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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  


Commissions octroyant des subventions : obligations de transparence

Chaque mois, nous sélectionnons un article que nous mettons en ligne. Vous pouvez retrouver ces articles publiés chaque mois au sommaire.

Cet article a été publié au numéro 173 du mois de janvier 2008.

Dans le cadre d’un avis en date du 15 janvier 2008, la commission d’accès aux documents administratifs a rendu un avis qui ouvre une nouvelle brèche dans la notion d’exception culturelle telle que la pratique le ministère de la culture.

Un artiste plasticien avait déposé une demande de bourse de résidence dans le cadre de l’un des programmes initiés par l’association CulturesFrance.                                                                                                                                                                 
Ayant reçu une réponse l’informant que son dossier n’avait pas été accepté et ne contenant aucune motivation de cette décision de rejet d’aucune sorte, il avait sollicité du directeur de cette association le procès verbal « convoquant et énumérant les différents membres du jury », c’est-à-dire des informations relatives à la composition de la commission et à son mode de désignation et de fonctionnement, outre les entiers procès verbaux de la réunion de la commission-jury qui a donné lieu à la désignation des allocateurs de bourse, ainsi que les critères retenus en leur faveur, pour chacun des bénéficiaires, comme ceux ayant motivé le rejet du dossier des autres candidats.
Sa demande étant restée sans réponse, l’artiste a saisi la commission d’accès aux documents administratifs.

En effet, depuis l’ordonnance du 6 juin 2005 (1), sont considérés comme documents administratifs, et peuvent être sollicité par le biais de la procédure d’avis de la Commission d’accès aux documents administration (CADA), quel que soit le support utilisé pour la saisie, le stockage ou la transmission des informations qui en composent le contenu, les documents élaborés ou détenus par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées de la gestion d’un service public, dans le cadre de leur mission de service public.

La CADA a dans un premier temps examiné la question de sa compétence à rendre un avis concernant une association de droit privé. Elle a considéré « que l’association Culturesfrance, créée en juin 2006 par la fusion de l’association française d’action artistique (AFAA) et de l’association pour la diffusion de la pensée française (ADFP), et placée sous la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture et de la communication, qui, à eux deux, contribuent respectivement à hauteur de 65% et de 8,2 % à son budget ? Dans ces conditions, la commission considère que les documents relatifs à l’attribution de bourses de résidence dans le cadre de programmes culturels à l’étranger détenus par cette association, qui se rattachent à la mission de service public dont celle-ci est chargée, revêtent un caractère administratif ».

La commission examine ensuite plus précisément la demande de communication des procès verbaux de la commission chargée d’octroyer les bourses. Elle énonce que :
« La commission, qui a pu prendre connaissance d’un procès-verbal du « comité de sélection des lauréats des ateliers New Yorkais et de Triangle 2008 » mentionnant, notamment, le nom des participants des membres du jury du comité ainsi que l’identité des lauréats, prend note de ce qu’il n’existe aucun procès verbal commentant les nombreux dossiers non retenus. Elle estime que le procès verbal qui a été transmis, de même que toute autre pièce susceptible de satisfaire la demande de l’artiste demandeur, lui sont communicables de plein droit en application de l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978, sous réserve de l’occultation préalable des mentions couvertes par le secret de la vie privée de personnes tierces nommément désignées ou aisément identifiables, telles que la date de naissance, les coordonnées personnelles des personnes nommément désignées ou leur parcours professionel. La commission estime en revanche que, eu égard à la transparence qui doit présider à l’attribution de telles bourses et au souci légitime des candidats évincés de connaître les motifs du choix effectué par l’association, il n’y a pas lieu d’oculter, préalablement à la communication des documents, les mentions par lesquelles le comité ou le jury apporte une appréciation sur la valeur des candidatures, ni l’identité des lauréats ou des candidats non retenus

La commission a en conséquence émis un avis favorable à la communication des documents.

La CADA ne rend cependant qu’un avis, qui n’a pas valeur de titre exécutoire et n’a pas de caractère contraignant. Si l’association CultureFrance ne communique pas le document malgré cet avis, l’artiste doit désormais saisir le tribunal administratif du litige et demander que l’association soit condamnée à lui communiquer le procès verbal.

L’artiste pourra éventuellement s’interroger sur le mécanisme juridique qui « permet » à cette association selon la loi de 1901 de redistribuer sous former de bourse des subventions publiques, sur la légalité de la composition du jury, et sur la légalité du procès verbal qui octroie les bourses sans contenir aucune motivation.
En effet, outre que le fondement légal de cette association est des plus fragiles (2), sa mission de service public et sa nature de pouvoir adjudicateur l’obligent à respecter le principe de légalité. Elle ne peut en conséquence octroyer des bourses sans avoir mis en place un règlement définissant les critères d’octroi de ces bourses et que ce mécanisme de redistribution des subventions ait été approuvé par ses tutelles publiques.

Elle doit par ailleurs respecter l’obligation de motivation des décisions administratives. L’article 1er de la loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 impose que soit motivées « les décisions qui (…) refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions pour l’obtenir. »  La motivation exigée par cette loi doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.
L’absence de motivation d’une décision administrative qui aurait dû l’être permet d’invoquer sa nullité.

Il existe fort peu de jurisprudence sur ces questions. La longueur des procédures contentieuses, leur complexité et leur coût, explique qu’un artiste n’aura dans les faits qu’un intérêt personnel très faible à mener de telles procédures. Surtout, ce n’est pas en menant ce type d’action que l’artiste obtiendra la subvention ou l’aide sollicitée. Il peut éventuellement faire annuler les aides octroyées à d’autres, mais ne récupérera pas grand chose à titre personnel. Des syndicats professionnels indépendants pourraient initier ce type de procédure au nom de l’intérêt collectif et/ou individuel de leurs membres. Les artistes et les professionnels indépendants, dans leur globalité ont le plus grand intérêt à ce que les mécanismes de copinage et les corporatismes qui bloquent l’évolution de la culture française soient mis à bas et que l’espace culturel français soit libéré de la gangue dans laquelle elle se débat aujourd’hui. Cet avis de la CADA constitue une étape. Il en reste de nombreuses.

(1) Ordonnance du 6 juin 2005 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, Jo du 7 juin 2005, p. 10022. Cette loi a sensiblement modifié la loi n° loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal. C’est cette loi qui a mis en place la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) et la procédure de demande des documents.
(2) Ainsi que le relève le sénateur Louis DUVERNOIS, en introduction de sa proposition de loi relative à la création d’un établissement public CultureFrance, « la Cour des comptes a noté, s’agissant de l’ancienne AFAA, dans une enquête réalisée à la demande de la commission des Finances du Sénat par la Cour des comptes et présentée le 18 novembre 2006, que le statut formellement associatif, ne respectait « que de façon approximative les règles, mêmes les plus élémentaires, qui s’appliquent aux associations ». Ainsi, note-t-elle, l’AFAA, comme CulturesFrance, « n’est pas composée de membres adhérents acquittant une cotisation et constituant l’assemblée générale, dont doivent être issus le Conseil d’administration et, éventuellement, le bureau (...) ». De même, ne peuvent être considérées comme des assemblées générales, statutairement convoquées conformément au droit des associations au moins une fois par an pour adopter le compte de résultat et le budget, les réunions de membres cooptés par les deux ministères pourvoyeurs des fonds nécessaires au fonctionnement de l’association. Par ailleurs, la forme associative, choisie en 1922 avait pour objet de favoriser le recours au mécénat. Or, la part des subventions versées par les administrations à l’AFAA est restée constante autour de 80 % du total des recettes courantes de l’association, sans que les recettes du mécénat n’augmentent considérablement. » Document Sénat n° 126, Session ordinaire de 2006-2007, annexe au procès verbal du 18 décembre 2006.




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