Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011
Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure
SUR L'ARTICLE 53 :
41. Considérant que l'article 53, d'une part, insère dans le code de commerce un article L. 443 2 1 et, d'autre part, modifie son article L. 443 3 ; qu'en vertu du nouvel article L. 443 2 1, est puni d'une amende de 15 000 euros « le fait, sans autorisation du producteur, de l'organisateur ou du propriétaire des droits d'exploitation d'une manifestation sportive, culturelle ou commerciale, d'offrir, de mettre en vente ou d'exposer en vue de la vente, sur un réseau de communication au public en ligne, des billets d'entrée ou des titres d'accès à une telle manifestation pour en tirer un bénéfice » ; que la personne physique reconnue coupable de cette infraction encourt, en outre, la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ; qu'en vertu de l'article L. 443-3 modifié, la personne morale déclarée responsable pénalement de la même infraction encourt, outre l'amende précitée portée au quintuple, les peines prévues à l'article 131-39 du code pénal ;
42. Considérant que les requérants soutiennent, en premier lieu, que ces dispositions placent dans le code de commerce des dispositions qui ne concernent pas seulement les commerçants ou des sociétés et ne définissent pas la notion de bénéfice ; qu'ainsi elles méconnaîtraient l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ; qu'en outre, elles seraient contraires au principe de nécessité des peines dans la mesure où elles porteraient une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté contractuelle des personnes physiques, ainsi qu'à la liberté d'entreprendre des personnes morales ; qu'enfin, elles institueraient une rupture d'égalité devant la loi entre ceux qui revendent des billets sur un « réseau de communication au public en ligne » et ceux qui se livrent à la même opération par une autre moyen ;
43. Considérant qu'en interdisant la revente, sans accord préalable des organisateurs, de billets d'entrée ou de titres d'accès, le législateur a entendu prévenir et réprimer les éventuels troubles résultant de la mise en échec des dispositions mises en œuvre pour certaines manifestations sportives et préserver les droits des producteurs, organisateurs ou propriétaires des droits d'exploitation d'une telle manifestation ; que, toutefois, en réprimant pour l'ensemble des manifestations culturelles, sportives ou commerciales la revente proposée ou réalisée sur un réseau de communication au public en ligne pour en tirer un bénéfice, le législateur s'est fondé sur des critères manifestement inappropriés à l'objet poursuivi ; que, dès lors, l'article 53 de la loi déférée méconnaît le principe de nécessité des délits et des peines ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, il doit être déclaré contraire à la Constitution ;
(...)
D É C I D E :
Article 1er.- Sont déclarées contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure :
(...)
- les articles 53, 90, 91, 92 et 101 ;
(...)
Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 mars 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.
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