Cet article est un condensé de
l'article publié dans le numéro de février
2004 de La Lettre de Nodula.
Dans
une circulaire du 17 février 2004, lUNEDIC
a précise les modalités de prise en compte
des droits dauteur par les Assedic. Ce texte qui
concerne notamment les professionnels du spectacle déjà
en rébellion contre la réforme de leur régime
a déclenché les foudres dun certain
nombre de sociétés dauteurs, relayées
par le ministre de la culture.
Le tir de barrage déclenché contre lUnedic
permet de comprendre létat desprit
des protagonistes fort médiatiques de ce conflit,
qui interviennent toujours de façon à ce
quaucun débat contradictoire ne puisse jamais
sinstaurer. Les données du problème
sont fortes denseignements.
La prise en compte
des droits dauteur par lUNEDIC.
LUnedic considère que les droit dauteur
perçus en contrepartie de cessions de droits doivent
être pris en compte pour le calcul des conditions
de cumul des allocations et des revenus dactivité
si le contrat de cession des droits patrimoniaux qui fonde
ces revenus est conclu après ladmission à
lallocation daide au retour à lemploi.
Les " intermittents " en lutte, soutenus par
le ministre invoquent le fait que le droit dauteur
serait un droit patrimonial et quil na pas
à être pris en compte au titre des revenus
des demandeurs demploi indemnisés.
Les positions respectives de lUnedic et du ministre
ne prennent absolument pas en compte la réalité
de léconomie des droits dauteur et
son utilisation dans les secteurs du spectacle.
LUnedic oublie de plus de prendre en compte les
redevances payées aux artistes au titre des exploitations
secondaires de leurs interprétations (disques,
vidéo, copie privée, rémunération
équitable etc
), et que lon désigne
sous le terme de droits voisins des droits dauteur.
Laspect patrimonial du droit dauteur ne représente
que lun des aspects de ce droit dont les autres
dimensions font elles aussi lobjet de négociations
et de rémunérations.
Ainsi, la prime dinédit désigne la
rémunération du droit de première
divulgation conféré à un producteur.
Cette rémunération permet à lauteur
de se consacrer à la création qui lui est
commandée. Là-valoir, rémunère
la contrepartie de la disponibilité de lauteur
qui va travailler pour le compte dun producteur
qui se rembourse une fois luvre exploitée
sur les rémunérations proportionnelles.
Les artistes perçoivent également des avances
sur droits récupérables, qui leur permettent
de se rendre disponibles pour la période correspondant
à lenregistrement de luvre.
Or, un auteur qui travaille à la création
dune uvre nest pas à la recherche
dun emploi. Il en est de même dun auteur
ou dun artiste qui assure la promotion de luvre
dont il est interprète, ce qui représente
un vrai travail et qui est pourtant le plus souvent rémunéré
par les Assedic.
On a oublié que lallocation daide au
retour à lemploi concerne les personnes en
situation de recherche demplois, seul critère
permettant en principe de justifier leur prise en charge
au titre de lassurance-chômage.
Si la SCAM et la SACD sont montées au créneau
et non la SACEM, cest parce que les auteurs adhérant
à la SACEM lui cèdent leurs uvres
au moment de leur adhésion et quils ne seront
donc pratiquement jamais concernés par les dispositions
de lUnedic puisquil ny a pas de contrat
de cession de droit particulier pour chaque uvre,
alors même que ce sont eux qui perçoivent
le plus de droits.
Monsieur AILLAGON écrit que les droits dauteur
ayant un caractère patrimonial, " leur
perception ne saurait remettre en cause le droit à
indemnité chômage justifié par les
cotisations prélevées sur la base des salaires
ou cachets perçus par la même personne
".
Largument de Monsieur AILLAGON ignore totalement
le fondement des allocations chômage. Sa position
nest valide que lorsque les droits dauteur
sont versés aux héritiers des auteurs décédés.
En ce qui concerne les auteurs contemporains, il est en
totale contradiction avec la position traditionnelle française
visant à assimiler les droits dauteur à
des salaires et à offrir aux auteurs une protection
équivalente à celle des salariés.
Ainsi, larticle L. 282-3 du code de la sécurité
sociale énonce que " les revenus tirés
de leur activité dauteur à titre principal
ou accessoire (
) sont assujettis aux cotisations
dassurance sociales et dallocations familiales
dans les mêmes conditions que des salaires(
)".
Lorsque les auteurs sont malades, ils perçoivent
un revenu de remplacement qui est fonction de lensemble
de leurs revenus dauteur réels sans quil
soit nécessaire daller rechercher la date
du contrat de cession de droit à lorigine
du revenu.
Pour le droit à affiliation des auteurs à
la sécurité sociale dans le cadre du régime
général, cest également lensemble
des revenus de droits dauteur qui sont convertis
en équivalant horaires sur la base du SMIC afin
de valider chaque année un nombre dheures
ouvrant droit à affiliation à la sécurité
sociale.
Il nest pas possible dexiger que le régime
Assedic des artistes et techniciens du spectacle reste
au sein du régime général de lUNEDIC,
et de refuser la prise en compte pourtant légitime
des droits dauteur (sans même parler des droits
à rémunération secondaire des artistes)
dans ce revenu lorsquil convient de calculer le
droit à indemnité au titre de lARE.
Le ministre considère les revenus dauteur
comme des revenus dactivités lorsque cela
arrange les auteurs et le refuse lorsque cela risquerait
de les faire participer à la solidarité
nationale.
Si les revenus des auteurs nétaient pas des
revenus dactivités, ils ne seraient soumis
ni à TVA, ni à la CSG-CRDS, ni à
cotisations dassurances sociales.
En ce qui concerne les revenus des artistes liés
à lexploitation secondaire de leurs uvres,
le code de la propriété intellectuelle énonce
lui aussi clairement que les autorisations et les rémunérations
auxquelles elles donnent lieu sont régies par les
dispositions du code du travail, lequel nexclut
de la qualification salariale que les rémunérations
salariales dépassant les barèmes et minimums
syndicaux. Ces rémunérations devraient logiquement
être prises en compte dans le droit à allocation
des demandeurs demploi et générer
des cotisations lorsquelles ont une nature salariale.
Lactualité récente révèle
que la presque totalité des artistes ignorent quils
sont des salariés. Ce nest que lorsque Johnny
Hallyday saisit les prudhommes que lon découvre
le problème.
Dans la pratique, les salariés techniciens ou artistes
pouvant par ailleurs prétendre à une qualification
dauteur négocient une rémunération
globale et se font payer le maximum de rémunération
en droit dauteur (une fois les droits au chômage
assurés)
Un certain nombre de députés de tous bords
se sont rangés aux côtés de ceux qui
veulent renégocier les accords. Ces élus
sont le plus souvent responsables de villes qui gèrent
des entreprises de spectacles et des festivals.
Le rapport Gourinchas sur laudiovisuel public a
en effet montré que le déficit du régime
ne provient pas de laudiovisuel public. Cest
en effet le secteur du spectacle vivant qui est la source
première de ce déficit. Or, il est presque
intégralement contrôlé par le ministère
de la culture et les collectivités locales.
De plus, lorsque les collectivités locales gèrent
en direct leurs activités de production et de diffusion
de spectacles, elles ont la possibilité de cotiser
aux Assedic et de faire ainsi relever leurs salariés
du régime des intermittents financé par
lUnedic, alors même quelles peuvent
recourir à des contrats à durée déterminée
de façon beaucoup plus souple que les entreprises
de droit privé, puisque les artistes et techniciens
quils embauchent relèvent du droit de la
fonction publique et non du code du travail.
Ces mêmes villes financent des festivals par le
recours à des entreprises de spectacle de droit
privé, dirigées parfois par les élus.
Ces entreprises nont aucune indépendance
et les villes savent quelle seraient condamnées
en cas de dépôt de bilan. Ces festivals sont
de plus sous la dépendance économique de
ces mêmes syndicats qui leur demandent de soutenir
leur lutte (par lintermédiaire des subventions
des sociétés dauteurs et dartistes
et dautres institutions).
Le ministre de la culture a exigé du MEDEF et de
la CFDT quelles acceptent de maintenir le régime
du spectacle et de laudiovisuel au sein des accords
UNEDIC. Une sortie du système aurait en effet obligé
les pouvoirs publics à faire les comptes et à
poser la question du financement de la politique culturelle
de lÉtat.
La guerre à lintelligence est surtout une
guerre dont les armes sont des mensonges et des masques,
persuadé que personne nira jamais analyser
la réalité du secteur.
Les partenaires sociaux majoritaires ont fait des efforts
considérables afin daccepter de continuer
à financer un régime dont ils nont
pourtant mis en exergue quune infime partie des
abus.
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