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mois, nous sélectionnons un article que nous mettons
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Cet
article est issu de la rubrique questions écrites.
Nous sélectionnons chaque mois quelques questions
écrites posées par des députés
ou sénateurs. Nous publions la réponse qu'y
a apportée le ministre, et nous en faisons éventuellement
un commentaire, dans lequel nous complétons, parfois
de façon critique, ces questions et réponses.
Cet article a été publié au numéro
171 du mois de Novembre 2007
TVA : Subventions directement liée au prix d’opérations imposables
Question. - M. Jacques Legendre attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur l'application de l'instruction ministérielle 3A-7-06 n°100 du 16 juin 2006 qui redéfinit, conformément à la réglementation européenne, les règles d'application de la TVA sur les subventions. Dans sa partie II « application » point B 13 « subventions n'entretenant pas un lien direct avec le prix d'opérations imposables », elle précise à l'alinéa 3 que les subventions dites de fonctionnement, destinées à couvrir exclusivement une partie des frais d'exploitation d'un organisme, ne sont pas imposables. Les transports en commun sont concernés car l'équilibre de leur gestion provient souvent d'une subvention accordée par les collectivités locales, au premier rang desquelles figurent les intercommunalités souvent autorités organisatrices des transports. À l'appui de l'instruction ministérielle et de la récente jurisprudence européenne en matière de TVA, il apparaît donc possible de verser une subvention pour les transports collectifs sans que cette dernière fasse l’objet d'une taxation, car elle est la contrepartie partielle ou totale de la prestation demandée. Il s'étonne que les services des impôts n’en fassent pas application et souhaiterait qu'ils lui en indiquent les raisons. Il demande de bien vouloir préciser sa position sur cette question importante pour les collectivités, autorités organisatrices des transports. - Question transmise à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l'emploi.
Réponse. – (1) En matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), une somme, quelle que soit sa qualification (aides, subventions...), doit être soumise à la taxe dès lors qu'elle peut s’analyser soit comme la contrepartie d'une livraison de biens ou d'une prestation de services individualisée rendue au profit de la partie versante, soit comme le complément du prix de telles opérations. Constituent des subventions complément de prix, les sommes versées pour compléter le prix réclamé au public, dont les conditions d'attribution permettent d'établir, sans ambiguïté, l'existence d'un lien direct entre la subvention et les prix pratiqués par leur bénéficiaire, et dont le principe du versement existe avant l'intervention du fait générateur de l'opération dont elles constituent une partie du prix.
Lorsqu'une subvention présente le caractère d'une subvention complément de prix, elle suit les règles d'imposition des opérations dont elle complète le prix notamment pour ce qui concerne le taux. L'instruction administrative publiée au Bulletin officiel des impôts (BOI) le 16 juin 2006 sous la référence 3 A-7-06, a précisé cette notion de « subvention complément de prix » afin de tenir compte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE). S'agissant de la situation des services de transport public de voyageurs, il ressort du point 13 de cette instruction que ne constituent pas des subventions directement liées au prix d'opérations imposables, les subventions dites « d'équipement » qui sont, au moment de leur versement, allouées pour le financement total ou partiel d'un bien d'investissement déterminé, les subventions dites de « fonctionnement » qui couvrent exclusivement une partie des frais d'exploitation d'un organisme, les subventions dites « d'équilibre » allouées afin de compenser, a posteriori, un déficit d'exploitation et « le versement de transport » lorsqu'il est perçu par une collectivité locale qui exploite en régie directe son service de transport public de voyageurs. Mais en tout état de cause, le caractère taxable d'une subvention ne peut effectivement être établi si l'examen détaillé, au cas par cas, de l'intention des parties des modalités de versement des subventions et des circonstances qui sont à l'origine de leur versement, fait apparaître de manière non équivoque une relation entre la décision de la partie versante d'octroyer la subvention et la diminution des prix pratiqués par le bénéficiaire vis-à-vis de sa clientèle. Cet élément est à rechercher le plus souvent dans les conventions ou décisions d'attribution des subventions. Par ailleurs, dans la mesure où les exploitants de services de transport public de voyageurs (collectivités locales ou délégataires de services publics) réalisent en principe, au sein de leurs opérations entrant dans le champ d'application de la TVA, exclusivement des opérations soumises à la TVA, les subventions non imposables qu'ils seraient amenés à percevoir n'ont aucune incidence sur la détermination de leurs droits à déduction. Enfin, il est rappelé que lorsque les subventions non imposables à la TVA (à l'exclusion des subventions exceptionnelles et des subventions d'équipement) perçues par un exploitant de service de transport public de voyageurs autre qu'une collectivité locale (ou qu'un groupement de collectivités locales) excèdent 10 % de ses recettes totales de l'année précédente, celui-ci est redevable de la taxe sur les salaires dans les conditions prévues par les dispositions des articles 231-1 et suivants du code général des impôts
(instruction administrative publiée au BOI le 15 mai 2007 sous la référence 5 L-2-07).
Commentaire de Roland LIENHARDT, avocat au barreau de Paris
Les principes de l’assujettissement à la TVA des subventions présentés à l’occasion d’une question concernant les transports sont intégralement transposables aux services culturels.
Pour être qualifiée de « subvention directement liée au prix », une subvention doit satisfaire aux trois conditions cumulatives suivantes :
1. La subvention est versée par un tiers à celui qui réalise la livraison ou la prestation.
2. Elle en constitue la contrepartie totale ou partielle.
3. Elle permet au client de payer un prix inférieur au prix de marché ou, à défaut, au prix de revient.
Lorsque ces trois conditions sont réunies, les subventions sont soumises aux règles d'imposition (taux, exonération...) applicables aux opérations dont elles complètent le prix. Ces sommes qui ne constituent pas la contrepartie d'une opération imposable pour la partie versante n’ouvrent à cette dernière aucun droit à déduction de la TVA y afférente.
À la lumière des critères définis ci-dessus, constituent notamment des subventions directement liées au prix d’opérations imposables les subventions suivantes :
- les subventions versées à un organisateur de spectacles afin que ce dernier diminue, en deçà du prix de marché, les prix qu'il pratique vis-à-vis du public, et ce, en rapport avec le montant des subventions octroyées ;
L’instruction donne quelques exemples de subventions n’entretenant pas un lien direct avec le prix d’opérations imposables :
- les subventions qui sont, au moment de leur versement, allouées pour le financement total ou partiel d’un bien d’investissement déterminé ;
- les subventions dites « à l'achat », destinées à prendre financièrement en charge l'achat par le bénéficiaire de biens ou de services déterminés auprès d'un autre assujetti (ex. : subventions de l'Etat versées aux entreprises dans le cadre des aides à l'emploi, de l'implantation dans certaines zones défavorisées, « chèques conseils »...) ;
- les subventions dites de fonctionnement, destinées à couvrir exclusivement une partie des frais d'exploitation d’un organisme. Si ces sommes ont souvent une influence sur le prix de revient des biens livrés et des services fournis par l'organisme subventionné, elles ne constituent pas pour autant des subventions directement liées au prix de ces opérations
- les subventions d’équilibre versées à une entreprise afin de compenser a posteriori un déficit résultant de la conjoncture économique, d’erreurs de gestion imputables à l’entreprise ou de tout événement ne relevant pas de sujétions particulières qui lui auraient été imposées par un tiers ;
Attention, il convient d’avoir à l’esprit le principe dit « d’indépendance du droit », qui permet à chaque branche du droit d’avoir une certaine autonomie par rapport aux autres branches du droit.
En l’occurrence, le fait qu’une subvention a la nature de complément de prix et est assujettie à la TVA, n’autorise pas pour autant dans tous les cas à vendre en dessous du prix de revient, ce qui pourra être sanctionné au titre de la vente à perte.
Par ailleurs, une subvention de fonctionnement pourra relever de la qualification d’aide d’État et ne sera légale au-delà de certains montants que si elle a été valablement notifiée à la commission européenne ;
(1) QE S 25 octobre 2007, p. 1928.
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