramme et vidéogramme,
contrairement à la volonté clairement exprimée
par le législateur.
Ce faisant le ministre de la culture tente de tromper la
religion du conseil en opérant un amalgame osé
entre la création, qui concerne les uvres et
la fixation qui concerne les enregistrements. Le ministre
de la culture essaie ainsi de faire croire que la réalisation
dun master (ce terme désigne
le premier support de lenregistrement définitif
dune oeuvre), relève dune activité
de création, alors que cette activité relève
dune activité denregistrement. Cest
justement parce quil ne sagit pas dune
création, et que cela nest pas protégeable
par le droit dauteur que la loi de 1985 a reconnu
des droits voisins des droits dauteurs au producteur.
Le producteur de phonogramme est défini par larticle
L. 213-1 du CPI comme celui
qui a l'initiative et la responsabilité
de la première fixation d'une séquence de
son.
On ne parle pas de création mais de fixation dune
interprétation.
Ce raisonnement est transposable en matière de vidéogrammes.
En effet, l'article L. 215-1 du CPI définit le producteur
de phonogramme comme celui :
qui a l'initiative et la responsabilité
de la première fixation d'une séquence d'images
sonorisée ou non".
Dès lors ne s'agissant pas d'une création
mais de la fixation d'une interprétation, la loi
a organisé dans ces deux articles des droits voisins
des droits dauteurs au profit des producteurs.
De plus, alors que les ressources ainsi mises à la
disposition des SPRD doivent en principe aller aux créateurs,
le producteur de phonogramme ne passe en principe aucun
contrat avec les auteurs et ne les rémunère
pas. En effet, les auteurs ont le plus souvent adhéré
à la SACEM ou à une société
équivalente qui a seule le droit dautoriser
la reproduction des uvres sur phonogrammes. Les auteurs
ne sont rémunérés quen fonction
des ventes et seulement si le disque se vend. Par le biais
de délégations de créances à
la SACEM, cest même parfois lauteur qui
est contraint de rembourser au producteur sur les revenus
provenant de ses autres création, la part de la production
qui a permis la réalisation de la musique originale
et son enregistrement. (Voir lexplication de ce mécanisme
Cultivez-vous, il men restera toujours quelque
chose , page 169 et s. pièce n°
25).
Le budget de réalisation des masters
des producteurs français ne contient le plus
souvent aucune rémunération dauteurs.
Il en est dailleurs de même en matière
audiovisuelle où moins de un pour cent des budgets
de production est consacré au paiement des auteurs,
lesquels ne sont payés que si le film génère
des recettes. Ce nest donc pas pour rien que le législateur
avait entendu ne faire bénéficier que les
créateurs de ces aides qui nont pas pour vocation
à alimenter lindustrie et qui subissent de
plus en plus datteinte à leur droit avec lextension
des nouveaux moyens techniques de reproduction et de diffusion.
Si le législateur avait voulu que ces aides aillent
aux producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes,
auxquels la loi de 1985 a également consacré
des droits nouveaux, il laurait clairement exprimé.
Ainsi que nous lavons précédemment présenté,
lors de la séance du 4 avril 1985, le ministre de
la culture, Monsieur Jack LANG s'était opposé
à l'adoption de l'amendement n° 57 qui instituait
la limite de l'affectation des sommes à l'aide à
la création et à la diffusion au spectacles
vivants uniquement (pièce n°13, B).
Il y a donc lieu de considérer que la réponse
du Ministère sur ce point n'est pas pertinente, et
ne saurait justifier l'interprétation extensive des
textes.
Il convient de souligner que le défendeur se réfère
à la doctrine du jurisclasseur (fasc. 1070, note
1; pièce n°20) pour considérer comme
spectacle vivant ceux qui utilisent certains éléments
préenregistrés voir télédiffusés
en plus de la présence physique des artistes et selon
un auteur autorisé, il en est de même si le
spectacle vivant est enregistré soit pour le son,
soit pour limage, soit pour les deux puisque lenregistrement
suppose une performance de lauteur ou de lartiste
interprète (pièce n°3, page
7 des conclusions du ministère) .
Ce faisant, le ministère de la culture tronque grossièrement
le texte du jurisclasseur. En effet, il est écrit
quen cas dutilisation dans un spectacle vivant
déléments préenregistrés,
le producteur de spectacles doit respecter les droits des
auteurs et des producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes
utilisés, et quil en est de même si le
spectacle vivant est enregistré.
La phrase citée hors de son contexte est totalement
dénaturée, le Conseil dÉtat ne
pourra que relever le peu de sérieux de largumentaire
du ministère acculé à de telles extrémités.
Lélément nécessaire et déterminant
d'un spectacle vivant reste en tout état de cause
la présence physique des artistes.
Dans un tel cas, dailleurs il nest pas besoin
davoir recours au subterfuge imaginé par le
ministère de la culture. Laide à la
diffusion de spectacle vivant nous semble pouvoir parfaitement
sappliquer à des spectacles intégrant
des parties préenregistrées. Insérées
dans un spectacle vivant, elles nen sont pas détachables
et ne sauraient donc être considérées
comme des aides à la fixation de phonogrammes ou
de vidéogrammes.
Il peut par ailleurs être intéressant de noter
que le seul "auteur autorisé" cité
par la ministre de la culture, Monsieur Pierre CHESNAIS,
est mis en cause dans le rapport précité sur
l'ADAMI (annexe 11, p 7; pièce n°15), au travers
de lentreprise NOVOCOM dont il était le dirigeant,
alors qu'il est également un ancien délégué
général du Syndicat Français des Artistes
qui a créé et contrôle toujours lADAMI,
également ancien délégué général
du Syndicat National de lEdition Phonographique qui
a créé et contrôle une autre société
concernée par linterprétation extensive
du décret, la Société Civile des Producteurs
de Phonogrammes (SCPP), Monsieur CHESNAIS étant incriminé
dans l'application extensive des textes afin de bénéficier
de fonds en vertu de l'article L. 321-9 du CPI.
Il est donc inopportun de se référer à
cet auteur dont l'impartialité peut être contestée.
De plus, ce dernier est lié dune part au responsable
de lADAMI en charge des dossiers de subventions (pièce
n°50), et dautre part au responsable administratif
et financier de la SCPP (pièce n°21).
Plaise donc au Conseil d'Etat de rejeter sur ces motifs
le troisième moyen, avancé par le ministre
de la culture, pris en sa deuxième branche
2.3 - Sur la notion de création
Article L. 111-2 du CPI (pièce n°22) énonce
:
" L'uvre est réputée créée,
indépendamment de toute divulgation publique, du
seul fait de la réalisation, même inachevée,
de la conception de l'auteur".
Il y a une incompatibilité entre la lettre de la
loi et le décret qui vient la compléter. En
définissant comme relevant de la création
une "fixation de l'uvre sur un phonogramme
ou un vidéogramme", le décret précité,
détourne les dispositions du Code de la Propriété
Intellectuelle, qui entend restreindre les aides à
la diffusion uniquement au spectacle vivant.
Le ministre de la culture prétend que la première
fixation de l'uvre sur un phonogramme ou un vidéogramme
constitue non plus une diffusion mais une création
susceptible de bénéficier de l'aide légale.
La ministère de la Culture poursuit ainsi son amalgame
et essaie de faire croire que le législateur na
utilisé le terme de spectacle vivant quau regard
des aides à la diffusion et que les aides à
la création pouvaient englober tous types de création,
y comprend celle de phonogrammes ou de vidéogrammes.
La position du ministère ne résiste pas à
lexamen des travaux préparatoires qui présentent
bien comme relevant dune seule et même idée
la création des uvres et leur diffusion. Il
nest pas possible de se méprendre sur lintention
du législateur. Sil a entendu limiter les aides
à la diffusion au seul spectacle vivant, cest
justement quil entendait exclure les aides à
lenregistrement et à la diffusion de phonogrammes
et de vidéogrammes, ces aides intéressant
dabord le secteur économique de la production
et non les auteurs et artistes interprètes.
Lanalyse du ministère de la culture ne résiste
pas davantage aux faits. Sil existe bien des uvres
audiovisuelles, lesquelles ne sauraient toutefois être
confondues avec celles relevant du spectacle vivant, ainsi
que nous lavons déjà largement démontré
dans nos écritures, la notion d uvre
phonographique est quant à elle totalement
inconnue.
Selon les prétentions du ministre la "création"
ne serait pas limitée au spectacle vivant, cette
limitation se rapportant uniquement à la diffusion.
Mais même en admettant cette thèse, on ne peut
assimiler la première fixation sur un support phonogramme
ou vidéogramme à de la création au
sens légal.
En prétendant que l'uvre
audiovisuelle se crée par sa première fixation
sur un support, le ministère de la culture montre
combien il est éloigné du processus de création.
En effet, larticle L. 121-5 du Code de la Propriété
Intellectuelle règle cette question, et énonce
:
Luvre audiovisuelle est réputée
achevée lorsque la version définitive a été
établie dun commun accord entre dune
part le réalisateur, ou éventuellement, les
coauteurs, et dautre part, le producteur.
Le processus de création dune uvre audiovisuelle
nest en effet absolument pas lié à la
fixation. Le ministère oublie quentre la fixation
des images et du son et létablissement de la
copie définitive, il peut se dérouler des
mois, voir des années de travail, cette phase étant
dailleurs aujourdhui amplifiée par la
technique des effets spéciaux et des insertions dimages
de synthèse.
Ainsi le Ministère de la culture, soutient dans son
bilan de l'action artistique des SPRD pour la période
1987-1994, une interprétation fort extensive du champ
d'application de la loi. Il énonce en effet que :
"la notion de création (...) comprend aussi
bien des actions préalables à la création
elle même, qu'il s'agisse d'études, d'animation,
de sensibilisation, que des actions postérieures
aux créations (incitations à l'exportation
de disques ou à des tournées à l'étranger)"
(pièce n°15, Rapport ADAMI, annexe 11, p°3,
C).
Ce point de vue est hautement critiquable dans la mesure
où cet argument n'est élaboré qu'à
l'unique fin d'éluder lapplication de la loi.
Cette analyse est confortée par le rapport "Mariani-Ducray"
de février 2000 (pièce n°19, B). Ce rapport
souligne que la notion d'aide à la création
telle qu'elle ressort du décret 98-1040, fait l'objet
d'une double interprétation : "
- restrictive, tout d'abord, dans l'alinéa a) qui
énumère de façon très précise
les quatre types d'activités susceptible dentrer
dans le champ des aides à la création et d'être
financées dans le cadre de l'article L 321-9 ;
- ouverte, ensuite, dans l'alinéa b) qui étend
la définition de l'aide à la création
à toutes sortes " d'actions propres à
assurer la défense et la promotion de la création".
Il en résulte selon le rapport précité
que :
" les activités artistiques prises en charge
par les SPRD se sont, en effet, révélées
infiniment plus larges que le champ des dépenses
visées par la loi et couvrent, en fait des dépenses
d'une nature différente."
Le rapport précise que :
" la nouvelle formulation permet sans doute de légitimer
désormais de telles pratiques. Il n'en demeure pas
moins que subsiste une forme de contradiction au sein d'un
même texte de ces deux alinéas et qu'un certain
nombre d'ambiguïtés ou problèmes d'interprétation
demeurent sur la nature des activités susceptibles
d'être financées dans le cadre de l'article
L 321-9".
Les dispositions sus-visées du décret attaqué
opèrent donc bien un détournement de loi.
3 - sur la formation d'artistes :
Le ministre de la culture prétend que :
"C'est à tort que la requérante prétend
que le décret ne pouvait pas prévoir dans
le domaine de la formation que la formation aidée
bénéficie aux auteurs comme aux artistes interprètes".
Pour lui, le terme dartiste désigne
tant les auteurs que les artistes. "Le législateur
prévoyant l'aide aux actions de formation des artistes
n'a pas entendu limiter cette aide à la seule formation
des artistes interprètes. Si tel avait été
le cas, il l'aurait précisé. En visant la
"formation des artistes", la loi y a englobé
les auteurs. En effet, il serait pour le moins paradoxal
de dénier aux auteurs (compositeurs, écrivains,
peintres, sculpteurs, concepteurs ...) la qualité
d'artiste, comme le prétend la société
GR.A.C.E., sans même tenter une démonstration
du bien-fondé de son affirmation".
La société GR.A.C.E. considère quant
à elle que le texte de loi n'évoque la possibilité
dintervention des SPRD dans le domaine de la formation
quà destination des artistes et non des auteurs
et que le décret attaqué détourne donc
la loi également sur ce point.
Sur la notion d'artiste:
Le terme dartiste est clairement défini par
larticle L. 212-1 du CPI (issu de l'article 16 de
la loi du 3 juillet 1985), lequel dispose que :
" à l'exclusion de l'artiste de complément,
considéré comme tel par les usages professionnels,
l'artiste-interprète ou exécutant est la personne
qui représente, chante, récite, déclame,
joue ou exécute de toute manière une uvre
littéraire ou artistique, un numéro de variétés,
de cirque ou de marionnettes" (pièce n°23).
Il en résulte que selon le sens de la loi la notion
d'artiste recouvre "l'artiste interprète"
et "l'artiste de complément".
Cette définition peut être complétée
par celles qui figurent :
- à l'article 3.a de la convention de Rome, qui entend
par artiste, "les acteurs chanteurs, musiciens,
danseurs et autres personnes qui représentent, chantent,
récitent, déclament, jouent ou exécutent
de tout autre manière des uvres littéraires
ou artistiques."
Cette convention a été ratifiée par
la France en date du 9 mars 1988 (JCP éd. G. 1988,
III, 61364) et simpose donc au ministre de la culture.
Cette analyse est également confortée par
la définition de lartiste qui figure à
l'alinéa 3 de l'article L. 762-1 du Code du travail
; lequel énonce : "Sont considérés
comme artistes du spectacle, notamment l'artiste lyrique,
l'artiste dramatique, l'artiste chorégraphique, l'artiste
de variétés, le musicien, le chansonnier,
l'artiste de complément, le chef d'orchestre, l'arrangeur-orchestrateur
et, pour l'exécution matérielle de sa conception
artistique, le metteur en scène."
Cette définition du metteur en scène sapplique
de façon identique au chorégraphe, au réalisateur
audiovisuel et à tous les artistes ayant à
la fois une fonction dinterprétation et de
direction dacteur et une fonction de création.
Seule lintervention de ces professionnels relative
à lexécution matérielle de la
conception artistique relève de la définition
de lArtiste.
Il ressort de l'ensemble de ces dispositions, que le terme
d' artiste au sens du CPI, comme dailleurs
du code du travail (auquel renvoient les articles L. 212-3
et 212-6 du CPI) vise une fonction de représentation,
d'exécution et d'interprétation, qui ne peut
se confondre avec la qualité d'auteur qui consiste
en une activité de création.
La distinction des notions d'auteur et
d'artiste est une question d'importance
capitale, et la Convention de Berne a de manière
constante, dans sa lettre et dans son esprit, reconnu et
limité au seul créateur, la qualité
d'auteur.
Le législateur a toujours pris le soin de distinguer
l'auteur de l'artiste. Le CPI, quand il entend désigner
à la fois les artistes interprètes et les
auteurs, le dit clairement, et aucune disposition de la
loi ne fait damalgame entre ces deux notions.
Ainsi, par exemple, bien qu'accordant des droits équivalents,
les articles L.121-1 et L.212-2 du CPI attribuent distinctement
et respectivement à l'un "le respect de son
nom, de sa qualité et de son uvre" et
à l'autre " le respect de son nom, de sa
qualité et de son interprétation".
À défaut de toute précision dans les
débats parlementaires sur ce point considéré
comme suffisamment clair, il convient de se référer
aux principes constants du CPI et différencier très
clairement les notions dartiste et dauteur.
Par conséquent le décret fait à nouveau
sur ce point une interprétation extensive de la disposition
législative en dépit de la volonté
du législateur.
Plaise au Conseil d'État de constater que cette disposition
du décret attaqué opère un détournement
de la loi, et doit en conséquence être annulée.
4°- Sur les "allégations"
relatives aux pratiques des agents du ministère :
Selon le ministère de la culture, "les développements
de ce paragraphe II commençant par " le décret
tente de légaliser " et s'achevant par
"ne va pas directement alimenter les entreprises de
fonctionnaires et agents privés du ministère
de la culture" se composent exclusivement d'insinuations
et d'allégations diffamatoires pour les agents du
ministère de la culture, comme pour le ministère
lui-même, dans des conditions qui justifient que la
ministre de la culture et de la communication sollicite
la suppression de l'ensemble de ces développements
en application de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881".
Les allégations avancées par la société
GR.A.C.E. "sont au demeurant totalement infondées.
Elles constituent une série d'affirmations qui ne
sont ni démontrées ni justifiées par
le moindre commencement de preuve du sérieux d'imputations
aussi graves" "En visant les "actions
d'aide à la création" le législateur
n'a pas entendu exclure les aides indirectes mais certainement
efficaces pour la création que sont les actions propres
à assurer sa défense et sa promotion. La disposition
litigieuse s'inscrit bien dans le cadre législatif,
que le décret attaqué avait pour objet de
mettre en uvre".
* Pour la société GRACE, ce "marché
de la défense et de la promotion de la création,
comme dailleurs celui de la diffusion des uvres
audiovisuelles est en effet occupé par plusieurs
centaines d'entreprises créées illégalement
par le Ministère de la culture et ses agents,"
et qui ont pour but de contrôler intégralement
le marché de la culture.
Le Ministère de la culture, chargé de contrôler
les sociétés civiles de gestion et de répartition
des droits est en effet un des premiers bénéficiaires
des aides de ces sociétés. À titre
d'exemple, le gérant de l'ADAMI, société
civile sous tutelle du ministère de la culture, qui
a été élu fin 1998 est un agent du
Ministère de la culture, salarié de l'Institut
de Recherche pour les Musiques Actuelles, organisme considéré
par la ministre de la culture comme relevant de ses services.
Le journal Le Monde s'est d'ailleurs fait l'écho
de cette bizarrerie (pièce n° 24, journal Le
Monde du 29 décembre 1998).
Le décret du 18 novembre a donc pour effet de permettre
aux sociétés civiles de financer les associations
de promotion de la création des fonctionnaires du
Ministère de la Culture chargées de les contrôler
et d'acheter le silence des syndicats professionnels en
leur permettant de récupérer une partie de
l'argent ainsi détourné de son objectif. Il
tente donc de réglementer un système de corruption
et de permettre ainsi aux fonctionnaires du Ministère
de la culture d'étendre considérablement leur
pouvoir sur le marché de la culture.
Ce décret est contraire au principe général
d'indépendance et d'impartialité de l'administration
de l'État qui n'a pas à permettre aux organismes
qu'elle a pour mission de contrôler de les rémunérer.
Seul le Parlement est en effet compétent pour voter
l'impôt et celui-ci est attribué globalement
au budget de l'État et ne va pas directement alimenter
les entreprises des fonctionnaires et agents privés
du Ministère de la culture.
De plus cet argent va fort peu à la création
et beaucoup au paiement des structures permanentes et de
leurs agents, ainsi que le note fort justement le rapport
de la cour des comptes de janvier 2000 consacré aux
relations entre le ministère de la culture et les
associations.
La société GR.A.C.E. entend apporter la preuve
de ces affirmations et est heureuse de constater que la
ministre les considère effectivement comme très
graves et quelle aura tout à fait la possibilité
de transmettre le dossier de la Société G.R.A.C.E
et les pièces qui y sont jointes au Procureur de
la République.
Le Rapport dinspection de lADAMI réalisé
par un inspecteur général du ministère
de la culture et un inspecteur du ministère des finances,
donne quelques exemples très précis des affirmations
de la société GR.A.C.E. et du financement
par les sociétés civiles de perception et
répartitions dun certain nombre dassociations
para-administratives du ministère de la culture,
voire de sociétés privées dirigées
par des agents du ministère de la culture en situation
de prise illégale dintérêts.
Nous ne citerons que quelques exemples qui nous ont semblé
fort éloquents (pièce n° 25, p.43-70).
4.1 - Le festival dAvignon (pièce n°
15, page 7)
Le festival dAvignon est une association selon la
loi de 1901. Cette association est majoritairement financée
par des fonds publics, émanant notamment du ministère
de la culture (voir pièce n° 26, programme officiel
du festival d'Avignon 2000).
Cette
association gère le festival dAvignon considéré
comme la première des manifestations de théâtre
à vocation nationale et internationale subventionnée
par le ministère de la culture (pièce n°27).
Cette association dispose dune délégation
de mission de service public culturel, voir dun marché
public culturel sans quil ny ait jamais eu ni
appel doffre, ni mise en concurrence, contrairement
aux dispositions relatives aux marchés publics et
aux délégations de service public. Elle perçoit
chaque année des sommes fort conséquentes
de lADAMI au titre de laction culturelle, cest-à-dire
des fonds non répartissables que le décret
attaqué vient réglementer.
Ainsi en 1995, l'ADAMI a financé ce festival, au
titre de l'article L. 321-9 du CPI, à hauteur de
2 138 000 F (Annexe n° 11 p.7 du rapport de la mission
d'audit de l'ADAMI, pièce n°15, et pièce
n° 26). La brochure du festival pour lannée
2000 montre que lADAMI continue à financer
très régulièrement ce festival.
Par ailleurs, l'association est littéralement intégrée
à l'organigramme du Ministère. Dans une de
ses brochures, la direction du théâtre et des
spectacles du ministère de la culture en évoque
un financement direct en raison de sa vocation nationale
et internationale (pièce n°27).
Le rapport MARIANI DUCRAY prend lui aussi pour exemple les
subventions des SPRD au festival dAvignon pour souligner
l'opacité qui entoure la gestion des SPRD pour ce
qui est du montant des budgets effectivement affectés
à des actions artistiques d'intérêt
général au titre de l'article L.321-9 du CPI.
"Les aides aux structures, assorties d'un montant de
subvention, ne permettent pas plus de déterminer
la nature de l'aide ou de l'opération financière
: une même subvention à un organisme tel que
le Festival de Cannes, le MIDEM ou le Festival d'Avignon,
peut aussi bien recouvrir la location d'un stand, la tenue
d'un colloque que l'aide à la création pour
de jeunes artistes..."
"Il est donc à ce stade légitime de
s'interroger sur la capacité réelle donnée
à l'Assemblée Générale de ces
sociétés de contrôler de près
ou de loin les dépenses engagées au titre
de l'article L.321-9 et, accessoirement, aux services du
Ministère de la Culture, d'en avoir une vision détaillée"
(pièce n°19, p° 104 - 105).
Cette association du festival dAvignon qui gère
une activité de spectacle public par nature commerciale
en application de larticle 632 du code du commerce
est de plus actuellement dirigée par Monsieur Bernard
FAIVRE dARCIER, fonctionnaire du ministère
de la culture en détachement, qui occupait précédemment
les fonctions de Directeur du Théâtre et des
Spectacles au ministère de la culture, cest-à-dire
de ladministration de tutelle dudit festival. Il a
dailleurs fait à deux fois depuis 1989 le va
et vient entre ses fonctions à la direction du ministère
et celles à la direction du festival (Voir sur cette
question la pièce n° 25, "Cultivez-vous
!...", p. 90, p. 288 et s. Les faits présentés
dans cet ouvrage publié en 1998 étant aujourdhui
prescrits, nous ne reproduisons pas cette pièce et
vous invitons à vous reporter à la lecture
de cet ouvrage).
Lexamen du programme du festival dAvignon illustre
clairement ce propos. La plupart des spectacles présentés
dans ce festival et subventionnés également
directement par lADAMI sont coproduits par des structures
associatives ou commerciales sous tutelle étroite
du ministère de la culture qui en contrôle
la vie sociale, les budgets et en nomme les dirigeants,
quand il ne simmisce pas de façon beaucoup
plus directe et permanente dans leur gestion. Ainsi des
centres dramatiques nationaux (CDN) pour lesquels il existe
un arrêté publié au Journal officiel
montrant clairement que ces SARL ou SA sont directement
dirigées par le ministère de la culture et
son directeur du théâtre et des spectacles
qui en nomme les PDG, gérants, et responsables administratifs.
(pièces 25, p 320 et suiv ; 28 ; 29 ; 30) en dehors
de tout cadre légal.
À titre dexemple le spectacle "Monnaie
de Singes" (pièce n° 26, p.11), est
coproduit entre autre par le Théâtre de la
ville de Paris, le Théâtre de la Manufacture
(CDN Nancy-Lorraine) et le festival d'Avignon. Ce spectacle
bénéficie également du soutien de l'Association
française d'Action artistique (association para-administrative
illégale du ministère des Affaires étrangères)
et du concours de l'ADAMI, présente en tant que coproducteur
d'une grande partie des spectacles du festival.
Le festival dAVIGNON intègre également
une production de lADAMI sur invitations, intitulée
"Adami, Paroles d'acteurs", qui est de fait une
opération de communication de lADAMI, accueillie
par le festival dAVIGNON (pièce n° 26,
p.17).
LADAMI nest pas la seule SPRD à financer
le festival dAVIGNON. Le programme de lédition
2000 montre que la SACD (société des Auteurs
et Compositeurs Dramatiques), finance une opération
danse (pièce n° 26, p.19). Cette opération
est mise en uvre et présentée par Madame
Karine SAPORTA, présidente de la commission danse
de la SACD (pièce n°31), qui dirige par ailleurs
le Centre Chorégraphique National de Caen, association
loi de 1901, titulaire dune délégation
de mission public sans délégation légale,
ni respect des règles de marché public, laquelle
devrait avoir la qualité dagent public et ne
devrait même pas percevoir de droits dauteurs
pour les spectacles quelle crée dans le cadre
de sa mission de service public, avec largent public,
et les outils du service public (pièce n° 32
et pièce n° 33).
La SACD finance également le festival dAvignon
par le biais de lassociation Beaumarchais, association
liée à la SACD, (pièce n°34). Len-tête
de ce document précise que lassociation BEAUMARCHAIS
a un accord particulier avec le festival dAvignon
quelle finance. Le conseil dadministration de
lassociation Beaumarchais comprend : Monsieur François
BRAIZE, sous directeur des Affaires Juridiques au ministère
de la Culture (en charge de la propriété intellectuelle
et du contrôle juridique des sociétés
dauteurs
), Monsieur Alain DONZEL, haut fonctionnaire
au Centre National de la Cinématographie (Ministère
de la culture), Monsieur Bernard Faivre dArcier, Directeur
du festival dAvignon et ancien directeur du Théâtre
au ministère de la culture, Madame Karine SAPORTA,
directrice du Centre Chorégraphique National de Caen
(Ministère de la culture), vice présidente
de la SACD
LAssociation Beaumarchais a pour objet dassurer
la Promotion des uvres quelle soutient dans
les milieux professionnels.
Le Festival dAVIGNON nest pas seulement financé
par le ministère de la culture, il en est une émanation
directe, dans le cadre duquel sont accueillies de nombreuses
structures illégales du ministère de la culture.
Largent de la création, au lieu daller
aux artistes, va aux productions du ministère de
la culture et de ses filiales , et tout cela
dans la plus parfaite illégalité, puisque
la quasi totalité de ces intervenants pourraient
encourir de lourdes sanctions pénales. Le décret
attaqué permet de financer ce type dentreprises
illégales en toute sérénité
sur les fonds en provenance de laction culturelle
des sociétés dauteurs et dartistes,
sensées être contrôlées par ceux-là
même quelles financent.
La société GRACE nest pas la seule à
se demander comment des irrégularités aussi
graves peuvent être commises par le ministre de la
culture sans que les juges ne réagissent. On peut
ainsi citer l'intervention dun Maître de conférences
en droit à l'Université d'Aix-Marseille III,
Madame France GUILLEMONAT, en 1995 lors d'un colloque sur
les "approches comparatives en économie de
la culture".
En effet, Madame GUILLEMONAT s'étonnait que :
" les pouvoirs publics se dissimulent derrière
des statuts privés ou non lucratifs qui leur sont
normalement interdits...".
et que: "La France, pour sa part, est sans doute
le pire exemple de confusion que l'on puisse proposer puisque
l'État lui-même donne l'exemple en intégrant
très officiellement dans l'organigramme d'un ministère
une association à but non-lucratif dont le statut
est officiellement privé. Les lois françaises
sont sévères à l'égard de ce
genre de pratique qui relèvent du détournement
de fonds publics. Il n'en demeure pas moins que les errements
persistent depuis de longues années sans pour autant
attirer l'attention des tribunaux" (pièce
n°35, p.3).
Le journal de la CGT Spectacles,, Plateaux
sinsurge également contre le financement
de toutes ces entreprises privées par des fonds publics
avec pour seule règle larbitraire et le copinage
(pièce n°36)
Le rapport de la Cour des comptes de janvier 2000 sinterroge
lui aussi sur les relations entre le ministre de la culture
et ces associations et contient des affirmations similaires
(pièce n°37).
Un article du Monde du 4 février 1999 montre également
la bizarrerie des entreprises privées
du ministère de la culture (pièce n°38).
4.2 - Le festival de Cannes
Cette association selon la loi de 1901 est également
subventionnée de façon conséquente
par lADAMI, le CNC (Centre National de la Cinématographie),
et dautres SPRD (Annexe n°11 p.8 du rapport de
la mission d'audit de l'ADAMI, pièce n° 15).
Cette association relève de ce quil convient
dappeler une association para administrative, pratique
interdite et hautement condamnable.
Ce festival a bénéficié au titre de
l'article L.321-9 du CPI d'une aide totale de la part de
la seule ADAMI pour 1996 de 1 580 000 F. Comme le Festival
d'Avignon, le Festival de Cannes est expressément
visé par le rapport MARIANI-DUCRAY.
Dans des brochures éditées par le Ministère
de la culture pour le Centre National de la Cinématographie
(CNC), le festival international du film de CANNES est cité
comme "grande institution alors que cette
"institution" est une association selon
la loi de 1901 intégrée dans lorganigramme
du ministère de la culture (pièce n°39).
De plus son financement est assuré par :
"Les subventions du ministère de la Culture,
du centre national de la cinématographie, de la ville
de Cannes, du ministère des Affaires étrangères,
du département des Alpes-Maritimes et de la région
Provence-Alpes-Côte d'Azur" (pièce
n° 39, guide du CNC).
Le CNC est un établissement public à caractère
administratif, doté de la personnalité juridique
et de l'autonomie financière, institué par
la loi du 25 octobre 1946, et placé sous l'autorité
du ministre de la Culture. Dans le cadre de ses aides aux
manifestations nationales et internationales, une aide est
accordée au festival de Cannes.
Le financement du festival international du film prouve
le caractère para-administratif de cette association.
4.3 - Le CIOD Centre dinformation et dorientation
du danseur,
Il sagit dun organisme intégré
au Centre National de la Danse, établissement public
industriel et commercial présidé par Madame
Anne CHIFFERT, inspecteur général du ministère
de la culture, ancienne directrice de la musique et de la
danse du ministère de la culture, qui semble dailleurs
en situation dinfraction au regard de larticle
L. 213-4 du Code pénal (infraction non prescrite)
(pièce n° 25, p.92). En effet, à ce titre,
elle signait ainsi en décembre 1997 une convention
(pièce n°40) sur la mission du Fonds pour la
création musicale (FCM), association de défense
et de promotion de la création musicale, financée
par six sociétés civiles de lindustrie
musicale sur les fonds provenant des financements de larticle
L. 321-9 du CPI, association dirigée par Didier BOUTLEUX,
ancien directeur de lIRMA, association para-administrative
intégrée dans lorganigramme du ministère
de la culture.
Les subventions dont le CIOD a bénéficiées,
sont critiquées par le rapport ADAMI (pièce
n°15, annexe n° 11, p.10).
"En 1995, l'aide accordée par l'ADAMI a été
assortie de la demande de prise en charge par le CIOD de
la fabrication, de l'édition et de la diffusion d'une
brochure conçue par l'ADAMI à destination
des danseurs. Cette dépense doit donc être
conçue comme une dépense de communication
de l'ADAMI, et non comme l'aide à la formation d'artistes
visée par l'article L.321-9".
Ce rapport illustre bien les pratiques dénoncées
par la société GRACE, que le décret
contesté tente de légaliser.
Le CIOD était présidé précédemment
par Monsieur André LARQUIE, fonctionnaire en détachement
( pièce n°41), responsable de nombreuses entreprises
de spectacle privées subventionnées, ancien
conseiller technique du Premier ministre pour la culture.
Le TCD, dont dépendait le CIOD avant son intégration
au sein du Centre National de la Danse percevait en 1997
du ministère de la culture la somme de 8 560 000
F . Le Centre National de la Danse qui lui a succédé
gère de nombreux marchés publics et missions
de service public sans quil y ait jamais eu dappel
doffre et mise en concurrence (pièce n°
52).
4.4 - UNIFRANCE
L'Association nationale pour la diffusion du film français
à l'étranger Unifrance film international,
a été fondée en 1949. Il sagit
dune association selon la loi du 1er juillet 1901.
Jusqu'en 1998, le directeur de la direction des affaires
européennes et internationales du CNC, Madame DEVAUCHELLE-CARRERE
D'ENCAUSSE, était membre de droit des instances dirigeantes
d'Unifrance film international, et y exerçait la
fonction de commissaire du gouvernement (pièces n°
42 et 43). Le CNC qui, doit-on le rappeler, est sous la
tutelle du ministère de la Culture.
De plus, parmi les membres du comité directeur, siégeant
de plein droit, on retrouve régulièrement
un représentant du Ministère de la Culture.
Ainsi siégeait en 1996 Monsieur BALDELLI et depuis
1998 Madame PERRAS (pièce n° 42).
Or, les ressources de l'association comprennent principalement
des subventions qui lui sont accordées par le ministère
de la Culture et le CNC ( pièce n° 30, guide
du CNC p.217).
Cette association pour la promotion du cinéma français
dans le monde est également citée dans le
rapport sur l'ADAMI ( pièce n° 15, annexe 11,
p. 14, et annexe 14 ) :
"Un échange de correspondance entre l'ADAMI
et Unifrance indique une volonté de l'ADAMI de faire
prendre en charge par cet organisme certaines de ses propres
charges de fonctionnement ( frais de transport et d'hébergement
de son représentant sur l'ensemble des opérations
organisées à l'étranger). Unifrance
a limité cette prise en charge au seul festival de
Yokohama, pour un coût de 30 000 francs, expliquant
que la satisfaction de la demande de l'ADAMI "excéderait
le montant de (son) apport et rendrait caduc, a fortiori,
un solde financier au bénéfice de l'association".
Outre l'opacité de la gestion de cette association,
son caractère para-administratif illustre bien le
détournement du principe associatif et de l'objectif
de partenariat poursuivi par le ministère et le financement
au titre de larticle L. 321-9 du CPI des organismes
développant des actions propres à
assurer la défense et la promotion de la création
qui la plupart du temps des filiales du ministère
de a culture sous forme associative.
Lassociation UNIFRANCE film a perçu en 1997
la somme de 48 120 000 F et continue à percevoir
chaque année des subvention de cet ordre sans appel
doffre ni mise en concurrence (pièce n°
52).
4.5 - lIFCIC, institut pour le financement du cinéma
et des industries culturelles.
Lexamen des associations subventionnées par
la Société des Auteurs Compositeurs et Éditeurs
de musique (SACEM), premier organisme français de
perception et de répartition de droits, pour lannée
1997 (pièce n°44) montre à titre dexemple
que la SACEM subventionne elle aussi au titre de laction
culturelle lIFCIC, dirigées très régulièrement
par des hauts fonctionnaires du ministère de la culture
qui semblent être en situation dinfraction au
regard de larticle L. 213 du code pénal :
- Monsieur Dominique WALLON en est le président depuis
le 25 avril 2000, il était précédemment
Directeur du théâtre, de la musique, du spectacle
et de la danse au Ministère de la culture, (DMDTS
au ministère de la culture où il avait été
nommé en 1997 et dont il a démissionné
en janvier 2000) il occupait ce poste en novembre 1998,
date du décret (pièces n°45 et 46).
LIFCIC arrive en premier sur la liste de la SACEM
des organismes bénéficiant des aides au titre
de laction culturelle. Il sagit dun établissement
financier. Il est financé au titre des
actions de soutien à la production de phonogrammes
(pièce n°47).
On comprend mieux lintérêt de lun
des principaux artisans de ce décret à étendre
lintervention des sociétés dauteur
dans le domaine des phonogrammes puisque les sociétés
dauteurs du monde de la musique dont il assurait en
partie la tutelle en sa qualité de directeur du ministère
de la culture peuvent désormais le subventionner
dans le cadre de ces nouvelles fonctions sur la base du
décret attaqué. Un tel exemple nest
hélas pas isolé au sein du ministère
de la culture, ces faits ne sont pas prescrits sur le plan
pénal.
Il est possible de noter par ailleurs que le sous-directeur
du ministère de la culture, en charge de la propriété
intellectuelle et qui a également travaillé
à ce décret, Monsieur FLORENSON, est aujourdhui
expert du GESAC, organismes de coopération des sociétés
dauteur, présidé par le même responsable
que la SACEM (pièce n° 47), situation passible
de sanctions pénales.
4.6 - Le Centre de Documentation de la musique contemporaine
CDMC, est également une association sous tutelle
du ministère de la culture et de la SACEM, financée
presque exclusivement par eux.
En décembre 1997, le bureau du CDMC était
composé de Monsieur Stéphane MARTIN, Directeur
de la musique et de la danse au ministère de la culture,
Président, Monsieur Jean-Loup TOURNIER, Président
du directoire de la SACEM, trésorier (pièce
n° 51 et page 56 de louvrage Cultivez-vous,
il men restera toujours quelque chose ,
pièce n° 25). Le bureau du CDMC a été
modifié en décembre 1998 et comprend depuis
au poste de Secrétaire général adjoint,
M. IZARD, Directeur délégué de la Sacem
(pièce n°48).
Il ressort des statuts (pièce n°48), que l'État
par le biais du Ministère chargé de la Culture
est membre fondateur de cette association.
Le ministère de la culture ne peut donc ignorer que
les fonds à répartir en application de larticle
L.321-9 du CPI, alimentent dans les faits des structures
satellites du ministère de la culture et de la SACEM.
Le CDMC a perçu en 1997 de la SACEM la somme de 1
565 000 F (pièce n° 44) et la somme de 1 030
000 F du Ministère de la culture (pièce n°
52).
4-7 - LIRMA
Les aides à des structures dinformation et
de diffusion concernent notamment également des associations
telles que lInstitut de Recherche pour les Musiques
Actuelles.
LIRMA était, jusqu'au 10 Octobre 1996, dirigée
par Monsieur DUTERTRE (pièces n° 24), membre
du bureau de l'ADAMI et trésorier de cette société
civile dartistes depuis le 12 janvier 1999 (pièce
n° 49, la lettre de l'ADAMI). Or, l'IRMA est subventionnée
à hauteur de 150 000 francs par l'ADAMI.
LIRMA a perçu de la SACEM en 1997 la somme
de 180 000 F (pièce n° 44) et 4 500 000 F du
ministère de la culture (pièce n° 52)
sans appel doffre ni mise en concurrence.
La Cour des comptes vient de montrer limportance du
problème
Le dernier rapport de la Cour des comptes de janvier 2000
contient un chapitre consacré aux rapports entre
le ministère de la culture et les associations
culturelles et montre lui aussi clairement que
de nombreuses entreprises associatives visées par
ce dossier sont en fait des associations para-administratives
qui permettent le dévoiement de toutes les règles
du droit public.
Ce rapport de la Cour des comptes de janvier 2000 dénonce
le détournement du principe associatif et de lobjectif
de partenariat poursuivi par le ministère de la culture
dans ses rapports avec les associations (pièce n°
37, p. 562).
Le Rapport public 1999 de la Cour des Comptes reprend la
définition des "associations para-administratives"
telle qu'elle résulte du rapport de 1995. Ces associations
para-administratives :
"peuvent constituer des démembrements de
l'administration, et dont la dépendance à
l'égard de celle-ci se manifeste par les trois critères
suivants:
- sur le plan administratif, les organes dirigeants et l'association
sont composés en majorité, voire de façon
exclusive, d'élus ou de fonctionnaires;
- sur le plan matériel, ces associations dépendent,
pour la quasi totalité de leurs ressources, des subventions
ou des concours en nature de la collectivité, qu'il
s'agisse d'immeubles, d'équipement ou de personnel;
la part des cotisations dans leur financement est nulle
ou très faible;
- sur le plan fonctionnel, ces associations exercent généralement
des activités ayant le caractère de service
public marqué." (pièce n°37).
Ce rapport montre clairement comment les responsables de
ces multiples associations daide et de promotion de
la création financent en fait des responsables du
ministère de la culture. Ce sont ces mêmes
associations que le décret attaqué entend
faire bénéficier des financements prévus
par larticle L. 321-9 du CPI.
Ces quelques exemples montrent clairement que le décret
du 18 novembre 1998 en prévoyant la possibilité
pour les sociétés civiles de perception et
de répartition des droits, de financer des actions
propres à assurer la défense t la promotion
de la création, entend dans les faits légaliser
les pratiques de subventionnement par ces sociétés
des entreprises para administratives ayant justement cet
objet social et souvent dirigées par des fonctionnaires
ou agents du ministère de la culture.
La Société G.R.A.C.E na pas accès
aux documents des sociétés civiles de gestion
et de répartitions du ministère de la culture
concernant la répartition des aides. Ce document
est prévu à larticle L 321-12 du CPI
et les SPRD doivent le communiquer chaque année au
ministère de la culture. Si le Conseil dÉtat
ne se considère pas comme suffisamment éclairé
par les quelques exemples ci-dessus développés,
il usera de son pouvoir inquisitorial pour demander à
la ministre de la culture de fournir aux débats les
documents détaillant les entreprises bénéficiant
des aides des sociétés SPRD au titre de laction
culturelle.
La fourniture de ce document permettra à la société
GR.A.C.E., si cela est encore nécessaire, de montrer
quen tentant de légaliser les aides aux actions
propres à assurer la défense et la promotion
de la création, idée totalement absente de
larticle L.321-9 du CPI, la ministre de la culture
et le premier ministre veulent en fait légaliser
un mécanisme de détournement de fonds au profit
des propres services, hauts fonctionnaires et agents publics
du ministère de la culture.
Le Conseil dÉtat constatera que la société
G.R.A.C.E apporte les preuves de ses propos et quil
ny a donc pas lieu à les considérer
comme injurieux et diffamatoires puisquils relatent
la vérité.
Si le Conseil dÉtat considère que ces
propos mettent en cause des ministres dans lexercice
de leurs fonctions, il pourra également à
titre préjudiciel saisir la Cour de Justice de la
République de la question.
Plaise en conséquence au Conseil d'annuler le nouvel
article R 321-9 du CPI, issu du décret attaqué
pour violation de la loi.
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