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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
intermittents spectacles : la conspiration du silence


Une fois de plus, le régime des Assedic cinéma spectacle est au cœur de l'actualité. Une fois de plus, on prend soin de cacher les vraies questions. Que cache un contentieux où des chefs d'entreprises se laissent saborder par un mouvement syndical sans réagir ? ou des syndicats d'employeurs tels que le SYNDEAC ( syndicat des directeurs de théâtres sous tutelle du ministère de la culture) soutiennent les revendications des manifestants qui sabordent leurs représentations ? Que cache un contentieux où le ministre dénonce les dérives des entreprises de l'audiovisuel alors que les manifestants ne s'attaquent qu'aux festivals subventionnés ? À quoi peut bien correspondre une grève financée par l'UNEDIC dans laquelle les soit disant grévistes ne perdent aucune rémunération ? Comment se fait-il qu'un mouvement fasse une telle unanimité dans les médias et que le ministère de la culture intervienne aussi peu et de façon si contradictoire ?

Ce dossier des intermittents est tout de même fort étonnant. La réalité qu'il cache est quant à elle on ne peut plus détonante. Il semble que le Medef qui commence à être fort agacé par l'image négative que les médias largement subventionnés par le ministère de la culture lui renvoient ait envie de mettre les pieds dans le plat. Pour la première fois, le MEDEF met clairement en cause la conspiration entre la CGT, le ministère de la culture et les employeurs des secteurs du spectacle et de l'audiovisuel.

Tous les employeurs ne sont pas pareillement responsables des abus

Si nous pensons que le MEDEF a mis le doigt sur le vrai problème en dénonçant les employeurs des secteurs du spectacle et de l'audiovisuel qui abusent depuis des années des subventions à la production que représentent les allocations chômage, il se trompe cependant quand il met tous les employeurs dans le même sac. Il semble ignorer que la majorité des employeurs du secteur du spectacle, organisés sous forme d'associations ou de sociétés commerciales, ne devraient même pas relever du droit privé. Ces entreprises sont en fait des démembrements de l'État et des collectivités territoriales dont les salariés ne devraient pas relever du droit du travail, mais de la fonction publique. Il ne faut pas oublier que seules les entreprises privées relèvent des assedic et que le système ne concerne pas en principe les agents publics.

La France est le seul pays d'Europe dans lequel il existe une telle confusion entre le secteur public et le secteur privé. L'exception culturelle française couvre très souvent dans les faits des situations et des systèmes dont la vraie qualification se trouve dans le code pénal.

Le MEDEF n'a pas conscience que les employeurs privés subissent une concurrence déloyale des très nombreuses entreprises para publiques sans réelle possibilité de critiquer cette situation puisque l'administration en charge de la contrôler est la principale instigatrice des déviances et a droit de vie et de mort sur elles par le biais des financements et des autorisations d'exercice. Les employeurs du privé qui recourent très largement à des faux contrats à durée déterminée d'usage et de façon très conséquente au travail au noir n'ont souvent pas le choix puisque le ministère de la culture, ses entreprises publiques, para publiques et privées et celles de ses agents utilisent ces méthodes depuis fort longtemps sans subir de critiques. Cette situation est aggravée par le fait que le secteur public exerce une domination écrasante sur le marché et que le syndicat CGT qui cogère ce système empêche toute critique indépendante d'émerger.

De plus, le ministère de la culture contrôle la presse écrite et audiovisuelle par le biais des subventions (1). Il veille donc à ce que les vraies questions ne soient jamais posées. La presse audiovisuelle ne montre de toute façon qu'un seul point de vue, l'intérêt des entreprises sous dépendance étant le même que celui des syndicats.

Un système où tout le monde triche


Monsieur AILLAGON a déclaré qu'il allait intervenir pour multiplier les contrôles dans les entreprises audiovisuelles, grandes bénéficiaires des Assedic. Le moins que l'on puisse dire, c'est que notre ministre de la culture ne manque pas d'aplomb. En effet, les premières bénéficiaires du système, sont les entreprises sous tutelle du ministère de la culture. Ce dernier contrôle en effet l'immense majorité des entreprises du secteur du spectacle vivant. La plupart des festivals annulés ne sont pas des entreprises indépendantes. Qu'il s'agisse du festival d'Avignon, de Montpellier, de Marseille, toutes ces entreprises sont des associations selon la loi de 1901 en situation de dépendance totale vis-à-vis du ministère de la culture. Leurs directeurs seront payés quoi qu'il arrive. C'est le ministère et/ou les collectivités territoriales qui financent les déficits. Ils peuvent donc sans danger s'associer à la CGT, soutenir le mouvement de contestation, et annuler leurs manifestations afin de nuire à l'économie locale, au prétexte qu'ils ne souhaitent pas demander la protection de la force publique.

Ce n'est pas un hasard si le festival des vieilles charrues a osé braver la CGT, il est indépendant et ne perçoit pratiquement pas de subvention. Par contre attention au retour de bâton. Ce festival a récemment eu des problèmes, on lui refusait sa licence de producteur, la CGT participe aux commissions d'attribution...

La plupart des entreprises actuellement "en grève" ou qui annulent leurs représentations sont dirigées par des faux demandeurs d'emplois qui perçoivent les ASSEDIC et souvent par des agents du ministère de la culture (ainsi du festival d'Avignon, dirigé par l'ancien directeur du théâtre et des spectacles du ministère de la culture).

Les commerçants qui subissent un grave préjudice pourraient d'ailleurs rechercher la responsabilité du ministère de la culture qui est directement responsable de ces entreprises irresponsables qui préfèrent se saborder plutôt que de défendre leur saison.

La dénonciation des abus par la CGT spectacle est de pure rhétorique

La CGT dénonce elle aussi les dérives du système. Elle désigne les entreprises de l'audiovisuel privé. Or, dans ces entreprises, la CGT soutient le recours massif aux contrats à durée déterminé d'usage et se garde bien de critiquer ces situations, puisqu' elles la font vivre et lui rapportent en tant qu'organisation. Elle négocie ainsi de très nombreuses conventions collectives des intermittents dont elle connaît parfaitement l'utilisation illégale qui en est faite. La CGT accepte aussi des signer des conventions collectives avec des faux syndicats d'employeurs, dont les responsables lui sont souvent inféodés et qu'elle subventionne par le biais de l'ADAMI ou de la SPEDIDAM. La CGT spectacle est bien entendu payée pour toutes ces négociations et les entreprises lui versent une obole proportionnelle à leur masse salariale.

La preuve en est que la CGT aurait tout à fait les moyens de mettre fin aux abus si elle le souhaitait et si elle était vraiment présente dans les entreprises des secteurs du spectacle et de l'audiovisuel. En effet, l'article L. 122-3-16 du code du travail donne compétence aux syndicats représentatifs pour agir devant le conseil des prud'hommes afin de faire requalifier les faux contrats d'usage en contrat à durée indéterminée, sans même avoir à justifier être mandatés par le salarié concerné.

Or, alors que la CGT-spectacle dénonce les entreprises qui auraient un recours excessif à ces contrats et qui abuseraient du système des Assedic, elle n'a à notre connaissance jamais utilisé cette possibilité légale, ni elle, ni aucun autre syndicat représentatif. Les syndicats du spectacle tirent profit de cette situation et n'ont surtout pas envie de la voir évoluer.

La CGT spectacle se comporte en chef de mafia

Le grand public et les artistes ignorent que la CGT spectacles qui finance le mouvement contestataire est une organisation dont les statuts déclarés à la Mairie mentionnent qu'elle est contre le pluralisme et la propriété privée des moyens de production. Ses statuts contiennent une véritable profession de foi antidémocratique de nature totalitaire. Ils mentionnent notamment que la CGT est contre le pluralisme. Elle revendique d'ailleurs le fait que seuls les artistes et techniciens encartés aient le droit d'exercer. La CGT spectacle rêve d'un monopole d'embauche dans le spectacle dont elle aurait le contrôle.

Le ministère de la culture a largement contribué à donner à la CGT spectacle une influence considérable. La loi Lang de 1985 lui a donné les moyens financiers de développer une politique de clientélisme à grande échelle. À cette époque, le parti socialiste avait besoin des voix communistes pour gouverner. Jack LANG a donc conféré à des groupuscules sans réelle représentativité des moyens financiers énormes et leur a confié le soin de subventionner par le biais de ses relais ADAMI, SPEDIDAM, SACD, etc… de très nombreuses entreprises de spectacles. Ces sociétés ont en effet une obligation légale de consacrer une partie des fonds en provenance de la copie privée, de la rémunération équitable et des sommes non répartissables perçues au titre des droits d'auteur et des droits voisins à des actions culturelles (une redevance est perçue sur chaque cassette, vidéo, CDR, et tous les supports numériques). Ces sommes sont encore augmenté avec le développement de la copie privée numérique. Une entreprise qui est financée par les filiales de la CGT peut difficilement refuser de répondre à ses sollicitations. C'est ainsi que fonctionne tout système de clientélisme. Quand le patron (la CGT spectacle) convoque ses clients qui lui sont financièrement redevables, ceux-ci se doivent d'obtempérer.

La CGT spectacle subventionne encore les entreprises par le biais des nombreuses institutions du type fonds de soutien dans lesquelles le ministère de la culture lui a donné des places de choix. Elle contrôle également la formation professionnelle du spectacle par le biais de l'AFDAS. De très nombreuses entreprises de spectacles étant considérées et déclarées en qualité d'organismes de formation, les répétitions, quand elles ne sont pas financées par les ASSEDIC, le sont par l'AFDAS et l'ANPE, ce qui a l'avantage de générer des droits au chômage. Ce mécanisme permet lui aussi de subventionner de nombreuses entreprises et de bénéficier de la clientèle attachée à cette capacité d'organiser la dépendance des artistes et des producteurs.

C'est justement parce que le nouvel accord Assedic modifie la possibilité de prendre en compte les heures de formation dans les 507 heures nécessaire pour faire ouvrir des droits que la CGT est montée au créneau cet été de façon si virulente. En effet, la formation professionnelle est pour elle une source considérable de revenus et elle ne peut tolérer que l'on porte atteinte à son train de vie et à sa capacité de générer du clientélisme.


La CGT-spectacle défend son fonds de commerce

La CGT-Spectacle n'a aucun intérêt à ce que les institutions soient réformées et permettent de faire des artistes autre chose que des quémandeurs. Elle défend donc une économie qui ne leur permet de subsister qu'en mendiant des subventions et des passe-droits.

Une chose est certaine, la défense de la culture n'est pas la préoccupation principale des permanents syndicaux de la CGT spectacles.

Le pouvoir de la CGT-Spectacle est étroitement lié à celui du ministère de la culture


Leurs intérêts sont indissociables. C'est le ministère de la culture qui a développé le pouvoir de la CGT spectacles afin de soutenir son propre accaparement des moyens de production français. Se faisant, le ministère de la culture a acheté le silence de cette organisation. C'est la raison pour laquelle le ministère de la culture soutient le nouvel accord qui permet le maintient du système actuel sans modifications de fonds afin d'éviter le débat que susciterait la remise en cause par le Medef de la totalité du système.


Depuis 20 ans, qu'il existe un problème de déficit de l'assurance-chômage du spectacle et de l'audiovisuel, le ministère de la culture a obtenu du Medef le maintien du système en lui octroyant des contreparties. Ce qui est sans doute différent aujourd'hui, c'est que l'ampleur des déficits publics et les engagements européens de la France ne permettent pas au gouvernement de disposer d'une marge de manœuvre à même d'acheter les bonnes grâces du patronat, ainsi qu'avaient pu le faire les précédents ministres de la culture.

Les conséquences du contrôle renforcé sur les entreprises privées

Quand le ministère de la culture et la CGT revendiquent un renforcement du contrôle sur les entreprises de l'audiovisuel et les entreprises de spectacle indépendantes, ils savent qu'il ne s'agit que d'un discours pieux, tout contrôle réel ne pourrait en effet que les mettre en danger. Ces entreprises sont contraintes de s'aligner sur les méthodes de gestion du public et du para public si elles veulent rester concurrentielles.


Quand les entreprises publiques font un recours massif à l'intermittence illégale, il serait suicidaire pour une entreprise du secteur privé de payer le prix du travail à son coût réel. Les entreprises privées sont régulièrement condamnées pour ces pratiques, tout comme les entreprises publiques. La différence, c'est que lorsque l'entreprise publique ou parapublique est condamnée, c'est la collectivité qui paie alors qu'une entreprise réellement privée doit assumer les condamnations et les payer sur son budget. C'est la raison de l'existence des chaînes de sous-traitance si nombreuses dans le domaine de l'audiovisuel. Les entreprises titulaires des droits sur les œuvres font très souvent sous traiter la production exécutive par des entreprises aux durées de vie parfois fort brèves. Ce mécanisme a l'avantage de plaire aux grandes entreprises privées de nature capitalistiques puisque il fraine l'émergeance de nouveaux acteurs sur le marché qui seront coulées par la première condamnation.

Il convient également de tenir compte du fait que les pouvoirs publics ne doivent pas aller trop loin dans leur volonté de contrôle, car ils risqueraient de déclencher des réactions des entreprises privées contre les très nombreuses infractions commises par les agents publics. Les pouvoirs public n'ont en réalité aucun moyen de faire appliquer le droit, tant la règle de droit est dévoyée. Dans le secteur culturel français, la règle de droit n'a qu'une fonction décorative. C'est la loi de jungle et du plus fort qui règne seule, l'état de droit est aussi inexistant dans l'exception culturelle française que la diversité qu'elle est sensée défendre.

Tout cela n'est donc que de la communication. Cela fait d'ailleurs 20 ans qu'on annonce périodiquement la même volonté de mettre fin aux abus et que rien ne change

Analyse juridique de la situation des "intermittents" contestataires

La présentation donnée par la télévision de ce conflit est éloquente. À titre d'exemple, le journal de TF1 du 2 juillet 2003 à 13 h. consacrait un reportage en vue d'expliquer pourquoi les artistes avaient besoin des Assedic. L'analyse juridique des situations présentées est ahurissante.

Deux artistes étaient présentés :
La première explique qu'elle a besoin des allocations assedic, que les répétitions ne sont jamais payées et que pour une journée déclarée correspondant à une représentation publique, il y a en moyenne cinq jours de répétition non payés. Cette artiste explique qu'elle donne environ 43 représentations par an (ce qui représente exactement le nombre de cachets nécessaires pour ouvrir des droits).

Décriptage de la situation présentée :
Cette artiste reconnaît qu'elle travaille effectivement 5 jours (temps représentation et répétitions) x 43 = 215 jour par an). Si on rajoute les jours de repos (2 jours par 47 semaines), soit 94 jours, les jours fériés, en moyenne 13 jours, les cinq semaines de congés, soit 35 jours, cela fait 357 jours. Cette artiste travaille à temps plein et n'a donc pas la qualité de demandeuse d'emploi.

Elle ne devrait donc pas relever du régime des Assedic.

Cette fausse demandeuse d'emploi est passible du délit d'escroquerie aux Assedic, délit pourtant rappelé sur les feuillets édités par les Assedic, lesquels rappellent que toute fausse déclaration est passible de poursuites pénales au titre de l'escroquerie. Cette artiste qui reconnaît publiquement à la télévision des faits relevant de l'escroquerie a totalement oublié que le mécanisme de l'allocation chômage concerne en principe les personnes en situation de recherche d'emploi.

Le fait que cette artiste est effectivement sous payée ne justifie pas la mise en place d'un système d'escroquerie aux assedic. Ou alors, on justifie tous les comportements délinquants. Cette artiste se trompe d'adversaire. Elle doit lutter contre le ministère de la culture, les collectivités publiques et leurs entreprises culturelles qui sous paient les artistes, vendent à perte grâce aux subventions et créent une concurrence déloyale qui oblige les artistes indépendants à vendre leurs productions en dessous de leur prix de revient et à dépendre des assedic de façon illégale mais connue de tous les professionnels.

Le second exemple présenté au même journal télévisé :
Il s'agit d'un acteur qui a créé son propre spectacle et sa compagnie, sans doute sous forme d'association selon la loi de 1901. Il explique qu'il travaille à temps plein pour créer et mettre en scène son spectacle, qu'il s'occupe également du démarchage et de l'administration de sa compagnie, et qu'il ne déclare aucune journée de travail pour toute cette période. Il montre son attestation de déclaration selon laquelle il n'a effectivement travaillé aucun jour durant cette période. Le journaliste qui fait le documentaire ne s'étonne pas qu'une personne puisse reconnaître travailler à temps plein, avoir la qualité d'entrepreneur indépendant (une compagnie de spectacles est une entreprise), et se permettre de déclarer qu'il n'a pas travaillé de toute la période, en oubliant qu'il n'aurait dû déclarer que les jours durant lesquels il était en recherche effective d'emploi et non les jours durant lesquels il était en situation de travail dissimulé.

Cet artiste a en effet clairement reconnu être en situation d'employeur clandestin, passible du délit de travail dissimulé, et d'escroquerie aux Assedic puisqu'il déclare être en situation de recherche d'emploi alors qu'il travaille à temps plein.

Les "intermittents" honnêtes se trompent d'adversaire : le financement de la culture ne doit pas relever des assedic


Ce qui est regrettable dans ce dossier, c'est que la subvention des Assedic à la culture est le seul espace de liberté laissé par le ministère de la culture et son chien de garde Cégétiste. En effet, alors que tous les mécanismes de subventionnement du ministère de la culture et de la CGT sont soumis au respect de contraintes plus ou moins importantes, et à un contrôle du "artistiquement et politiquement correct", le financement des Assedic est le seul financement automatique et objectif non soumis à des conditions artistiques ou politiques (2)

Les grand oubliés de ce débat

Il n'est pas forcément utile de défendre les artistes et techniciens qui ne vivent que de mannes publiques sans jamais rencontrer leur public. Il est plus important de défendre les artistes que ce système contraint au travail au noir et qui n'ont même pas les rémunérations suffisantes pour se voir ouvrir des droits dans le système actuel puisqu'ils n'ont pratiquement jamais de fiche de paie.

En effet, les tarifs d'engagement des artistes et des spectacles inférieurs à leur prix de revient obligent à la marginalité de très nombreux artistes qui travaillent de façon isolée et qui n'ont pas vocation à être médiatisés, mais qui participent à l'existence de la vie culturelle française.

Ces artistes mis à l'écart le sont par des institutions, CGT spectacle et ministère de la culture qui se sont accaparés les moyens de production au lieu de les contrôler et de veiller à leur bon fonctionnement. Il n'existe donc aucun contrôle sérieux et les inspecteurs du travail du ministère des affaires sociales sont dans l'incapacité de contrôler des entreprises par ailleurs sous contrôle du ministère de la culture et du pouvoir politique. La culture française vit à l'heure d'un capitalisme sauvage, ou seul prévaut la loi du plus fort et de ceux qui détiennent le pouvoir, à savoir le ministère de la culture et la CGT spectacle. Quand un spectacle au Stade de France, retransmis à la télévision comprend plusieurs centaines de choristes non déclarés, la CGT spectacle ne dit rien, le producteur est un copain ! À l'heure ou la CGT empêche certains spectacles de se dérouler, Monsieur Jean VOIRIN, patron de la CGT spectacle (et par ailleurs chef d'entreprise), assiste à un spectacle au stade de France en spectateur respectueux…

Quand un spectacle à la Grande Halle de la Villette a recours aux services de centaines de musiciens non-déclarés, la CGT spectacles ne dit rien non plus, elle produit le spectacle et le subventionne.

Quand la presque totalité des petites salles parisiennes fait travailler les artistes et musiciens sur des faux contrats de coréalisation qui sont en fait des vrais contrats de location de salle, ce qui est le cas de la majorité des spectacles en Avignon of, la CGT spectacle et le ministère de la culture ne disent rien. Ils subventionnent sur la base de budgets qui ne permettent pas de salarier les artistes, mais qui sont suffisants pour se créer des obligés.

Les contrôles ne seront possibles que lorsque le ministère de la culture ne sera pas lui-même le premier employeur clandestin de la Culture française, épaulé par la CGT spectacle.

Ce que nous écrivons, c'est que l'État de droit ne peut exister que dans une société dans lequel il existe une séparation des pouvoirs et une administration indépendante. Il est tout de même étonnant d'avoir à revendiquer le respect de tels principes au XXIème siècle.

Il faut payer la culture à son juste prix

Quand une collectivité publique met 1 million d'euros pour le fonctionnement d'un centre culturel et 200 000 euros pour acheter des spectacles qui sont pourtant la raison d'être de l'existence de ces équipements, et des salaires versés aux fonctionnaires qui les gèrent, il ne faut pas s'étonner que les artistes soient payés par les assedic.

Quand un spectacle subventionné comprenant 40 artistes permanents, plus la technique et les décors, est vendu 15 000 Euros, soit à perte, il ne faut pas s'étonner que les entreprises privées intervenant sur le même secteur ne paient qu'une partie du travail dont ils ont besoin et font financer la disponibilité de leur personnel par les assedic.

Il est nécessaire de contrôler la vente à perte, en premier lieu celles pratiquée par les entreprises publiques subventionnées (le plus souvent illégalement). Il n'est nul besoin de légiférer, il suffirait "simplement" de faire respecter les réglementations existantes qui interdisent la vente à perte des institutions publiques ou parapubliques intervenants dans des secteurs concurrentiels.

Monsieur Lionel JOSPIN, alors Premier ministre l'a longuement expliqué dans le cadre de deux circulaires qui n'ont hélas pas franchi les murs du ministère de la culture.

Il faut accepter de payer les spectacles à un prix en relation avec leur coût réel, quitte à permettre à certain public un accès favorisé aux spectacles par le biais de chèques culture. Encore faut-il que ces chèques soient utilisables pour tous types de spectacles (3) et que leur montant soit réellement payé aux entreprises de spectacle par la collectivité publique.

Les privilégiés défendent leurs privilèges (4)

Il n'existe nulle par ailleurs un distributeur automatique qui délivre de vrais billets de 100 Euros lorsque l'on met dix euros en pièces dans la fente, en donnant au passage une commission à la CGT spectacle pour l'entretien de l'appareil. Il est donc compréhensible que les bénéficiaires d'une mécanique inavouable voient d'un très mauvais œil toute tentative de la modifier et de la rendre plus transparente.

Ces mêmes privilégiés refusent également tout débat public, ou alors à conditions que les intervenants soient àleurs ordres et choisis au sein du sérail.

Pour un nombre conséquent d'artis
tes et de techniciens qui ne déclarent aux assedic, ni les droits d'auteur, ni les redevances d'exploitation secondaires (royalties proportionnelles aux ventes de disques), ni les rémunérations pour copie privée, ni la rémunération équitable, ni les rémunérations publiques, et qui ont les moyens de ne déclarer leurs revenus salariaux du spectacle que sur une petite période d'emploi, les revenus versés par les Assedic servent à payer une partie des impôts ou la maison de campagne.

Pour les responsable de la CGT spectacle, ce système génère des million d'euros de revenus, paie plusieurs centaines de permanents et de militants dévoués, assied leur emprise sur des milliers d'entreprises, un secteur entier de l'économie française, et leur permet un train de vie de rêve.

Il est d'ailleurs très dur pour les employeurs de refuser ce chantage permanent à la réduction des périodes déclarées que leur font leurs salariés, puisque cela ne leur coûte rien.

Pourtant, en refusant toute évolution du système, la CGT ouvre la voix à sa remise en cause globale qui serait sans doute immédiate si l'opinion publique savait ce qu'il recouvre dans la réalité. Les permanents de la CGT vivent des subventions du ministère et des sociétés civiles de perception, ils n'ont de toute façon pas besoin d'adhérents.

La France est le seul pays au monde où un artiste peut vivre grassement sans jamais être confronté avec le public. Certains professionnels de la subvention, directeur d'entreprises de spectacles labellisées "national", soutiennent fort activement le mouvement de grève et sont très présents dans les médias alors qu'ils n'ont jamais créé quoi que ce soit qui ait rencontré un public obligé de payer sa place. Ce mouvement est pour certains une chance de faire parler d'eux et de faire savoir qu'ils existent.

D'autres répondent aux sollicitations dont ils ont fait l'objet. On ne peut rien refuser aux organismes dont vivent la majorité des productions. La télévision Irakienne a montré des manifestations populaires de soutien à Saddham Hussein la veille de sa chute. Tout organisme totalitaire génère ce type de déclarations de soutien "spontanée".

Dans le spectacle, on n'est professionnel que quand on est chômeur

La perception du chômage dans le spectacle n'a rien à voir avec celle des autres secteurs. Pour les artistes, avoir droit chômage est une sécurité qui permet d'accéder au métier. De nombreux artistes n'accèdent jamais à ce niveau et sont cantonnés au travail au noir et aux aides sociales. De nombreux artistes n'ont pas droit au chômage, travaillent à temps plein, et bénéficient du RMI et de toute la palette des aides sociales.

Des artistes libres peuvent ils accepter d'être des professionnels de la mendicité ?

De la même manière que la mafia d'Europe Centrale vit grace à une armée de faux mendiants, le ministère de la culture et la CGT spectacle ont mis en place tout un ensemble de mécanismes qui ont transformé les artistes en quémandeurs perpétuels, chargés d'entretenir leurs parrains, justifiant la présence de très nombreuses institutions chargées de distribuer la manne aux mendiants que l'on juge conforme à l'idée que l'on a de la mendicité et qui montrent une humilité suffisante vis-à-vis du donneur-bienfaiteur.

Les artistes et techniciens doivent exiger d'être payés pour leur travail conformément à sa valeur et ne peuvent éternellement accepter un système qui fait d'eux des assistés engraissant des fonctionnaires et des syndicalistes.

Il est vrai que si le travail n'a aucune valeur et que l'artiste en est conscient, il est compréhensible qu'il défende un mécanisme qui lui permet de vivre sans rien faire d'utile à la société. Aucun parasite n'apprécie qu'on le détache de la branche qui le nourrit.

L'accord du 26 juin 2003 ne modifie pratiquement rien


L'analyse de cet accord est édifiante. En effet, si l'on ne connaît pas la réalité des intérêts en jeu et le pouvoir que détiennent le ministère de la culture et la CGT qui subventionnent les entreprises de spectacles dont la majorité des dirigeants sont des prêtes noms permettant à leur animateur de toucher le chômage, on ne peut imaginer que les modifications organisées par cet accord puissent susciter un tel mouvement de protestation. Cet accord du 26 juin ne modifie en effet pratiquement rien et les modifications apportées sont pour certaines d'entre elles bénéfiques aux demandeurs d'emploi. Nous les présentons en détail dans notre numéro de septembre. Au contraire cet accord concrétisait l'accord du MEDEF pour le maintien d'un système dont il connaît pourtant la perversité.

En effet, la principale critique faite par les manifestants, c'est le fait que la période d'indemnisation passerait de 12 mois à 8 mois. Cela est totalement faux et ne résulte que d'une présentation superficielle et partiale de la réforme.

On oublie totalement de prendre en compte que l'ancien système garantissait uniquement une indemnisation jusqu'à la date anniversaire de l'ouverture des droits (soit 12 mois de date à date) alors que le nouveau mécanisme rétablit le système en vigueur dans les années 1980 et dans lequel le demandeur d'emploi utilisait son capital d'indemnités journalières de 8 mois jusqu'à épuisement de ses droits, indépendamment du calendrier et de sa date anniversaire d'ouverture des droits.

Cette réforme a pour but de faire la chasse aux profiteurs. Les professionnels n'ont rien à craindre de cette modification de calcul.

Ainsi un demandeur d'emploi qui se voit ouvrir des droits et qui travaille 3 mois, durée nécessaire pour rétablir une nouvelle ouverture de droit, percevra des indemnités journalières durant 8 mois + 3 mois durant lesquels il travaille, ce qui fait un total de 11 mois. La différence n'est que d'1 mois. Si l'on prend en compte le fait que le salarié a en principe droit à 5 semaines de congés payés durant lesquels il est sensé ne pas travailler, on dépasse déjà les 12 mois du précédent système.

Si ce salarié travaille 5 mois dans les 12 mois, le nouveau système lui sera bénéfique par rapport à l'ancien, puisque au bout de 12 mois, il bénéficiera encore d'un mois de droit à indemnités journalières à un taux qui n'aura subi aucune dégressivité. Seuls ceux qui bénéficiaient de 12 mois d'indemnité sans jamais travailler durant ces douze mois, attendant sagement leur date anniversaire pour démarrer un nouveau contrat de trois mois et retoucher douze mois d'indemnité perdent à la nouvelle donne.

De plus le nouveau système supprime la dégressivité des allocations, ce qui équivaut à un mois et demi d'indemnités supplémentaires par rapport au précédent système sur une période de douze mois.

La correction opérée le 8 juillet 2003 permettra aux nouvelles dispositions de ne pratiquement rien changer

La principale critique que l'on pouvait faire à l'accord du 26 juin, c'était de changer les règles du jeux sans délai de prévenance. Le fait que le nouvel accord ne s'appliquera qu'à compter du 1er janvier 2004 supprime ce problème et permettra aux productions de tenir compte des nouvelles règles.

En effet, les budgets de très nombreuses productions et les subventions sollicitées tiennent compte des modalités d'indemnisation des annexes 8 et 10 du spectacle et de l'audiovisuel afin de permettre de disposer des artistes et techniciens de façon quasi permanente et de ne les payer directement qu'une partie de l'année, le reste étant pris en charge par les assedic.

L'Etat est parfaitement conscient de cette situation. Cela apparaît directement dans tous les dossiers de demandes de subvention. Les modifications de la réglementation connues, les budgets réalisées pour les productions de l'année 2004 et les demandes de subventions qui seront déposée fin 2003 tiendront compte des nouvelles données et auront pour résultat de ne pratiquement rien changer à la situation actuelle.

Cela fait d'ailleurs 20 ans que la CGT spectacle annonce régulièrement la suppression de 30 % des artistes et que leur nombre continue à augmenter.

Les chiffres annonçant des taux faramineux d'artistes et techniciens obligés de changer de métier sont totalement fantaisistes et ne tiennent pas compte du fait que les budgets de production ont toujours intégrés les modalités d'indemnisation et s'adapteront en conséquence.

Les artistes plasticiens en début de carrière, comme les écrivains sont souvent obligés d'avoir un autre métier avant de pouvoir vivre uniquement de leur art. De nombreux travailleurs indépendants ont aussi des métiers accessoires, notamment d'enseignement avant d'avoir une clientèle à même de leur fournir des moyens d'existence. Pourquoi les artistes et techniciens du spectacle bénéficieraient-ils d'un traitement privilégié ? De très nombreuses autres professions pourraient elles aussi revendiquer le bénéfice de telles dispositions.

Les collectivités locales et l'Etat seront obligés de revoir leurs contributions, comment peuvent elles justifier leur investissement dans la culture si aucun spectacle n'est présenté ! Mais, tout cela ne modifie en rien la logique d'assistanat dans laquelle le ministre de la culture enferme les artistes et que la CGT ne remet absolument pas en question.

La plupart des gens qui manifestent n'ont pas lu le nouvel accord ou en ont une lecture mécanique en le coupant de la réalité des productions de spectacles qui intègrent les assedic comme une subvention. Un certain nombre d'entre eux se font manipuler par la CGT-Spectacle sans comprendre les tenants et aboutissants du conflit en cours. Les autres n'ont connu que cette logique d'assistanat et n'imagine pas que l'on puisse travailler autrement.

En attaquant le Medef et les entreprises, ainsi que les syndicats de salariés majoritaires (5) qui ont signé l'accord, les artistes et techniciens honnêtes scient la branche sur laquelle ils s'appuient.

De plus, les entreprises financent un nombre important de festivals par le biais du mécénat alors que les dispositions fiscales Françaises sont fort peu engageantes. Le nouveau ministre vient de publier cet été la première loi sur le mécénat culturel qui incite réellement les particuliers et les entreprises à investir dans la culture. Il était temps. Le mouvement actuel risque de tarir cette source complémentaire de financement.

Les artistes et techniciens doivent exiger d'être payés pour leur travail et ne peuvent demander le maintien d'un système de clientélisme qui fait d'eux des quémandeurs permanents. C'est des pouvoirs publics qu'ils doivent exiger un plan de lutte contre la concurrence déloyale et la fin des salaires qui ne payent pas le travail effectué.

Roland LIENHARDT*
rédacteur en chef

* Ayant droit assedic annexe X pendant presque 10 ans.

D'autres contributions de Roland LIENHARDT sur la question des "intermittents" : www.lienhardt.com/ cdd.html

(1) de nombreux journalistes sont financés par les Assedic et sont furieux de se priver des invitations aux frais de la princesse dans les festivals.
(2) à l'exception des quelques système de financement automatiques gérés par le Centre National de la Cinématographie.
(3) à l'exclusion des spectacles pornographiques.
(4) Est-ce que le droit d'escroquer les assedic et les salariés du privé est un privilège moralement défendable ?
(5) Ce sont bien les syndicats majoritaires qui ont signé l'accord qui organise le financement par l'ensemble des travailleurs des cotisations des demandeurs d'emploi du spectacle et de l'audiovisuel. On ne voit pas pourquoi les syndicats des seuls secteurs du spectacles seraient seuls habilités pour organiser une ponction sur les salaires de l'ensemble des travailleurs des autres secteurs industriels. D'autant que l'on ne peut parler de solidarité que lorsqu'il y a échange, et qu'en l'occurrence, il n'y a aucun échange. Si les ouvriers du textile savaient ce que leurs cotisations financent, c'est eux qui refuseraient de les payer. Il nous semble d'ailleurs que les employeurs pourraient refuser de payer leur cotisations Assedic alors qu'ils savent qu'une partie de cet argent alimente des entreprises illégales et des intermittents qui ne sont pas en situation de recherche d'emploi puisqu'il bloquent les spectacles. C'est une des réactions que pourraient avec raison avoir les entreprises privées victimes de l'annulation des festivals.



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