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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
PLAINTE
AUPRES DE LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
POUR NON-RESPECT DU DROIT COMMUNAUTAIRE

1.Nom du plaignant :
SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS ET DES BENEVOLES DE L'ARCHEOLOGIE

2. Représentée par :
Maître Roland LIENHARDT, Avocat au Barreau de Paris, 15 rue de la Banque 75002 PARIS - FRANCE
Tél : 01.42.96.16.00 - Fax : 01.42.96.31.00
Mel : avocats@lienhardt.com

3. De nationalité française

4. Siège social :
77, rue de Soubise 59140 DUNKERQUE-FRANCE
Tél : 03.28.24.20.37 - Fax : 03.28.25.18.64
Mél : SNPBA@wanadoo.fr

5. Domaine d'activité :
Secteur du patrimoine et de l'archéologie.
Le Syndicat National des Professionnels et des Bénévoles de l'Archéologie défend des bénévoles, des professionnels et des structures porteuses de droit privé intervenant dans le domaine de l’archéologie. Il défend les intérêts économiques de ces professionnels auprès des pouvoirs publics et des instances nationales et européennes (Annexe B-14).

6. État membre n'ayant pas, de l'avis du plaignant, respecté le droit communautaire :
La France

7. FAITS INCRIMINES

I - Le cadre juridique de l'archéologie préventive
Chaque fois qu’une opération d’aménagement ou d’urbanisme est réalisée, il est nécessaire de veiller à ce que les vestiges archéologiques, enfuis ou non, soient traités et étudiés. Ces travaux ont pour objet soit d’examiner les conditions de modifications de l’aménagement envisagé, (tracé, implantation, techniques de construction), soit de prendre connaissance et de laisser le témoignage le plus exhaustif possible des vestiges mobiliers ou immobiliers avant leur destruction et de déplacer aux fins de conservation et d’études, tout ou partie des vestiges. C'est ce que l'on désigne sous le terme d'archéologie préventive.

Le cadre juridique français relatif aux fouilles archéologiques a longtemps été fixé par la loi du 27 septembre 1941 (Annexe B-15), qui fut validée à la Libération par une ordonnance du 13 septembre 1945. Ce texte à été modifié à plusieurs reprises, notamment par la loi n° 89-874 du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes (Annexe B-17). Il a été complété également par différents textes réglementaires et notamment par le décret du 19 avril 1947 (Annexe B-18).

La France est par ailleurs partie à la Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique, dite Convention de Malte, du 16 janvier 1992, dont le Parlement français a autorisé l'approbation par une loi n° 94-926 du 26 octobre 1994 (Annexe B-16). Cette convention est donc entrée en vigueur, pour ce qui concerne la France, le 10 janvier 1996. Il peut être utile de rappeler le contenu de certains articles de cet accord européen.

Aux termes de l'article 2 de la Convention de Malte :
"Chaque partie s'engage à mettre en œuvre, selon les modalités propres à chaque État, un régime juridique de protection du patrimoine archéologique prévoyant :
i. la gestion d'un inventaire de son patrimoine archéologique et le classement de monuments ou de zones protégés ;
ii. la constitution de zones de réserves archéologiques, même sans vestiges apparents en surface ou sous les eaux, pour la conservation de témoignages matériels à étudier par les générations futures ;
iii. l'obligation pour l'inventeur de signaler aux autorités compétentes la découverte fortuite d'éléments du patrimoine archéologique et de les mettre à disposition pour examen
".

L'article 3 ajoute :
"En vue de préserver le patrimoine archéologique et afin de garantir la signification scientifique des opérations de recherche archéologique, chaque partie s'engage :
i. à mettre en œuvre des procédures d'autorisations et de contrôle des fouilles, et autres activités archéologiques, afin :
a. de prévenir toute fouille ou déplacement illicites d'éléments du patrimoine archéologique ;
b. d'assurer que les fouilles et prospections archéologiques sont entreprises de manière scientifique et sous réserve que :
- des méthodes d'investigation non destructrices soient employées aussi souvent que possible ;
- les éléments du patrimoine archéologique ne soient pas exhumés lors des fouilles ni laissés exposés pendant ou après celles-ci sans que des dispositions convenables n'aient été prises pour leurs préservation, conservation et gestion ;
ii. à veiller à ce que les fouilles et autres techniques potentiellement destructrices ne soient pratiquées que par des personnes qualifiées et spécialement habilitées ;
iii. à soumettre à autorisation préalable spécifique, dans les cas prévus par la législation interne de l'Etat, l'emploi de détecteurs de métaux et d'autres équipements de détection ou procédés pour la recherche archéologique."
Enfin, l'article 4 précise que :
"Chaque partie s'engage à mettre en œuvre des mesures de protection physique du patrimoine archéologique prévoyant suivant les circonstances :
i. l'acquisition ou la protection par d'autres moyens appropriés, par les pouvoirs publics, d'espaces destinés à constituer des zones de réserve archéologiques ;
ii. la conservation et l'entretien du patrimoine archéologique, de préférence sur son lieu d'origine ;
iii. l'aménagement de dépôts appropriés pour les vestiges archéologiques déplacés de leur lieu d'origine
".

Les parties s'engagent donc à favoriser l'émergence d'un régime de protection du patrimoine archéologique et à mettre en place une réglementation à même de garantir la préservation et le bon traitement des vestiges archéologiques.

Aucune des dispositions de cette convention n’impose une étatisation des opérations de fouilles ou d’études, et des opérations de diffusion des informations liées à ces fouilles.

Or, le ministère de la culture français a développé le secteur de l'archéologie préventive en créant une association para-administrative intitulée "Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales" (AFAN) (Annexes B-11, page 12 ; B-21, pages 63 et 272, B.53, page 9).

Cette association comprenait 1 300 salariés et jouissait d'une exclusivité de fait sur l'archéologie préventive française. Le budget global de fonctionnement de l'AFAN pour l'année 1997 avoisinait les 420 MF. À ses débuts, l'association ne comprenait que dix salariés et disposait d'un budget de 600 000 F. En 1991, le nombre de salariés s'élevait à 750 et son compte d'exploitation s'équilibrait aux alentours de 160 MF (Annexe B-21, pp. 63-64 ).
La situation de cette association faisait régulièrement l’objet de critiques émanant des parlementaires (Annexes B-28, B-31, B-32, B-33, B-34, B-35, B-36)

Le Conseil de la Concurrence français a d'ailleurs considéré que cette association était en situation d'abus de position dominante (Annexe B-11, p.30). Le ministère de la culture ne pouvant continuer à financer sans risque cette structure illégale, dans la mesure où de plus en plus d’aménageurs refusaient en effet de payer les taxes réclamées par l’AFAN et s’interrogeaient sur la légitimité des devis facturés par cette association (Annexes B-1 et B-26), a choisi de la légaliser en soumettant une loi au Parlement. La situation d’urgence devant laquelle a alors été placé le ministère de la culture et la nécessité de sauver le personnel de l’AFAN sont de fait les seules " justifications " idéologiques de cette loi (Voir Annexe B 52, Aspects comparatifs de la réforme hollandaise et française).

L’élaboration de cette loi a été précédée de la réalisation d’un rapport. Celui-ci a cependant été écrit dans des conditions de partialité totale puisque l’un des deux rédacteurs du rapport est justement un responsable de cette association "AFAN", Monsieur Jean-Paul DEMOULE.

Cette loi a été votée par le Parlement français en décembre 2000.
Les entreprises d’archéologie indépendantes du ministère de la culture ont saisi les parlementaires de leurs inquiétudes face à cette opération de nationalisation de l’archéologie préventive française (Annexes B-27, B-27.1, B-27.2, B-27.3, B-27.4, B-27.5, B-27.6, B-27.7, B-27.8, B-27.9, B-27.10, B-27.11, B-27.12, B-27.13, B-27.14, B-27.15) et ont créé à cette occasion le Syndicat National des Professionnels et des Bénévoles de l'Archéologie (SNPBA) qui regroupe à la fois des bureaux d’études indépendants sous forme commerciale ou associative, et des travailleurs indépendants.

Un certain nombre de députés ont alors saisi le Conseil Constitutionnel (Annexe B-12), considérant que cette loi contrevenait à la fois à des dispositions françaises constitutionnelles et à de nombreuses dispositions communautaires.

Le 16 janvier 2001, le Conseil Constitutionnel a rejeté le recours des députés, permettant ainsi à la loi d’être promulguée le 17 janvier 2001. La décision du Conseil Constitutionnel est fort peu motivée et ne répond que très partiellement aux questions soulevées par le recours (Annexe B-13).

Les procédures françaises étant épuisées, le SNPBA a décidé de saisir la Commission Européenne de la question par la présente plainte.

II - La loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive contrevient à de nombreuses dispositions communautaires

1) Le SNPBA a déjà déposé le 31 juillet 2001 une première plainte (n° COMP/38.211) contre cette loi, fondée sur la non conformité à un certain nombre de dispositions communautaires en matière de droit de la concurrence.

2) La loi contrevient également aux dispositions de l'article 6 du Traité sur l'Union Européenne

L'article 6 du Traité UE énonce que :
"1. L'Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'Etat de droit, principes qui sont communs aux Etats membres.
2. L'Union respecte les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres, en tant que principes généraux du droit communautaires.
"

Le Traité sur l'Union Européenne garantit les droits fondamentaux résultant de la Convention Européenne des Droits de l'Homme. Il en découle que ne sauraient être admises dans la communauté des mesures incompatibles avec le respect des droits de l'homme ainsi reconnus et garantis (CJCE, 18 décembre 1997, affaire C-309/96) (Annexe B-2).

Or, les dispositions de la loi du 17 janvier 2001 relative à l’archéologie préventive ont pour effet de permettre l’organisation en France et son extension à l’Union Européenne d’un système permettant aux fonctionnaires du ministère de la culture français d’acheter les entreprises, associations et institutions culturelles similaires des autres États membres dans le domaine de l’archéologie de la même manière qu’il a organisé sa maîtrise du marché culturel français, marché sur lequel il exerce un contrôle artistique et scientifique de nature totalement étrangère à l’esprit démocratique de l’ensemble des institutions européennes. Le ministère de la culture essaie par cette loi d’étendre à l’Europe le système de corruption qui lui permet de contrôler la culture Française et d’y faire taire la majorité des critiques.
La loi du 17 janvier 2001 organise en effet un pouvoir discrétionnaire du ministère de la culture et de son établissement public sur l’accès des professionnels de l’archéologie européen aux sites archéologiques situés sur son territoire.

Ce pouvoir passe par un contrôle du ministère de la culture français et de son établissement public sur les structures européennes du secteur de l’archéologie préventive, les associations françaises et leurs équivalentes des autres États membres et sur l’accès à la connaissance et au savoir de ces structures associatives.

Cette loi fait partie de la stratégie française d’extension à l’Union Européenne de son “ exception culturelle ”, concept permettant avant tout un détournement généralisé de toutes les règles démocratiques afin de faire de la culture l’un des principaux vecteurs de détournement des fonds publics et de clientélisme au service d’intérêts partisans.

Ce faisant la France organise une atteinte délibérée à la liberté d'association et à la liberté d'expression dans la Communauté.

a) Le SNPBA considère que la loi du 17 janvier 2001 porte atteinte à la liberté d’association


L'article 4 de la loi énonce que :
"Les diagnostics et opérations de fouille d'archéologie préventive sont confiés à un établissement public national à caractère administratif".
"L'établissement public assure (...) l'exploitation scientifique de ses activités et la diffusion de leurs résultats (...)
".

L'article 7 énonce ensuite :
"Le mobilier archéologique issu des opérations d'archéologie préventive est confié, sous le contrôle des services de l'Etat, à l'établissement public le temps nécessaire à son étude scientifique (...)." (Annexe B-3)

Or, un certain nombre de personnes, résidant dans la Communauté Européenne, ont choisi de se regrouper afin de mettre en commun leurs connaissances ou leurs activités et ont crée des associations dans le but de mener des actions dans le domaine de l'archéologie préventive. Ces associations sont soit indépendantes, soit liées à des collectivités locales ou à des institutions universitaires publiques ou privées.

En outre, la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales du 4 novembre 1950 (article 11) énonce :

"Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat
." (Annexe B-4)

Par ailleurs, la liberté d'association a été, à plusieurs reprises, consacrée comme fondamentale par la Cour de Justice des Communautés Européennes dans ses arrêts Confédération syndicale et Massa et par la Cour Européenne des Droits de l'Homme (Annexe B-5).

Ainsi, en établissant un monopole au profit d’un l'établissement public administratif (EPA) dans le domaine de l’archéologie préventive, et en privant corrélativement de nombreuses associations françaises et européennes d'exercer leurs activités sur son territoire, la loi du 17 janvier 2001 porte atteinte à la libre initiative des associations réalisant des fouilles de terrain.

Certes, l'article 4 de la loi prévoit que l'établissement public peut faire appel, par voie de convention, à d'autres personnes morales, françaises ou étrangères, dotées de services de recherche archéologique (Annexe B-3).
Toutefois, comme l'a souligné l'opposition parlementaire et la majorité sénatoriale, il ne s'agit que d'une faculté et non d'une garantie réelle d'ouverture puisque cette possibilité de recourir à des partenaires extérieurs est à la totale discrétion de l'établissement public (Annexe B-20).
Les députés ont même souligné qu'un tel monopole n'existe dans aucun pays européen.

En effet,
"si l'exécution des fouilles s'effectue de façon générale sous le contrôle des autorités en charge de l'archéologie, conformément à la convention de Malte de 1992, il n'existe nulle part un opérateur de fouille unique (...). Le statut des opérateurs est très diversifié : structures parapubliques, coopératives privées d'archéologues (Italie), archéologues libéraux (Espagne), entreprises privées (Espagne, Allemagne), associations ou fondations (Allemagne, Angleterre)" (Annexe B-12).

Le Conseil Constitutionnel s'en est tenu, sur ce point, à une réponse singulièrement brève :

"il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre (...) des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi" ; "l'archéologie préventive, qui relève de missions de service public, est partie intégrante de l'archéologie (...) qu'eu égard à l'intérêt général de l'objectif qu'il s'est assigné et des modalités qu'il a choisies pour le poursuivre, le législateur a légitimement pu doter l'établissement public national créé(...) de droits exclusifs s'agissant de l'exécution des opérations de diagnostic et de fouilles archéologiques préventive" (Annexe B-13).

Le Conseil Constitutionnel rappelait aussi que l'établissement peut faire appel par voie de convention à d'autres personnes morales dotées de services de recherche archéologique.

Il ne semble pourtant pas que cette atteinte à la possibilité des associations européennes d’intervenir et d’étudier librement les ressources archéologiques du territoire français soit justifiée par un quelconque motif d’ordre public. En effet, les associations ressortissant des autres Etats Européens ont les compétences et la technicité pour intervenir, sous le contrôle normal de l’administration française sur les sites du territoire français.

Cette restriction à la liberté d’association est d’autant critiquable que l’établissement public français qui du fait de son monopole et de son financement public risque d’avoir assez peu de soucis de gestion, va pouvoir intervenir sur les marchés des autres États membres et y faire concurrence aux associations de ces États.

b) Le SNPBA considère que la loi du 17 janvier 2001 porte atteinte à l'Etat de droit


Il est clair que le caractère totalement discrétionnaire de la possibilité de recours à des services extérieurs, est attentatoire à l’existence même d’un état de droit, principe clairement reconnu par l’article 6 du Traité UE qu’est chargé de défendre la Commission, gardienne des traités.

- La loi jette les bases du développement d'un système européen de corruption
Le caractère totalement aléatoire de la possibilité de recours à des services extérieurs engendre le fait du prince. Cela signifie que ne pourront intervenir en France que les entreprises donnant par ailleurs des garanties ou des contreparties plus ou moins avouables aux pouvoirs publics français ou à d’autres intervenants. On peut facilement imaginer quels types de garanties ou de contreparties une telle situation juridique peut générer.

En effet, aucune entreprise sérieuse (qu’il s’agisse d’une entreprise publique, para publique, d’une association ou d’une entreprise de forme commerciale) ne peut développer une activité économique en France dans le domaine de l’archéologie préventive, sans disposer de garanties sur la possibilité effective d’exercer son activité et de travailler en France.

L’ "ouverture" laissée par la loi à la concurrence est donc soit totalement fictive, soit totalement perverse.

Elle ne peut au mieux que permettre le développement d’un système de corruption, attentatoire à l’Etat de droit. La Commission pourra utilement prendre connaissance d’un certain nombre d’affaires de corruption concernant le Ministère de la culture français, affaires démontrant le niveau de déségrégation de l’état de droit que cache la phraséologie relative à l’exception culturelle française (Annexes B-23, B-22, B-5, B-55).
Cette "ouverture" n’est qu’un outil de détournement des règles de la comptabilité publique.

En effet, il convient d’avoir à l’esprit le fait que l’établissement public créé par la République Française l’a été sous la forme d’un établissement public administratif alors qu’il est indéniable que ses activités relèvent majoritairement d’une activité industrielle et commerciale et que la totalité des autres Etats Européens ont distingué la partie administrative de l’archéologie préventive, laquelle relève bien d’une activité régalienne, de la partie relative à la réalisation, au traitement et à l’étude, laquelle relève quant à elle d’une activité économique et commerciale (Annexe B-29). Cette distinction étant de plus salutaire comme garantie de la qualité des réalisations, des études et de la diffusion de l’information, il est en effet indispensable qu’existe un vrai contrôle étatique sur le traitement des fouilles, conformément aux obligations contractée par la France dans le cadre de la Convention de Malte.

Or, il n’est pas juridiquement possible de gérer les activités de fouilles dans le cadre d’un établissement public administratif. En effet, cette activité est fortement diversifiée, nécessite des moyens humains et techniques forts divers, et une réelle souplesse d’intervention. Il convient en effet de ne pas oublier que l’interruption des travaux d’aménagement ou d’urbanisation à un coût économique indéniable.

En effet, un personnel soumis au droit administratif français et les contraintes d’une gestion publique n’autorisent pas une telle souplesse. La possibilité de recours à des associations et entreprises commerciales extérieures risque donc de n’être que la faculté pour l’établissement public et ses fonctionnaires de créer eux-mêmes des associations afin de s’octroyer à eux-mêmes des missions leur permettant de cumuler avantages du statut public et ressources de droit privé. D’ailleurs, seules des associations fictives créées par le personnel de l’établissement public ou du ministère de la culture pourront prendre le risque d’investir et de continuer à intervenir dans ce domaine en étant certaines d’obtenir des marchés.

Ce recours à des associations para administratives illégales est une des clefs de l’organisation technique par le Ministère de la culture de l’exception culturelle française. La plupart des associations avec lesquelles il travaille sont composées d’agents directs ou indirects du ministère. Cette technique lui a ainsi permis de créer des réseaux d’amitiés dont le but est de lier la totalité des acteurs des secteurs culturels et d’annihiler toute critique pouvant remettre en question ces systèmes qui autorisent outre un fort pouvoir de communication à usage politique de nombreux abus et détournements d’argent public.

Le Ministère de la culture français a très largement développé cette pratique dans la plupart des secteurs culturels français. Il contrôle ainsi directement des milliers d’entreprises privées. Le système de corruption est général et aucun intervenant ne peut continuer à travailler s’il critique le système.
Il se prépare à faire de même dans le secteur de l’archéologie, en se donnant les moyens, après avoir muselé juridiquement la totalité des entreprises françaises indépendantes, de s’attaquer cette fois aux entreprises des autres Etats membres.

La Commission pourra facilement se rendre compte de la réalité du réseau de corruption en regardant la composition du conseil d'administration de l'AFAN (Annexe B-10), association soit-disant indépendante. Il s'apercevra que dans ce conseil, figurent :

- Monsieur François BARRE, directeur de l'Architecture et du Patrimoine du ministère de la culture, qui est donc en situation de pantouflage illégal. Il pourrait être sanctionné en droit français de cinq années de prison au titre de l’article L. 432-12 du Code pénal français. (prise illégale d’intérêt, voir Annexe B-54).

- Monsieur Jean-Paul DEMOULE, Professeur à l'Université Paris I également rapporteur du dernier rapport officiel relatif à l'archéologie préventive, remis à Madame Catherine TRAUTMANN, ministre de la culture et de la communication en novembre 1998 et dont les conclusions ont abouti à la loi du 17 janvier 2001. Il pourrait encourir des sanctions pénales en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt.

- Monsieur Michel GRAS, directeur de recherche au CNRS (Annexe 30), Vice président de l’AFAN. Il pourrait être sanctionné pénalement en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt.

- Monsieur Jean-Pierre MOHEN, Directeur du laboratoire de recherche des Musées de France. Il pourrait être sanctionné pénalement en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt.

- Monsieur Jacques MULLENDER, inspecteur général honoraire de l'administration des affaires culturelles.

- Monsieur Patrick OLIVIER, inspecteur général de l'administration des affaires culturelles. Il exerce les fonctions de trésoriers de l’AFAN. Il pourrait être sanctionné pénalement en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt

Il est intéressant de noter que ces associations illégales intègrent très souvent un ou plusieurs membres de l’inspection générale de l’administration des affaires culturelles, cela permet d’être sûr que ce service ne va pas critiquer la légalité de la structure.

- Madame Frédérique BOURA, Conservateur Régional de l'Archéologie par Intérim. Elle pourrait être sanctionné pénalement en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt

- Monsieur Jean-Pierre DALBERA, Chef de mission de la recherche et de la technologie au Ministère de la culture. Il pourrait être sanctionné pénalement en droit français au titre de la prise illégale d’intérêt.

Dans d’autres secteurs culturels, le Ministre de la culture a mis en place des mécanismes similaires La Commission pourra ainsi constater qu’il en est de même dans le secteur du spectacle (Annexe B-38).

Ainsi, dans un document intitulé " Charte des missions de service public " présentée par Madame la ministre de la culture le 26 février 1998, la ministre reconnaît que son administration contrôle la majorité du secteur économique du spectacle. Elle énonce en effet que :

"Cette délégation de responsabilités dans l'intérêt général a pris une ampleur particulière dans le domaine du spectacle vivant, jusqu'à structurer, pour une bonne part, le fonctionnement et l'économie du secteur.

Elle s'applique à des ensembles de structures dont certains prennent la forme de réseaux dans une logique d'aménagement du territoire au service de toute la population.

Pour mémoire :
- les centres dramatiques (avec les contrats de décentralisation dramatique),
- les scènes nationales (avec les projets d'orientation et les contrats d'objectifs),
- les compagnies dramatiques ou chorégraphiques, les associations lyriques et les centres de création musicale conventionnés,
- les orchestres symphoniques (contrat d'objectif),
- les ensembles vocaux et musicaux missionées (conventions),
- les centres chorégraphiques nationaux (conventions),
- les organismes ressource pour la diffusion (Office national de diffusion artistique) ou l'information du public (Centre national du théâtre, Centre d'information et de ressources pour les musiques actuelles, Centre d'information et d'orientation du danseur...),
- les associations départementales et régionales de développement musical et chorégraphique
."

On peut citer également l'intervention d'un Maître de conférences en droit à l'Université d'Aix-Marseille III, Madame France GUILLEMONAT, en 1995 lors d'un colloque sur les "approches comparatives en économie de la culture".
En effet, Madame GUILLEMONAT s'étonnait que :

"les pouvoirs publics se dissimulent derrière des statuts privés ou non lucratifs qui leur sont normalement interdits..."

et que :

"la France, pour sa part, est sans doute le pire exemple de confusion que l'on puisse proposer puisque l'Etat lui-même donne l'exemple en intégrant très officiellement dans l'organigramme d'un ministère une association à but non-lucratif dont le statut est officiellement privé. Les lois françaises sont sévères à l'égard de ce genre de pratique qui relèvent du détournement de fonds publics. Il n'en demeure pas moins que les errements persistent depuis de longues années sans pour autant attirer l'attention des tribunaux" (Annexe B-37)

De fait, après avoir développé d’innombrables mécanismes d’intervention qui faussent totalement l’économie du secteur, il n’existe plus en France de marché du spectacle vivant et il n’est plus possible de faire un spectacle en France sans obtenir de subventions des multiples organismes mis en place par le ministère. (Annexe B-50). Le ministère de la culture français a d’ailleurs récemment fait voter une loi interdisant aux entrepreneurs de spectacles des autres Etats membres d’intervenir directement sur le territoire français… Le désert culturel créé par le ministère de la culture justifie a posteriori son interventionnisme.

Il en est de même dans le secteur de l’audiovisuel. Les fonctionnaires du ministère de la culture contrôlent directement et de façon illégale les chaînes de télévisions publique.

Ainsi, le PDG actuel de France Télévision, Monsieur Marc TESSIER (Annexe B-46), est l’ancien directeur du Centre National de la Cinématographie (CNC) (Annexe B-46). Il pourrait d’ailleurs être poursuivi au titre de la prise illégale d’intérêt.

L’actuel Président de l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) Monsieur Emmanuel HOOG (Annexe B-47), également conseiller technique (culture, audiovisuel, entreprises de presse) au cabinet du ministre de l'Economie, des Finances et de l'industrie depuis avril 2000 (Annexe B-48), ancien conseiller pour la culture et l'audiovisuel pour la culture et l'audiovisuel au cabinet de Monsieur Laurent FABIUS de juillet 1997 à mars 2000 (Annexe B-48), pourrait également être en situation de pantouflage illégal.

Enfin, Monsieur Francis BECK, membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) depuis janvier 2001, ancien directeur général du Centre National de la Cinématographie, puis président de l'INA (Annexe B-49) est dans la même situation.

Nous ne citons que quelques exemples caricaturaux, il en est bien d’autres.
Il en est de même dans le secteur des sociétés de perception et de répartition des droits d’auteur et droits voisins des droits d’auteur, qui sont contrôlées et financent les entreprises des agents du ministère de la culture. La Commission de contrôle de ces sociétés récemment mise en place est composée d’agent publics qui perçoivent par ailleurs des financements des sociétés d’auteur et de producteurs qu’ils sont chargées de contrôler (Annexe B-23, page 31 et 32 et B-45, B-55) et interdisent toute ouverture à la concurrence sur ce marché qui leur est totalement dévoué.

L’inspection générale du ministère de la culture, théoriquement chargée de veiller au respect des la légalité au sein de l’administration est elle-même totalement gangrénée. Son chef de Service Monsieur And ré LARQUIE (Annexe B-44) est en situation de pantouflage illégal multiple.

En effet, Monsieur André LARQUIE est également Président de plusieurs entreprises de spectacles privées, notamment de l’association " Centre Chorégraphique - Ballet de Lorraine " (Annexe B-42), Président de la Cité de la Musique (établissement public sous la tutelle du Ministère de la culture et de la communication) (Annexe B-39), et également membre du conseil d'administration du Centre National de la Danse (Annexe B-40), établissement public industriel et commercial.

Le système est récurrent. En effet, on trouve des exemples à pratiquement tous les niveaux au sein du Ministère de la culture (Annexe B-21, pages. 43-70 ).
La quasi-totalité des secteurs culturels sont ainsi sortis de l’état de droit et les fonctionnaires du ministère de la culture français sont actuellement dans la situation de voir s’effondrer leurs privilèges du fait de l’Europe, ou d’étendre suffisamment rapidement à l’Europe leurs procédures afin de faire taire les critiques.

Cette mécanique française très particulière n’est ni isolée, ni exceptionnelle. C’est la consistance principale de l’exception culturelle française, laquelle est avant toute chose une machine à détourner l’argent public.

Le rapport de la Cour des Comptes française de janvier 2000 contient un chapitre consacré aux rapports entre le Ministère de la culture et les associations. Il montre clairement que de nombreuses entreprises associatives sont en fait des associations para-administratives qui permettent le dévoiement de toutes les règles de droit public et de l’Etat de droit (Annexe B-24). Ce rapport montre clairement comment certains membres des cabinets ministériels sont payés par ces associations culturelles en supplément de leurs salaires publics. Ce rapport de la Cour des comptes n’a été suivi d’aucune plainte pénale alors qu’il dénonce pourtant des faits précis et d’une gravité exceptionnelle.

Ce rapport de la Cour des Comptes dénonce le détournement du principe associatif et de l'objectif de partenariat poursuivi par le Ministère de la culture dans ses rapports avec les associations (AnnexeB-24, p. 562).

Le Rapport public 1999 de la Cour des Comptes reprend la définition des "associations para-administratives" telle qu'elle résulte du rapport de 1995.
Ces associations para-administratives "peuvent constituer des démembrements de l'administration, et dont la dépendance à l'égard de celle-ci se manifeste par les trois critères suivants :

- sur le plan administratif, les organes dirigeants de l'association sont composés en majorité, voire de façon exclusive, d'élus ou de fonctionnaires ;
- sur le plan matériel, ces associations dépendent, pour la quasi totalité de leurs ressources, des subventions ou des concours en nature de la collectivité, qu'il s'agisse d'immeubles, d'équipement ou de personnel ; la part des cotisations dans leur financement est nulle ou très faible ;
- sur le plan fonctionnel, ces associations exercent généralement des activités ayant le caractère de service public marqué". (Annexe B-24)

Outres les nombreux détournements d’argent public opérés par l’intermédiaire de ces associations, (situation dénoncée par de nombreux rapports de la Cour des comptes, Annexe B-24, page 563 et s), Ces associations permettent surtout aux fonctionnaires de pantoufler, sortant ainsi des contraintes du droit public. Le jeu des nominations dans des structures illégales permet ainsi de lier l’ensemble des intervenants du marché culturel. Le récent rapport du Service Central de Prévention de la Corruption, publié en mars 2001 a consacré un dossier à cette question du pantouflage et à l’ampleur qu’il a pris au sein de l’administration française :
"Cette collusion par l'unanimité des acteurs présente quelques analogie avec le jeu de la corruption. Le pacte corrupteur est rarement dénoncé par l'un des auteurs de l'infraction. Il faut une brèche, une faille, pour que le soupçon de corruption invite à examiner le dispositif. Cette brèche existe difficilement dans un système clos, agrégeant, par un jeu d'intérêts mutuels, les acteurs verrouillant un emboîtement d'opérations
". (Annexe B-6, p. 62)

Ce rapport précise que la création d’associations a été un facteur déterminant du développement de ce système.

Il mentionne ainsi :
"Le pantouflage dans le secteur associatif peut fonctionner tel un facteur de brouillage dans un domaine où règne, déjà souvent, la confusion. L'amalgame entre problèmes de financement, de contrôle, de recrutement, plonge d'emblée le débat dans une opacité qui n'est pas sans rappeler celle que l'on veut dénoncer. Le propos de Bernard Zimmern (...) est particulièrement éloquent à ce sujet :
"...dès qu'une association est subventionnée de façon substantielle, dès qu'en particulier ses permanents sont financés par l'argent public, on peut craindre le détournement à des fins personnelles, du fait même qu'il n'y a pas, en pratique, de contrôle et que tout reste secret.

Le cas le plus fréquent est celui de l'association subventionnée, créée sous un prétexte quelconque mais qui sert à contourner les règles de la comptabilité publique et permet à des fonctionnaires soit de compléter leurs revenus, soit de s'y faire mettre en disponibilité, ou, encore mieux, en détachement
". (Annexe B-6, p. 64)

La Commission pourra se rendre compte des dégâts causés à la démocratie et à l’état de droit par le pouvoir discrétionnaire reconnu à une autorité de recourir à des associations, pouvoir d’autant aggravé dans le domaine de l’archéologie préventive par le fait que les associations ne peuvent désormais plus exercer leur activité de façon indépendante en France, mais sont totalement sous la tutelle de l’établissement public créé par le Ministère de la culture.

Les associations Européennes intervenant dans le domaine de l’archéologie préventive ne pourront exercer leurs activités en France et sur le matériel révélé par le sous-sol français que selon le bon vouloir de cet établissement public et dans les conditions fixées unilatéralement par cet établissement public sans aucune mise en concurrence.

- Sur les pratiques illégales du ministère de la culture français par le biais de l'AFAN et du nouvel établissement public qui lui succédera par intégration.
La situation du nouvel Etablissement Public Administratif pouvant discrétionnairement faire appel pour le seconder aux entreprises commerciales ou associatives avec qui il souhaite travailler permet à l’établissement public français de contourner les contraintes que lui impose le statut d’établissement public administratif.

En créant cet EPA, la loi ne fait d’ailleurs que "légaliser" les pratiques totalement illégales qui ont été celles du ministère de la culture français dans ce domaine par l’intermédiaire de l’association " AFAN".

À titre d'exemple, un courrier en date du 16 avril 1999 adressé par le sous-directeur de l'archéologie du ministère de la culture au Préfet de la région Alsace montre que le ministère de la culture avait dans les fait octroyé un monopole à l’AFAN. Le préfet écrit en effet :
"il y a donc lieu pour toutes les opérations d'archéologie préventive engagées par la DRAC (Direction régionale de l’Action Culturelle, administration du ministère de la culture dans les régions) de consulter systématiquement - et prioritairement- cette association dont les rapports avec l'Etat ont donné lieu à la signature d'une convention - cadre. Ce n'est que dans les cas tout à fait exceptionnels où l'AFAN ne serait pas en mesure d'intervenir qu'il y aurait lieu de rechercher d'autres voies et moyens permettant la réalisation des opérations" (Annexe B-19).

Par ailleurs, un courrier en date du 19 juillet 1999 adressé par Madame la Ministre de la culture et de la communication aux sociétés HADES et ANTEA énonce que l'établissement public :
"sera en conséquence seul juge de l'opportunité de recourir aux services de prestataires extérieurs, telles que vos sociétés, et devra dans cette hypothèse se conformer aux dispositions du code des marchés publics auquel il sera soumis" (Annexe B-25).

Enfin, ce même courrier énonce que le montant des travaux :
"restera fixé contractuellement entre l'établissement public et son prestataire".

Le caractère arbitraire du recours à des entreprises commerciales ou associatives extérieures porte gravement atteinte à l’Etat de droit d'autant plus que si Madame la ministre de la culture pouvait valablement écrire en 1999 que l’établissement public serait soumis aux seules contraintes du code des marchés publics, ces contraintes sont aujourd’hui réduites à néant, puisqu’une réforme du Code des marchés public est venue simplifier à compter du 8 septembre 2001 le régime de ces marchés publics en permettant de passer un marché sans formalité (sans appel d'offre ni mise en concurrence) pour les prestations de nature culturelle.

En effet, le nouvel article 30 du Nouveau Code des marchés publics énonce :
"Les marchés publics qui ont pour objet :
1° Des services juridiques ;
2° Des services sociaux et sanitaires ;
3° Des services récréatifs, culturels et sportifs ;
4° Des services d'éducation ainsi que des services de qualification et insertion professionnelle,
sont soumis en ce qui concerne leur passation, aux seules obligations relatives à la définition des prestations par référence à des normes, lorsqu'elles existent, ainsi qu'à l'envoi d'un avis d'attribution.
La liste des services relevant des catégories mentionnées ci-dessus est fixée par décret. (...)
".

Le Nouveau Code contient de plus une définition précise de ce qu’il convient d’entendre par marché public.

En effet, l'article 1er du Nouveau Code des marchés publics énonce :
"les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public (...), pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services".

Au sens de l’article 4 de la loi du 17 janvier 2001, il semble bien que le recours aux entreprises extérieures a bien un caractère culturel et qu’il est destiné à répondre aux besoins de l’EPA en matière de services puisque l’EPA dispose d’une exclusivité dans le domaine de l’archéologie préventive (Annexe B-56).
Le recours aux entreprises extérieures n’est donc encadré d’aucune formalité et relève donc bien du choix discrétionnaire de l’EPA, quel que soit le montant des travaux.

Ces affirmations ne sont pas gratuites et ne constituent aucunement un procès d’intention.

La Commission pourra vérifier dans les quelques exemples cités et dans les pièces annexées que les critiques soulevées par le SNPBA sur cette question sont fondées en fait et en droit.

Certes, les États peuvent encadrer la liberté d’association, mais ces restrictions ne peuvent être établies que pour justifier
" (...) des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits et libertés d'autrui (...)." (Annexe B-7)

Au regard des possibilités de restrictions posées par ce texte, il semble effectivement normal que la République Française organise des formalités et conditions à même de garantir la non-destruction ou un traitement de qualité du patrimoine archéologique, il s’agit d’ailleurs désormais d’une des obligations imposées par la Convention de Malte, mais en aucun cas qu'il organise un monopole d'accès au savoir et à l'information à son seul profit.
Aucune question de sécurité nationale ne saurait justifier l’impossibilité pour les associations et professionnels de l’archéologie des autres États membres d’intervenir sur le territoire français. Une loi destinée à permettre au ministère de la culture français d’agir en dehors de tout état de droit et cela tant vis-à-vis de ses nationaux que des ressortissants des autres États membres est forcément contraire aux principes communautaires.

Le Syndicat National des Professionnels et des bénévoles de l'archéologie entend donc attirer l'attention de la Commission sur le fait que ce monopole institué par le législateur au profit de l'établissement public fait que l'éventuelle participation d'opérateurs, publics ou privés, ressortissants d'autres Etats membres, est subordonnée, sur le territoire français, au bon vouloir de la nouvelle entité et constitue une atteinte grave à la démocratie, d’autant plus importante qu’elle concerne le secteur culturel et la communauté scientifique et intellectuelle.

Aucune assurance, aucune garantie n'est donnée par la loi et cette situation est source d’atteintes graves à l’Etat de droit.

Le SNPBA demande donc à la Commission de constater qu’en promulguant la loi du 17 janvier 2001 et en créant un monopole sur l’archéologie préventive au profit de l’établissement public qui pourra s’il le souhaite se faire seconder par qui bon lui semble en dehors de tout contrôle, le gouvernement français porte atteinte au principe de l’état de droit au plan communautaire tel que garanti par les traités européens.

3) La loi du 17 janvier 2001 contrevient à l’article 128 du Traité CE

Cette disposition du traité énonce en effet :
1. La communauté contribue à l’épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale, tout en mettant en évidence l’héritage culturel commun.
2. L’action de la Communauté vise à encourager la coopération entre États membres et, si nécessaire, à appuyer et compléter leur action dans les domaines suivants :
- l’amélioration de la connaissance et de la diffusion de la culture et de l’histoire des peuples européens,
- la conservation et la sauvegarde du patrimoine culturel d’importance européenne,
- les échanges culturels non commerciaux,
- la création artistique et littéraire, y compris dans le secteur de l'audiovisuel (...)
".

Or, la loi du 17 janvier 2001 porte atteinte à la liberté d'expression, en organisant une censure et un contrôle étatique sur les connaissances relatives à la culture et à l’histoire des peuples européens, ainsi que sur la conservation et la sauvegarde du patrimoine culturel européen que peut révéler le sous-sol français.

L'article 4 de la loi crée en effet au profit de la République Française et de son EPA un monopole du diagnostic, de l'exécution des fouilles d'archéologie préventive, de l'exploitation scientifique et de la diffusion des résultats.
La République française s’est donc organisée un contrôle exclusif sur l'accès aux informations et aux données permettant de connaître le patrimoine archéologique recélé par le territoire administrativement français.

Or, l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, ratifiée par la France, énonce dans son article 10 que :
"Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières (...)." (Annexe B-7)

De plus, l'archéologie préventive, ainsi que le définit l'article 1er de la loi a pour objet

" d'assurer (...) la détection, la conservation ou la sauvegarde par l'étude scientifique des éléments du patrimoine archéologique affectés ou susceptibles d'être affectés par les travaux publics ou privés concourant à l'aménagement. Elle a également pour objet l'interprétation et la diffusion des résultats obtenus". (Annexe B-3)

Or, le patrimoine archéologique se situant sur le territoire français n'intéresse pas que la France. Il existe d'ailleurs un label patrimoine mondial délivré par l'UNESCO pour désigner des ensembles culturels qui intéressent l'humanité. L'étude du patrimoine archéologique doit donc être réalisée de façon à protéger la liberté de communiquer des informations et des connaissances qui ne doivent pas pouvoir être conservées par une autorité étatique au détriment du principe de libre circulation des savoirs et des idées dans la Communauté Européenne.

Par ailleurs, l'article 2 de la loi prévoit que l'État
"prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l'étude scientifique du patrimoine archéologique, désigne le responsable scientifique de toute opération d'archéologie préventive et assure les missions de contrôle et d'évaluation de ces opérations". (Annexe B-3)

Enfin, l'article 3 prévoit que
"avec le concours des établissements publics ayant des activités de recherche archéologique et des collectivités territoriales, l'Etat dresse et met à jour la carte archéologique nationale. Elle rassemble et ordonne pour l'ensemble du territoire national les données archéologiques disponibles. Les autorités compétentes pour délivrer les autorisations de travaux ont communication d'extraits de ce document et peuvent les communiquer à toute personne qui en fait la demande. Un décret détermine les conditions de communication de ces extraits ainsi que les modalités de communication de la carte archéologique par l'Etat, sous réserve des exigences liées à la préservation du patrimoine archéologique, à toute personne qui en fait la demande".

Ces dispositions organisent donc l'ingérence de l'État français et son contrôle exclusif sur l'accès aux informations et aux données permettant de connaître le patrimoine archéologique du territoire français.

Ce faisant, ces dispositions contreviennent très largement aux principes de libre accès à l'information, à la connaissance et au savoir européen tel que garanti par l'article 10 de la CEDH et l’article 128 du traité.

Certes, les Etats peuvent encadrer cette liberté, mais ces restrictions ne peuvent être établies que pour justifier
" (...) des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits et libertés d'autrui (...)." (Annexe B-7)

Au regard des possibilités de restrictions posées par ce texte, il semble effectivement normal que l'État organise des formalités et conditions à même de garantir la non-destruction ou un traitement de qualité du patrimoine archéologique, mais en aucun qu'il organise un monopole d'accès au savoir et à l'information à son seul profit.

Le Conseil Constitutionnel français a considéré que
"loin de conférer à l'établissement public des droits exclusifs sur l'utilisation des résultats des fouilles, l'article 4 de la loi déférée lui impose de diffuser les résultats de l'exploitation scientifique de ses activités ; que l'établissement public "concourt à l'enseignement, à la diffusion culturelle et à la valorisation de l'archéologie" ; qu'en application de la législation en vigueur, les rapports de fouilles constituent des documents administratifs accessibles au public ; qu'en vertu de l'article 3 de la loi déférée, l'État dresse et met à jour, avec l'ensemble des établissements publics ayant des activités de recherche archéologique et des collectivités territoriales, la carte archéologique, laquelle "rassemble et ordonne pour l'ensemble du territoire national des données archéologiques disponibles" ; qu'un décret déterminera les modalités selon lesquelles la carte archéologique nationale pourra être communiquée à toute personne qui en fera la demande ; que manque dès lors en fait le grief de ce que le législateur aurait porté atteinte à la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;" (Annexe B-13).

Le Conseil Constitutionnel a donc éludé la plupart des questions posées par le recours. Il n’a répondu effectivement ni au problème posé par la désignation du responsable scientifique par l'Etat, par la diffusion des résultats, ni sur la question de l’accès aux documents administratifs et de la diffusion de la carte archéologique.

- Sur la désignation du responsable scientifique par l'État

Le responsable scientifique est nommé par l’État.
Cette disposition figure à l’article 2 de la loi qui prévoit que l'État
"prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l'étude scientifique du patrimoine archéologique, désigne le responsable scientifique de toute opération d'archéologie préventive et assure les missions de contrôle et d'évaluation de ces opérations". (Annexe B-3)
Le Conseil Constitutionnel n’a apporté aucune réponse à cette question du choix du responsable de chaque opération alors que celui-ci porte atteinte à la liberté d’expression et à la circulation des idées dans la Communauté Européenne.

En effet, cette disposition fait que l'éventuelle participation d'opérateurs, publics ou privés, ressortissants d'autres Etats membres est impossible.
Certes, le fait que l'État veille à la qualification des responsables scientifiques est tout à fait légitime mais sous réserve de la mise en place de critères objectifs. En effet, le fait que l'État les choisisse à titre exclusif est on ne peut plus dangereux sur le plan politique et contient en germe des déviances totalitaires.

Aussi, il existe des risques de déformation de la réalité, de pressions et de destruction du patrimoine.

En effet, l’établissement public et le Ministère de la culture cumulent toutes les fonctions, à la fois celle de contrôle, de prescription, d’exécution et de diffusion des résultats. Cette confusion de toutes les missions présente des risques graves de perversion et de destruction irrémédiable du patrimoine archéologique, contrevenant ainsi aux dispositions de la convention de Malte.

À titre d'exemple, si le responsable scientifique nommé par l'État commet une erreur en nommant un responsable scientifique incompétent, mais salarié de l’AFAN qu’il faudra bien faire travailler, osera-t-il avouer cette erreur ou préférera-t-il prendre le risque de destruction ou de mauvaises réalisations des opérations de fouilles de conservation ou de traitement des informations à la reconnaissance d’erreurs impliquant sa propre structure, voir un supérieur hiérarchique ?

Ce risque n’existerait pas si l’État se contentait des fonctions régaliennes sans s’immiscer dans le cadre d’un monopole dans la phase de réalisation des fouilles, de prescription et d’analyse scientifique. L’Etat serait alors totalement libre de contrôler les personnes qu’il a seulement agréées et de critiquer leurs méthodes sans qu’on puisse l’accuser d’une quelconque arrière-pensée intellectuelle ou économique.

Les personnes ne pouvant travailler en France sans son accord sont de plus soumis à une contrainte intellectuelle inacceptable. La démocratie repose sur la séparation des pouvoirs et l’existence d’une État impartial à même de faire respecter l’État de droit.

Ce risque est aggravé par la confusion de toutes les missions, d’exécution de prescription et de contrôle dans la mesure notamment où il n'y a pas de contre-expertise possible.

L’opérateur qui finance les fouilles et le propriétaire du terrain n’ont donc aucune possibilité d’intervention dans le choix du responsable scientifique qui présidera à la réalisation des fouilles réalisées sur leur terrain.
Le fait que l’État désigne le responsable scientifique au lieu de simplement veiller à la qualification de ce responsable scientifique et au respect de la réglementation n’est justifiée par aucune des dispositions qui autorisent des atteintes à la liberté d’expression.

En effet, les Etats ne peuvent restreindre cette liberté que pour justifier
"." (...) des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits et libertés d'autrui (...)(Annexe B-7)

Il convient de ne pas oublier que la France est une entité somme toute récente et que son sous-sol révèle des traces de cultures éventuellement non françaises. Elle n’est d’ailleurs pas exempte de mouvements culturels indépendantistes, et l’État peut donc être amené à nier l’histoire révélée par le sous-sol dans l’intérêt de la justification des frontières actuelles et de l’existence de la "Nation Française". La construction de l’Europe a justement eu pour but de dépasser ces nationalismes qui ont tant marqués ces deux derniers siècles.

L’Europe se doit cependant d’être vigilante et ne pas permettre le retour du totalitarisme. Le patrimoine du sous-sol français est un patrimoine Européen et ne saurait donc relever de l’étude exclusive du Ministère de la culture français et des experts désignés par lui seul. Il faut que les aménageurs puissent mettre en concurrence les divers spécialistes européens, et choisir celui qui sera le plus approprié à étudier correctement et en toute indépendance ce que révèle le sous-sol français, quelles qu’en soit les conséquences au niveau de la connaissance historique et scientifique et de leurs éventuelles conséquences politiques.

Cette question est encore plus criante quand il s’agit du sous-sol des départements et territoires d’outre-mer, dont le passé relève de cultures qui nous semblent souvent fort éloignées et au regard desquelles les Européens n’ont pas forcément eu dans le passé une attitude exemplaire. Les dispositions de la récente Loi Française sur l’archéologie permettent à la République Française de faire fi de tout débat et d’imposer son contrôle absolu sur le contenu et le traitement des sources françaises d’information dans le domaine de l’archéologie, affectant donc de façon considérable et totalement injustifiée la libre circulation des idées et de la pensée en Europe.
Le problème se pose de manière identique notamment pour la Corse, les Flandres, l’Alsace, la Provence etc.

Les archéologues italiens, belges, allemands ou Espagnols etc. qui pourraient parfois être plus compétents que les français pour organiser et étudier tel ou tel type de chantier dans ces territoires se voient exclure de toute possibilité d’intervention au profit du seul établissement public français et du ministère de la culture. Ces archéologues n’auront plus désormais accès aux chantiers et mobiliers français et aux connaissances que le territoire français recèle qu’à travers le prisme déformant de l’Établissement public exclusif français et seulement après que l’Établissement public ait accepté de diffuser les résultats dont il est seul détenteur.

Ce pouvoir exclusif de nomination du responsable scientifique et le fait que le propriétaire et l’aménageur ne peuvent donc choisir librement parmi les personnes possédant les compétences et les agréments nécessaires, celui à qui il confieront la direction scientifique de la fouille préventive, constituent une atteinte indéniable à la liberté d’expression et à la libre circulation de la pensée et de la connaissance européenne. Cette étatisation française recèle un potentiel grave de perversions, de manipulations historiques et de destruction du patrimoine archéologique européen. Elle n’est pas digne d’une société démocratique moderne et d’un État membre des Communautés Européennes.

- Sur la diffusion des résultats
L'article 4 de la loi du 17 janvier 2001 énonce que
" L'établissement public assure dans les mêmes conditions l'exploitation scientifique de ses activités et la diffusion de leurs résultats (...)".

Par ailleurs, l'article 7 de la loi prévoit également que
"le mobilier archéologique issu des opérations d'archéologie préventive est confié, sous le contrôle des services de l'Etat, à l'établissement public, le temps nécessaire à son étude scientifique. Au terme de ce délai, qui ne peut excéder cinq ans, la propriété de ce mobilier est régie par les dispositions de l'article 11 de la loi du 27 septembre 1941 précitée."

Le Conseil Constitutionnel a considéré que
"loin de conférer à l'établissement public des droits exclusifs sur l'utilisation des résultats des fouilles, l'article 4 de la loi déférée lui impose de diffuser les résultats de l'exploitation scientifique de ses activités ; que l'établissement public "concourt à l'enseignement, à la diffusion culturelle et à la valorisation de l'archéologie" ; qu'en application de la législation en vigueur, les rapports de fouilles constituent des documents administratifs accessibles au public (Annexe B-13).

Or, la libre circulation des idées, ce n'est pas uniquement d’avoir accès aux rapports de fouilles, c’est aussi d’avoir accès aux objets, meubles et immeubles à l’origine de ces rapports de fouilles.

La liberté de choix et la concurrence en ce domaine est d’autant plus cruciale qu’il ne pourra parfois y avoir plusieurs rapports de fouilles, puisque le principe même de l’archéologie préventive, c’est qu’il s’agit d’une archéologie de sauvegarde et que le terrain est ensuite irrémédiablement détruit.

À quoi sert d’ailleurs la diffusion d’un document établi dans des conditions laissant place à toutes les perversions scientifiques sans que l’on puisse avoir accès au mobilier et à l’immobilier sur lequel est basé ce rapport ? En effet, les missions de prescription, de contrôle, de réalisation, d’étude, et de diffusion sont exercées par le même établissement du ministère français de la culture sans que l’aménageur puisse faire intervenir le moindre contre-expert.
D’autant que cette diffusion est assurée dans les mêmes conditions que le choix du responsable scientifique, c’est-à-dire de façon discrétionnaire par l’établissement public. Pour pouvoir demander à avoir accès à un rapport de fouille, encore faut-il savoir que ce rapport existe, et puisque l’établissement public est seul à même de décider de sa diffusion, il est seul à même d’établir la date à laquelle le rapport sera considéré comme fini et accessible, donc seul à même de diffuser ce rapport dans la forme qu’il le souhaite, seul à même de donner ou non une promotion à un rapport ou à une découverte.

On imagine sans peine que l’établissement public ne sera pas enclin à donner une grande publicité à une opération de fouille sur laquelle il aura pu se tromper et éventuellement détruire des éléments sans possibilité de nouvelle étude.

La confusion de toutes les missions de l’archéologie préventive au sein d’un seul établissement et d’un même pouvoir est source de tous les dangers au regard de la nécessité d’une réelle diffusion des résultats.

Si la réglementation française permet d’avoir accès aux documents administratifs, l’application réelle de ces textes peut mettre plusieurs années, l’administration n’étant pas tenue de suivre l’avis de la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (Annexe B- 28). Durant ce délai, le chantier de fouille préventive sera le plus souvent terminé et les travaux terminés empêchent de façon définitive tout réexamen.

Dans le domaine de la circulation des idées, les trois ou quatre années qui pourront alors être nécessaires pour avoir une décision judiciaire définitive enjoignant à l’Etablissement public de communiquer un rapport de fouille représentent des contraintes et une atteinte non justifiée à la libre circulation des idées telle que protégée par l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et à la connaissance de l’héritage culturel commun tel qu’énoncé à l’article 128 du traité.

Le responsable scientifique déjà obligatoirement choisi par le Ministère de la Culture devra soumettre à l’établissement public les modalités de diffusion de ses résultats. Cette censure étatique ne saurait être une " (...) des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits et libertés d'autrui (...)." (Annexe B-7)

Force est de constater que cette situation risque d'être préjudiciable notamment aux intérêts scientifiques et à la sauvegarde du patrimoine archéologique européen et à la diffusion des connaissances que l’archéologie préventive a pour but de développer.

De plus, le fait que l’établissement public est seul à même de décider des conditions de divulgation des résultats porte également une atteinte non justifiée au droit à l’information et à l’égalité des organes de presse et des revues spécialisées dans le domaine de la recherche archéologique. En effet, l’EPA sera enclin à créer sa propre revue, ou à ne donner des informations qu’aux organes de presse complaisants.

La revue de l’EPA aura donc l’exclusivité de la diffusion des résultats scientifiques, et jouira d’un droit de préemption sur l’information nouvelle qui faussera totalement la concurrence entre les diverses revues actuellement existantes et ne permettra plus aux autres revues et aux scientifiques des État membres d’avoir un accès libre aux connaissances culturelles européennes recélées par le sous sol français.

La République française a beau se draper derrière des grands principes, l’exclusivité qu’elle a conférée à l’établissement public montre la réalité de ses intentions. Il ne fait que défendre son "fonds de commerce" en se créant un marché supplémentaire. La revue de l’établissement public, forte de sa source légale exclusive d’information s’est assurée une position dominante sur le marché français et partant une position de force incontournable sur le marché Européen.

L’AFAN qui doit se transformer prochainement en Etablissement public vient en effet de créer sa revue (Annexe B-51).

Les droits d’auteur viennent encore restreindre cette possibilité de diffusion
En effet, si la République Française a mis en place une réglementation permettant un libre accès aux documents administratifs, cette même réglementation précise que ces documents administratifs peuvent être consultés dans le respect des droits de la propriété littéraire et artistique possédés par les auteurs. (Annexe B-57)

Cela signifie que l’utilisation du matériel issu des opérations d’archéologie préventive ne pourra être effective en dehors de l’établissement public et de sa revue, et sauf à négocier financièrement son utilisation, que dans le cadre des analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogiques, scientifiques ou d‘information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées (seule dérogation permise par l’article L.122-5.3° du Code de la Propriété Intellectuelle français.), et encore ce droit n’autorise pas la publication d’une photo, d’une carte ou d’un objet de façon intégrale.

L’établissement public qui détient l’exclusivité d’embauche en France n’aura quant à lui aucun mal à se faire céder les droits d’auteur par le personnel qu’il emploiera. Il sera contraint de communiquer les documents qu’il réalisera, mais aucune exploitation ne pourra en être faite sans son accord puisqu’il en détient les droits d’auteur et que tout rapport de fouille est une œuvre protégée au titre de la propriété intellectuelle.

Quant aux tiers, à l’issue des procédures de communication des documents administratifs, ils ne seront déjà plus dans le cadre du droit à l’information, que la jurisprudence française lie étroitement à l’actualité.

Ce droit exclusif de diffusion de l’information relative à ses activités et aux résultats des fouilles représente donc une atteinte grave à la liberté d'expression au sein de la Communauté Européenne.

- Sur la diffusion de la carte archéologique et la question du libre accès aux documents administratifs

L'article 3 de la loi du 17 janvier 2001 prévoit que
"avec le concours des établissements publics ayant des activités de recherche archéologique et des collectivités territoriales, l'Etat dresse et met à jour la carte archéologique nationale. Elle rassemble et ordonne pour l'ensemble du territoire national les données archéologiques disponibles. Les autorités compétentes pour délivrer les autorisations de travaux ont communication d'extraits de ce document et peuvent les communiquer à toute personne qui en fait la demande. Un décret détermine les conditions de communication de ces extraits ainsi que les modalités de communication de la carte archéologique par l'Etat, sous réserve des exigences liées à la préservation du patrimoine archéologique, à toute personne qui en fait la demande".

Le Conseil Constitutionnel a considéré que :
"loin de conférer à l'établissement public des droits exclusifs sur l'utilisation des résultats des fouilles, l'article 4 de la loi déférée lui impose de diffuser les résultats de l'exploitation scientifique de ses activités ; que l'établissement public "concourt à l'enseignement, à la diffusion culturelle et à la valorisation de l'archéologie" ; qu'en application de la législation en vigueur, les rapports de fouilles constituent des documents administratifs accessibles au public (Annexe B-13).

Or, seuls les rapports de fouilles sont communicables, et selon les procédures lourdes de communication des documents administratifs (Annexe B-28). Et sous réserve des droits de propriété intellectuelle puisqu’une carte est en principe une œuvre protégée (article L.112-2.11° du Code de la propriété intellectuelle français)

En effet, à quoi sert la liberté d’accès à un rapport de fouille réalisé dans des conditions qui permettent de douter de sa fiabilité, avec un délai pouvant atteindre plusieurs années sachant de plus qu’aucune exploitation professionnelle ne peut en être faite sans négociation préalable des droits.

Ce qui est important pour la liberté d’expression, ce n’est pas d’avoir communication d'une carte archéologique établie dans un cadre n’offrant pas toutes les garanties de qualité scientifique et pouvant avoir eu pour soucis de ne pas déplaire à l’administration du Ministère de la culture français, maître des carrières de la profession. Cette carte aura en effet l’obligation d’être politiquement correcte.

La liberté d’expression ne s’exerce réellement que si les sources d’information sont diversifiées et contrôlables.

Disposer librement d’outils n’offrant pas toutes les garanties scientifiques ne nous semble pas permettre la diversité au niveau de la recherche et de l’analyse.

Par ailleurs, dans la réalité, cette disposition est encore trop libérale pour la République française, puisque cette possibilité d’accès aux sources d’information est encore amoindrie, voire réduite à néant, par la loi du 17 janvier 2001 qui précise que cet accès à la carte archéologique ne se fera que :
"sous réserve des exigences liées à la préservation du patrimoine archéologique".

La République Française s’octroie donc un étage de contrôle supplémentaire au cas où les gardes fous déjà mis en place tout au long d’un processus de réalisation des opérations d’archéologie préventive déjà totalement étatisé auraient encore pu laisser filtrer des informations non désirables.

Le Syndicat National des Professionnels et des Bénévoles de l'Archéologie entend donc attirer l'attention de la Commission sur le fait que ce monopole d'État représente une atteinte grave à la liberté d'expression et ne saurait constituer une " (...) des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits et libertés d'autrui (...)." (Annexe B-7)

Ce faisant, la loi du 17 janvier 2001 comporte une atteinte grave à la liberté d'expression et à la diffusion de la connaissance européenne commune
Une telle atteinte ne saurait se justifier dans un État à prétention démocratique membre de l’Union Européenne.

La Cour Européenne des Droits de l'Homme, dans ses décisions Handyside du 7 décembre 1976 (Annexe B-8) et Sunday Times du 26 avril 1979 (Annexe B-9) a d'ailleurs, avec beaucoup de vigueur, mis l'accent sur la liberté d'expression comme "l'un des fondements essentiels d'une société démocratique, l'une des conditions primordiales de son progrès et de l'épanouissement de chacun" : il ne saurait y avoir de société démocratique, affirme la Cour, sans "pluralisme, tolérance et esprit d'ouverture", ce qui n’est hélas absolument pas l’apanage de ce que recouvre la réalité de l’exception cultuelle française.

En conséquence, et pour toutes les raisons sus-évoquées, le Syndicat National de l’Archéologie Préventive demande à la Commission Européenne de mettre en demeure la République Française de respecter les dispositions des articles 86, 90 et 128 du Traité CE, de l’article 6 du Traité UE et de modifier en conséquence la Loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive.

8. CONFIDENTIALITE :
Le Syndicat National des Professionnels et des Bénévoles de l'Archéologie autorise la Commission à divulguer son identité lors de ses démarches auprès des autorités de l'Etat membre contre lequel la plainte est dirigée.
Le SNPBA autorise également la commission à communiquer l’intégralité de la plainte et des pièces annexées aux autorités françaises.

9. LISTE DES PIECES ANNEXEES A LA PLAINTE :
B-1. Jo Sénat du 30 mai 1996, p. 1319.
B-2. Arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes n° C-309/96, du 18 décembre 1997.
B-3. Loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001.
B-4. Article 11 de la Convention Européenne des droits de l'homme.
B-5. Le respect des droits fondamentaux dans l'Union.
B-6. Rapport 2000 du service central de prévention de la corruption (Extraits).
B-7. Article 10 de la Convention Européenne des droits de l'homme.
B-8. Arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'Homme n° A/24, du 7 décembre 1976.
B-9. Arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'Homme n° A/30, du 26 avril 1979.
B-10. Statuts de l'Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales.
B-11. Avis du Conseil de la Concurrence, n° 98-A-07, du 19 mai 1998.
B-12.Saisine du Conseil Constitutionnel en date du 21 décembre 2000.
B-13. Décision du Conseil Constitutionnel, n° 2000-439 DC du 16 janvier 2001.
B-14. Statuts du Syndicat National des Professionnels et des Bénévoles de l'Archéologie.
B-15. Loi du 27 septembre 1947 portant réglementation des fouilles archéologiques.
B-16. Loi n° 94-926 du 26 octobre 1994 autorisant l'approbation de la convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique.
B-17. Loi n° 89-874 du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes.
B-18. Décret du 19 avril 1947 portant règlement d'administration publique concernant les expertises des objets provenant de fouilles archéologiques.
B-19. Lettre du 16 avril 1999 adressée par Monsieur le sous-directeur de l'archéologie à Monsieur le Préfet de la région Alsace.
B-20. Rapport de la Commission mixte paritaire de l'Assemblée Nationale et du Sénat en date du 18 octobre 2000.
B-21. "Cultivez - vous ! il m'en restera toujours quelque chose..., Roland Lienhardt, Leader Music, 1998.
B-22. La Lettre du Disque, n° 301, 3 juillet 2001.
B-23. Conclusions de la Société GR.A.C.E c/ Ministère de la culture.
B-24. Rapport public 1999 de la Cour des Comptes.
B-25. Lettre adressée par Madame la ministre de la culture et de la communication aux sociétés HADES et ANTEA.
B-26. Les Echos du lundi 11 juin 2001.
B-27. Lettre adressée par Monsieur le député Alain FERRY à la Société ANTEA le 7 mars 2000.
B-27.1 Lettre adressée par les Sociétés HADES et ANTEA à Monsieur le Directeur du Patrimoine le 2 avril 1999.
B-27.2 Lettre adressée par la Société ANTEA à Monsieur le Préfet de la région Alsace le 3 janvier 2000.
B-27.3 Lettre adressée par Maître Viviane MICHEL à Monsieur le Préfet de la région Alsace le 8 novembre 1999.
B-27.4 Lettre adressée par la Société ANTEA à Monsieur le Préfet de région le 4 octobre 1999.
B-27.5 Lettre adressée par la Société ANTEA au Sous-Directeur de l'archéologie le 6 avril 1999.
B-27.6 Lettre adressée par Monsieur le Maire J. C. SCHMITT à Monsieur le député Alain FERRY le 23 février 2000.
B-27.7 Lettre adressée par la Société ANTEA à Madame la Ministre de la Culture et de la Communication le 21 décembre 1998.
B-27.8 Lettre adressée par Monsieur le député Georges COLOMBIER à la Société ANTEA le 14 février 2000.
B-27.9 Lettre adressée par Madame la député Christine BOUTIN à la Société ANTEA le 7 mars 2000.
B-27.10 Lettre adressée par Monsieur le Sénateur Philippe RICHERT à la Société ANTEA le 12 avril 2000.
B-27.11 Lettre adressée par Monsieur le député Emile BLESSIG à la Société ANTEA le 14 mars 2000.
B-27.12 Lettre adressée par Monsieur le député Georges COLOMBIER à la Société ANTEA le 25 février 2000.
B-27.13 Lettre adressée par Monsieur le Sénateur Jacques LEGENDRE à la Société ANTEA le 7 mars 2000.
B-27.14 Lettre adressée par Monsieur le Sénateur Jean-Louis LORRAIN à la Société ANTEA le 16 mars 1999.
B-27.15 Lettre adressée par Monsieur le Sénateur Daniel HOEFFEL à la Société ANTEA le 6 avril 2000.
B-28. Séance de l'Assemblée Nationale en date du 22 février 2000.
B-29. Les nouvelles de l'archéologie, n° 82, 4ème trimestre 2000.
B-30. La Lettre d'Information du Ministère de la Culture et de la Communication du 8 décembre 1999.
B-31. Jo Sénat du 11 février 1999, p. 448.
B-32. Jo Assemblée Nationale du 5 août 1996, p. 4254.
B-33. Jo Assemblée Nationale du 10 février 1997, p. 673.
B-34. Jo Assemblée Nationale du 5 février 1996, p. 621.
B-35. Jo Assemblée Nationale du 13 octobre 1997, p. 3425.
B-36. Jo Assemblée Nationale du 8 décembre 1997, p. 4484.
B-37. Intervention de Madame France GUILLEMONAT, Maître de conférences en droit à l'Université d'Aix-Marseille III, colloque sur les "approches comparatives en économie de la culture", Paris, les 29 et 30 mai 1995.
B-38. Charte des missions de service public présenté par Madame Catherine TRAUTMANN le 26 février 1998.
B-39. Décret du 17 février 1999 portant nomination du président du conseil d'administration de l'Etablissement public de la Cité de la musique, Jo du 18 févreier 1999, p. 2576.
B-40. Attêté du 28 août 1998 portant nomination au conseil d'administration du Centre national de la danse, Jo du 5 septembre 1998, p. 13600.
B-41. Arrêté du 7 mars 2000 portant nomination au conseil d'administration du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Jo du 15 mars 2000, p. 4066.
B-42. Who's Who in France, 1998-1999, p. 1021.
B-43. Arrêté du 24 juin 1999 portant nomination au conseil d'administration du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Jo du 27 juin 1999.
B-44. Arrêté du 15 juin 2001 portant délégation de signature, Jo du 28 juin 2001, p. 10255.
B-45. Décret du 14 juin 2001 portant nomination à la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits, Jo du 17 juin 2001, p. 9662.
B-46. Extraits du site de France Télévision en date du 10 juillet 2001 sur le parcours de Marc TESSIER.
B-47. Organigramme de l'Institut National de l'Audiovisuel en date du 10 juillet 2001.
B-48. Communiqué de presse sur la nomination de Monsieur Emmanuel HOOG à la présidence de l'Institut National de l'Audiovisuel en date du 14 février 2001.
B-49. Biographie de Monsieur Francis BECK.
B-50. Édito de la revue " La Lettre du Disque " n°302 du 10 juillet 2001
B-51. Extrait du magazine " Archéopages " n°1 de juin 2000
B-52. Etude comparative des réformes Hollandaise et Française.
B-53. Plaquette de l’AFAN 1998
B-54. Textes réglementant la prise illégale d’intérêt en droit pénal français.
B-55. Extrait de La Lettre de Nodula de Juillet 2001.
B-56. Extrait du code français des marchés publics applicable au 6 septembre 2001
B-57. Mécanisme de la communication au public des documents administratifs et limites liées au droit d’auteur.
 
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