Monsieur Georges François HIRSCH exerçait depuis le 7 mai 2008 les fonctions de directeur de la musique, du théâtre, de la danse et des spectacles au ministère de la culture (1). Suite à la récente restructuration du ministère de la culture, il est depuis peu directeur général de la création artistique, la nouvelle direction du ministère de la culture (2).
Cette direction du ministère exerce notamment dans le secteur du spectacle vivant les missions suivantes (3) :
- Elle contrôle des organismes subventionnés directement par la direction générale ;
- Elle met en œuvre la tutelle des opérateurs relevant de leur domaine de compétence ;
- Elle est associée au suivi de l’activité des scènes nationales, toutes ces activités concernant notamment l’Opéra National de Paris (4) et l’établissement public de la Cité de la musique (5).
Or, Monsieur Georges François HIRSCH a été nommé en date du 7 juillet 2009 (6) administrateur de l’Opéra de Paris, organisme sous tutelle de la direction du spectacle vivant du ministère (aujourd’hui intégrée à la direction générale de la création artistique). Ce faisant, il prend un intérêt qui est loin d’être quelconque, dans une opération dont il a, au moment de sa nomination, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance et l’administration, ce qui semble correspondre en tous points à l’élément matériel du délit de prise illégale d’intérêt prévu et réprimé par l’article 432-12 du code pénal (7).
Il est effectivement difficile d’être critique vis-à-vis de la gestion d’un organisme aux décisions duquel on est directement associé en qualité de membre du conseil d’administration.
Monsieur HIRSCH a également été nommé administrateur de l’établissement public de la Cité de la musique par un décret en date du 25 août 2008, organisme sous tutelle de la direction du spectacle vivant du ministère. Ce faisant, il a également pris un intérêt dans une opération dont il avait, au moment de sa nomination, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance et l’administration, ce qui semble correspondre là aussi à l’élément matériel du délit de prise illégale d’intérêt (8).
Ainsi que l’a précisé la cour de cassation dans son arrêt en date du 4 novembre 2004, le fait d’être nommé à certaines de ces fonctions par décision gouvernementale ne caractérise pas l’ordre de la loi (9), qui permettrait d’écarter la commission de ce délit. Un décret ne peut déroger à une disposition pénale de nature législative.
Monsieur HIRSCH est également mentionné sur les sites internet de l’orchestre national de Lille, de l’Opéra Comique, de Radio France, du Grand palais des Champs Elysées, de l’établissement public du Parc et de la Grande Halle de la Villette, et de l’association française des orchestres, en tant que membre de leurs conseils d’administration.
Monsieur HIRSCH est également mentionné comme administrateur du Centre national des Variétés qui lui-même renvoie à l’arrêté du 15 mars 2008 : il est intéressant de noter que ce texte ne mentionne pas Monsieur HIRSCH comme administrateur, mais nomme son prédécesseur à la Direction de la musique, du théâtre, de la danse et des spectacles, Monsieur Jean DE SAINT-GUILHEM (10). Quelqu’un au CNV ne sait pas que les arrêtés de nominations ne désignent jamais des fonctions, mais des personnes.
Ces quelques exemples ne sont aucunement exhaustifs.
En conséquence, les différents postes d’administrateur de Monsieur Georges François HIRSCH dans des établissements culturels et artistiques sur lesquels il exerce une mission de tutelle et de surveillance au titre de son poste de directeur général de la création artistique, nous semblent constituer l’élément matériel du délit de prise illégale d’intérêt prévu et réprimé par l’article 432-12 du code pénal.
Monsieur HIRSCH ne peut ignorer ses nominations et la situation de conflit d’intérêt dans lesquels elles le placent, ce qui caractérise l’élément intentionnel de l’infraction.
(1) Conseil des ministres du 7 mai 2008, mesures d’ordre individuelle.
(2) Décret du 13 janvier 2010 portant nomination du directeur général de la création artistique, JORF du 15 janvier 2010.
(3) Arrêté du 17 novembre 2009 relatif aux missions et à l’organisation de la direction générale de la création artistique, JORF du 5 décembre 2009.
(4) Décret n° 94-111 du 5 février 1994 fixant le statut de l’Opéra national de Paris.
(5) Décret n°95-1300 du 19 décembre 1995 portant création de l’Etablissement public de la Cité de la musique.
(6) Décret du 7 juillet 2009 portant nomination au conseil d’administration de l’Opéra National de Paris, JORF du 8 juillet 2009.
(7) L’article 432-12 du code pénal énonce que : « Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende.»
(8) Décret du 25 août 2008 portant nomination au conseil d’administration de l’Etablissement public de la Cité de la musique, JORF du 27 août 2008.
(9) Cass. Crim. 4 novembre 2004, n° 03-84687.
(10) Arrêté du 18 mars 2008 portant nomination au conseil d’administration du Centre National des Variétés.
© Nodula Février 2010