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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  


Entreprises publiques : la subvention ne peut pas être discrétionnaire

Chaque mois, nous sélectionnons un article que nous mettons en ligne.

Cet article a été publié au numéro 166 du mois de mai 2007.


Un décret du 15 mai 2007 (1) marque une évolution capitale des mécanismes de financement de l’audiovisuel public. Ce qu’impose ce décret pour les entreprises publiques de l’audiovisuel, inspiré par la réglementation européenne, devra à très court terme être mis en place de façon similaire dans le secteur du spectacle vivant, et dans l’ensemble des secteurs culturels utilisant le mécanisme de la subvention avec ses innombrables variantes.

Ce décret énonce que le montant des ressources publiques qu’il est proposé d’allouer chaque année, dans le cadre de l’élaboration du projet de loi de finances, aux organismes du secteur public de la communication audiovisuelle en compensation des obligations de service public mises à leur charge ne doit pas excéder le coût d’exécution desdites obligations, en tenant compte des recettes directes ou indirectes tirées par chaque organisme de ces activités de service public.

Le décret précise que le coût d’exécution des obligations de service public doit être déterminé au moyen de comptes séparés établis conformément aux dispositions de la directive du 25 juin 1980 relative à la transparence des relations financières entre l’Etat et les entreprises publiques (2).

Le décret précise encore que les sociétés de l’audiovisuel public sont tenues de respecter les conditions normales du marché pour l’ensemble de leurs activités commerciales et que l’exécution de cette obligation fait l’objet d’un rapport annuel établi pour chacun des organismes de l’audiovisuel public. Ce rapport réalisé aux frais de l’organisme doit être réalisé par un organisme extérieur dont le choix est soumis à l’approbation du ministre chargé de la communication. Ce rapport est transmis à ce ministre, ainsi qu’à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Les entreprises de l’audiovisuel public, du fait de la subvention n’ont en effet pas le droit de vendre à perte, la subvention compense des obligations de service public, et ne peut avoir ni pour but, ni pour effet de permettre de fausser la concurrence en vendant en dessous du coût de revient de la prestation.


Ce texte fort bref, passé totalement inaperçu  dans la presse est d’une importance capitale. La France applique enfin au secteur de l’audiovisuel public les règles de concurrence européennes et la définition des subventions telles qu’issue des textes et de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes. Le risque du non-respect de ces dispositions est que les aides soient qualifiées d’aide d’État. L’audiovisuel étant un secteur concurrentiel, le financement public ne se justifie qu’en contrepartie de contraintes de missions de service public, lesquelles doivent être précisément quantifiées.

En application des textes européens, pour avoir la nature de subvention non soumise à la procédure des aides d’Etat, l’aide doit représenter une compensation à des obligations de service public précisément définies. La Cour de Justice des Communautés Européennes a détaillé ces critères dans son arrêt Altmark (3). Ils sont au nombre de 4 :
- l’entreprise bénéficiaire a effectivement été chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations ont été clairement définies ;
 - les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation ont été préalablement établis de façon objective et transparente ;
 - la compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations ;
- lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public, le niveau de la compensation nécessaire a été déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations.

Le Conseil d’État a fait application de cette jurisprudence notamment dans le contentieux de restitution des subventions du Centre d’Exportation du Livre Français (CELF). Dans son arrêt du 29 mars 2006 (n° 274923) il a énoncé que : “ pour écarter le moyen tiré de ce que les subventions versées au CELF avaient le caractère d’aides purement compensatoires d’obligations de service public susceptible, à ce titre, d’être soustraites à l’obligation de notification préalable à la Commission, instituée par l’article 88 paragraphe 3 précité du traité, la cour administrative d’appel a pu légalement se fonder d’une part sur ce qu’il n’était pas établi que le montant des aides n’excédait pas les charges résultant des obligations de service public imposées au CELF, et, d’autre part, sur ce qu’il n’avait pas été procédé à une définition préalable et transparente des bases de cette compensation ; que la cour administrative d’appel n’a ni dénaturé les pièces du dossier, ni inexactement qualifié les faits soumis à son appréciation en jugeant que les aides en cause n’avaient pas un caractère purement compensatoire d’obligations de service public et constituaient des aides d’Etat soumises à l’obligation de notification préalable à la Commission, imposée par l’article 88 paragraphe 3 du traité.

Il a rappelé qu’aux termes des stipulations de l’article 87 paragraphe 3 du traité instituant la Communauté européenne ; “ peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun : () d) les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans la Communauté dans une mesure contraire à l’intérêt commun ” et qu’aux termes de l’article 88 paragraphe 3 du même traité : la commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu’un projet n’est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l’article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue. L’État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale.

L’Etat qui entend soustraire les aides à l’audiovisuel du contrôle Européen et ne pas les considérer comme aide d’Etat a donc l’obligation de vérifier que ces aides correspondent bien à des subventions.

Une démarche similaire devra impérativement être mise en place pour l’ensemble des subventions du ministère de la culture, notamment dans le secteur du spectacle vivant, et des arts plastiques. D’autant qu’il existe désormais une procédure permettant à tout citoyen européen d’informer par internet la commission européenne des manquements à ces dispositions.

(1) Décret n° 2007-958 du 15 mai 2007, Jo du 16 mai 2007, p. 9360.
(2) Directive 80/723/CEE de la commission du 25 juin 1980 modifiée, transposée en France par l’ordonnance n° 2004-503 du 7 juin 2004.
(3) CJCE, 24 juillet 2003, C-280/00.



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