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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Citation directe devant le Tribunal de grande instance de Paris statuant en matière correctionnelle


À LA REQUETE DE :
Le Syndicat National des Entreprises Artistiques (SYNEA), Association régie par la loi de 1901, représenté par Monsieur Jacques PROTHIN, délégué, spécialement mandaté à cet effet.

ayant pour avocat Maître Roland LIENHARDT, 15 rue de la banque 75002 PARIS, Tél. 01 42 96 16 00 - Fax. : 01 42 96 31 00 - (toque E 974)

Élisant domicile en son cabinet.


J'AI HUISSIER

DONNE ASSIGNATION A

Monsieur Didier DESCHAMPS,
Où étant et parlant à

D'avoir à comparaître le 12 décembre 2000 à 13 heures 30

par devant la 11ème Chambre Correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris - 4, boulevard du Palais, 75 055 PARIS Louvre RPSP

En présence du Ministère Public

POUR :

Monsieur Didier DESCHAMPS exerce depuis septembre 1998 la fonction de conseiller pour la danse au Ministère de la Culture et de la Communication (pièces n°1,2,3).

À ce titre, il est le premier en charge au sein de la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles des affaires relatives à la danse.

Il exerçait précédemment à la réorganisation de cette direction consécutive à la fusion en septembre 1998 de la Direction du théâtre et des spectacles et de la Direction de la musique et de la danse (pièce n°4), les fonctions de Délégué à la danse (pièce n°5) et cela depuis 1995 (pièce n°6). Il était préalablement Inspecteur Général de la création et des enseignements artistiques (pièce n°7). Il a intégré le Ministère de la Culture en qualité d’Inspecteur Principal en 1990 (pièce n°8).

Il relève du corps des inspecteurs de la création artistique, corps créé par un décret signé le 3 mars 1993 (pièce n°9), dernier jour de présence de Monsieur Jack LANG au Ministère de la Culture.

Missions de la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles vis-à-vis des Centres Chorégraphiques Nationaux

La Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles est chargée de mettre en œuvre une politique d'ensemble en faveur du spectacle vivant, et de renforcer la capacité d'impulsion et d'évaluation de l'administration centrale (pièce n°10).

Ainsi, trois missions ont été établies :
- la production artistique, qui comprend tout le secteur de la création, des activités artistiques et de la diffusion ;

- les enseignements artistiques ;

- la formation professionnelle et les conditions juridiques, économiques, sociales du développement des entreprises culturelles (pièce n°11).

La Direction de la musique et de la danse a mis en place et contrôle le réseau des centres chorégraphiques nationaux (pièces n°12, 13).

Ce réseau s'est constitué petit à petit depuis 1978. Aujourd'hui, les centres chorégraphiques nationaux sont au nombre de dix-neuf (pièces n°13 et 14).

Ils sont cofinancés par l'État et par les collectivités territoriales dans le cadre de conventions triennales liant tous les partenaires. Les subventions représentent en moyenne 60 % de leur budget. Leurs recettes propres se situent dans une fourchette allant de 30 % à 50 % (pièce n°13). La majorité de ces recettes "propres" provient également d'entreprises de spectacles sous contrôle du Ministère de la Culture et de la communication, c’est-à-dire des scènes nationales et autres centres culturels contrôlés par le Ministère de la Culture et sous tutelle de sa Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles.

Dans le cadre de ses fonctions de délégué à la danse, puis de conseiller pour la danse, il a financé cette association (à hauteur de 7, 70 millions de francs pour 1999) (pièce n°14).

Le budget de cette association est alimenté à titre principal par des fonds publics, puisque au financement de la DRAC et de la DMDTS, s’ajoutent des subventions de la ville de Nancy et du Conseil Régional (pièce n°14), sans compter la mise à disposition des locaux qui n’est pas comptabilisée.

Aucun appel d’offre de marché public ou de délégation de service public n’a jamais été réalisé, aucune des règles de mise en concurrence légale n’a jamais été respectée. Monsieur DESCHAMPS a néanmoins, en sa qualité de délégué à la danse, puis de conseiller à la danse organisé le financement par les deniers de l’État de cette entreprise en contravention avec la réglementation des marchés publics et/ou des délégations de services publics.

Or, depuis le 1er mars 2000, Monsieur DESCHAMPS exerce également les fonctions de Directeur Général du Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine (pièce n°15).

Dans le cadre de ses précédentes fonctions, c’est lui qui, exerçant la tutelle de l’État, était chargé du recrutement et de l’audition des candidats qu’il était ensuite demandé à l’association du Ballet de Loraine d’embaucher. Il a finalement préféré se nommer lui-même.

Au 15 juillet 2000, ainsi que le montrent les organigrammes délivrés par la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles du Ministère de la Culture, Monsieur DESCHAMPS exerce encore simultanément ces deux fonctions (pièces n°3 et n°14).

Présentation du Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine

Le Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine a été créé le 1er septembre 1978 sous la double tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication et de la Ville de Nancy (pièce n°16).

Il s'agit d'une association selon la loi 1901 qui, aux termes de ses statuts :

"a pour mission de présenter prioritairement en Région Lorraine, ainsi que sur l'ensemble du territoire national et à l'étranger, les œuvres marquantes du XXème siècle et de la création contemporaine, sans s'interdire d'autres œuvres majeures du répertoire classique et romantique, et de mettre en œuvre toute action ayant pour objectif de favoriser le développement de l'art chorégraphique" (pièce n°17).

Cette association, personne morale de droit privée, est subventionnée et contrôlée par la DMDTS et l’ancienne Direction de la musique et de la danse (pièces n°14 et 18).

Conformément à l’article 632 du Code du commerce qui énonce que toute activité de spectacles publics est par nature commerciale, cette entreprise qui exerce cette activité de spectacles de façon régulière et professionnelle, a une activité industrielle et commerciale.

Sur l’octroi d’avantage injustifié

L'article L. 432-14 du Code pénal énonce que :

"Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ou exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des sociétés d'économie mixte d'intérêt national chargées d'une mission de service public et des sociétés d'économie mixte locales ou par toute personne agissant pour le compte de l'une de celles susmentionnées de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public."

Ces faits sont également passibles des peines complémentaires suivantes :

"L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;

L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27, d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ;

La confiscation, suivant les modalités prévues par l'article 131-21, des sommes ou objets irrégulièrement reçus par l'auteur de l'infraction, à l'exception des objets susceptibles de restitution."(article 432-17 du code pénal).


En l'espèce, Monsieur Didier DESCHAMPS, en sa qualité de délégué à la danse, puis de conseiller à la danse, en charge de la tutelle des Centres Chorégraphiques Nationaux, a pour les années 1998 et 1999, octroyé à cette entreprise privée des subventions d’un montant supérieur aux limites au-delà desquelles il est obligatoire de mettre en concurrence les candidats, conformément au Code des marchés publics et/ou à la loi SAPIN sur les délégations de service public.

En sa qualité de haut fonctionnaire, en charge de l’élaboration de la politique de la danse du Ministère de la Culture, Monsieur Didier DESCHAMPS ne pouvait ignorer l’existence de la réglementation sur les marchés publics et les délégations de services publics. Il ne pouvait ignorer qu’en confiant à l’association “ Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine ” un marché ou une délégation de service public sans mettre en place les procédures d’appel d’offre et de mise en concurrence prévues par la loi, il commettait une infraction.

L'élément matériel de l'infraction est donc bien établi.

Monsieur DESCHAMPS ne pouvait ignorer l’existence de ces dispositions car c'est lui, qui, exerçant la tutelle de l'Etat dans le domaine de la danse, était chargé de la mise en place des conventions avec les Centres Chorégraphiques Nationaux.

Ainsi, Monsieur DESCHAMPS est directement responsable de la gestion d’un tel montage illégal et en tire de surcroît des avantages personnels, puisque l’infraction d’octroi d’avantage injustifié se double dans le cadre de la même entreprise privée (Le Ballet de Lorraine) de l’infraction de prise illégale d’intérêt (voir chapitre suivant).

L’élément intentionnel est donc rapporté.

Ces faits ont été commis en 1997, 1998 et 1999, les subventions versées à cette entreprise étant renouvelées chaque année, et donc, en des temps non prescrits.

L’infraction est donc bien constituée.

Si par extraordinaire, Monsieur Didier DESCHAMPS arrivait à démontrer qu’il n’est pas directement responsable de cette infraction, il en est forcément complice.

En effet, l'article 121-7 du Nouveau Code Pénal dispose que :

“ Est complice d'un crime ou délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation.
Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ”.


Dans le cadre de ses fonctions de délégué à la danse, puis de conseiller à la danse, Monsieur Didier DESCHAMPS exerçait pour le compte du Ministre de la Culture la tutelle des interventions du Ministère de la Culture dans le domaine chorégraphique. Il en a donc de par ses fonctions aidé et facilité la préparation et la consommation.

Sur la prise illégale intérêts

L'article 432-12 alinéa 1 du Nouveau Code Pénal dispose que :

“ Le fait pour une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a eu, au moment de l'acte en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement ”.

Ce principe est complété de dispositions spécifiques pour les fonctionnaires.

L'article L. 432-13 du Code Pénal énonce :

“ est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que fonctionnaire public ou agent ou préposé d'une administration publique, à raison même de sa fonction, soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée, soit d'exprimer son avis sur les opérations effectuées par une entreprise privée, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l'une de ces entreprises avant l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la cessation de cette fonction. ”

Cette infraction est également passible des peines complémentaires suivantes :

“ L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;

L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27, d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ;

La confiscation, suivant les modalités prévues par l'article 131-21, des sommes ou objets irrégulièrement reçus par l'auteur de l'infraction, à l'exception des objets susceptibles de restitution. " (article 432-17 du Code Pénal) .


Or, il s'avère que depuis le 1er mars 2000, Monsieur Didier DESCHAMPS, fonctionnaire au Ministère de la Culture et de la Communication, délégué à la danse jusqu’en septembre 1998, puis conseiller pour la danse du Directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles du Ministère de la Culture est également Directeur Général de l'association "Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine" dont il est chargé d'assurer la surveillance, le contrôle et la tutelle dans le cadre de ses anciennes attributions au Ministère de la Culture.

Ce dernier ne peut assumer légalement, à la fois, des fonctions de Conseiller pour la danse au sein du Ministère de la Culture et de la Communication et de Directeur Général du Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine. Monsieur DESCHAMPS, qui s’est depuis peu, mis en disponibilité de ses fonctions au Ministère de la Culture ne peut davantage, avant un délai de cinq années, exercer des fonctions dans le cadre d’une entreprise dont il avait charge de surveillance et de contrôle, et avec laquelle il passait des contrats, ou conseillait les signataires de ces conventions.

En sa qualité de conseiller pour la danse, Monsieur DESCHAMPS était amené à participer à des délibérations relatives à l'octroi de subventions attribuées à l'association “ Centre Chorégraphique National - Ballet de Lorraine ” qu'il est dans le même temps en charge de surveiller et d'administrer.

En tout état de cause, en sa qualité de conseiller pour la danse au sein du Ministère de la Culture et de la communication, il a pour mission de surveiller, d'administrer et d'ordonner les dépenses liées notamment au fonctionnement de l’entreprise culturelle dans laquelle il a et conserve un intérêt direct et personnel, en qualité de Directeur Général.

L’élément matériel de l’infraction est donc bien rapporté.

Il est important de noter que les contours de la prise illégale d'intérêts ont récemment été précisés par la Cour de Cassation.

Dans une première affaire (Cass. Crim, 29 septembre 1999, Dalloz 2000, Jurisprudence, p. 125), la Cour précise que pour que le délit de prise illégale intérêt soit constitué, l'intérêt peut être de nature matérielle ou morale, direct ou indirect. Il ne s'agit pas uniquement de sanctionner un intéressement financier direct, mais également un intérêt moral.

Dans une affaire plus récente, la Cour de Cassation a précisé qu’il convenait d’avoir une interprétation large de cette infraction (Cass. Crim, 14 juin 2000, n° G 99-84 .054 PF). Elle précise en effet :

“ Que par ailleurs le délit est consommé dès que le prévenu a pris, reçu ou conservé, directement ou indirectement, un intérêt dans une affaire dont il avait l’administration ou la surveillance, celles-ci se réduiraient-elles à de simples pouvoirs de préparation ou de proposition de décisions prises par d’autres :
Qu’enfin le délit reproché se consomme par le seul abus de la fonction, indépendamment de la recherche d’un gain ou d’un avantage personnel. ”


L'actuel conseiller pour la danse au Ministère de la Culture, qui a pris ses fonctions à Nancy en qualité de Directeur Général, qui assure désormais la programmation du Ballet de Lorraine, engage les dépenses, choisit le personnel et les danseurs, et peut ainsi également dans sa nouvelle situation chorégraphier lui-même des Ballets, a un intérêt direct on ne peut plus évident. (pièces 6 et 8).

Monsieur DESCHAMPS est tout à fait conscient de l’infraction qu’il commet, puisque dans une récente déclaration à la presse, il énonce qu’afin de respecter une certaine déontologie, il a cessé de suivre les affaires concernant le Ballet de Lorraine au Ministère de la Culture depuis six mois. Cet aveu, qui est d’ailleurs mensonger, démontre bien que, avant cette période de six mois, Monsieur DESCHAMPS suivait bien ce dossier. Monsieur DESCHAMPS oublie que le délai légal est de cinq années, et non de six mois.

L’élément intentionnel de l’infraction est donc bien établi.

Cette infraction est commise dans des délais non prescrits.
Il est en conséquence demandé au Tribunal de considérer que cette infraction est commise et de la sanctionner en conséquence.

Sur l’intérêt à agir du SYNEA

Le Syndicat National des Entreprises Artistiques (association régie par la loi du 1er juillet 1901) a pour objet de :

- Représenter et de défendre les intérêts économiques des entreprises indépendantes des secteurs du spectacle vivant, notamment du théâtre, de la danse, de la musique, du cirque et du mime, ceci incluant les structures de création, de production, de diffusion et d'enseignement artistique ;

- D'agir en vue du respect de l'égalité des chances des entreprises indépendantes devant les institutions et les pouvoirs publics (...) (pièce n°19).

Le SYNEA intervient régulièrement devant les tribunaux et sa capacité à agir est régulièrement reconnue.

Monsieur Jacques PROTHIN a été spécialement mandaté par le Conseil d'administration pour suivre cette action (pièce n°20).

Ces pratiques sont attentatoires à la démocratie et permettent aux fonctionnaires du Ministère de la Culture de s’accaparer des entreprises privées et des budgets publics pour leur compte personnel. Elles sont organisées de telles manières qu’il est très risqué pour un professionnel de critiquer ce genre de situation.

Quelques rares universitaires se sont d'ailleurs étonnés de l'existence de cette organisation. Ainsi, Madame France GUILLEMONAT, de l'Université de droit d'Aix-Marseille III, dans son rapport sur le statut juridique du théâtre (pièce n°21) énonce :

“ aucun secteur ne peut faire de la violation des lois une méthode de gestion, même si ses intentions sont pures ”

Ce qui n'est d'ailleurs pas établi en l'espèce. Dans le même dossier, cet universitaire continue en énonçant :

“ À l'heure actuelle, chacun voulant profiter au mieux des avantages des divers statuts, on arrive à d'étranges hybridations : les pouvoirs publics se dissimulent derrière des statuts privés ou non lucratifs qui leur sont normalement interdits. ”

“ La France, pour sa part, est sans doute le pire exemple de confusion que l'on puisse proposer puisque l'Etat lui-même donne l'exemple en intégrant très officiellement dans l'organigramme d'un ministère une association à but non lucratif dont le statut est officiellement privé. Les lois françaises sont sévères à l'égard de ce genre de pratiques qui relève du détournement de fonds publics. Il n'en demeure pas moins que les errements persistent depuis de longues années sans pour autant attirer l'attention des tribunaux. ”

Le Tribunal pourra facilement se rendre compte de la réalité de ces propos en prenant le temps de regarder la composition du Conseil d’administration de cette association (pièces n°22 et 16). Il s’apercevra alors que dans ce Conseil, figurent également :

Monsieur André LARQUIE, Président de l'association, lequel est également Président de la Cité de la musique (établissement public sous la tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication); membre du Conseil d'administration du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (arrêté du 7 mars 2000) ; et enfin membre du Conseil d'administration du Centre National de la Danse (arrêté du 28 août 1998).

De plus, parmi les membres du Conseil d'administration, on retrouve Monsieur Dominique WALLON, troisième vice-président de l'association, également Président de l'IFCIC (Institut pour le Financement du Cinéma et des Industries Culturelles) depuis le 25 avril 2000. Il était précédemment Directeur du théâtre, de la musique, du spectacle et de la danse au Ministère de la Culture, (DMDTS au Ministère de la Culture où il avait été nommé en 1997 et dont il a démissionné en janvier 2000).

Madame Sylvie HUBAC, actuelle Directrice de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles au Ministère de la Culture et de la Communication, était également membre du Conseil d'administration de l'association, et y exerçait la fonction de troisième vice-présidente.

Sur les demandes de la Partie Civile

Le Tribunal acceptera en conséquence la constitution de Partie Civile du Syndicat National des Entreprises Artistiques ainsi que sa demande de condamner Monsieur Didier DESCHAMPS à verser au SYNEA la somme de 1 F symbolique de dommages et intérêts.

Le Syndicat National des Entreprises Artistiques demande également à Monsieur Le Doyen des Juges d'instruction la publication de la décision à intervenir dans trois journaux au moins au choix du SYNEA à hauteur de 30 000 F par insertion.

Force est de constater que la nomination d'un fonctionnaire à la tête d'une entreprise commerciale du secteur culturel, financée sur fonds publics, cause un préjudice grave à l'ensemble de la profession.

En vertu du principe d'égalité des citoyens et des entreprises devant la loi, principe inscrit dans la Constitution et dans la Déclaration des Droits de l'Homme, les entreprises ayant la même activité et l'exerçant dans les mêmes conditions doivent en effet être soumises aux mêmes règles de concurrence.

Le Syndicat National des Entreprises Artistiques, intéressé à ce que les professionnels de la création artistique soient tous confrontés aux mêmes obligations, se demande comment de telles irrégularités contraires au principe général d'indépendance et d'impartialité de l'administration peuvent être commises par des fonctionnaires.£

Il serait donc totalement inéquitable de laisser à la charge du SYNEA les frais occasionnés par la présente instance. Par conséquent, le SYNEA demande en application de l'article 475-1 de la loi du 10 juillet 1991, le versement de la somme de 30 000 F.

PAR CES MOTIFS

Vu les réquisitions du Ministère Public sur la citation directe,

Vu l'article 432-14 du Nouveau Code Pénal,

Vu l'article 432-17 du Nouveau Code Pénal,

Vu l'article 121-7 du Nouveau Code Pénal,

Vu l'article 432-12 alinéa 1 du Nouveau Code Pénal,

Vu l'article 432-13 du Nouveau Code Pénal,

Déclarer le Syndicat National des Entreprises Artistiques recevable et bien fondé en son action et ses demandes,

Déclarer Monsieur Didier DESCHAMPS complice du délit d'octroi d'avantage injustifié, tel que prévu et réprimé par l'article 432-14 du Nouveau Code Pénal, le condamner aux peines prévues par la loi pénale.

Déclarer Monsieur Didier DESCHAMPS coupable du délit de prise illégale d'intérêts, tel que prévu et réprimé par l'article 432-12 alinéa 1 du Nouveau Code Pénal, le condamner aux peines prévues par la loi pénale.

Condamner Monsieur Didier DESCHAMPS à payer au Syndicat National des Entreprises Artistiques la somme de 1 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la profession.

Ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois journaux au choix du SYNEA à hauteur de 30 000 F par insertion et aux frais de Monsieur Didier DESCHAMPS.

Condamner Monsieur Didier DESCHAMPS à payer au Syndicat National des Entreprises Artistiques la somme de 30 000 francs en application de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

Le condamner aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d'huissiers et de la présente citation.

SOUS TOUTES RESERVES

 
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