| Chaque 
                    mois, nous sélectionnons un article que nous mettons 
                    en ligne. 
 Cet article a été publié au numéro 
                    160 de du mois de novembre 2006.
 
 La loi sur le droit dauteur daoût 2006 
                    (1) réforme en profondeur le code de la propriété 
                    intellectuelle. Elle contient également un certain 
                    nombre de dispositions qui sintègrent dans le 
                    code du patrimoine (notamment les dispositions relatives au 
                    dépôt légal), mais également dans 
                    le code général des impôts (les dispositions 
                    relatives au crédit dimpôt pour dépenses 
                    de production duvres phonographiques).
 
 La loi complète le code de tout un ensemble de dispositions 
                    disparates qui viennent corriger les effets de situations 
                    sanctionnées par la jurisprudence de ces 25 dernières 
                    années qui ont souvent pour objet de corriger des applications 
                    excessives des principes du droit dauteur, rajoutant 
                    parfois des dispositions légales totalement inutiles 
                    qui ne viendront que compliquer la vie des professionnels. 
                    Cette loi continue à étendre les pouvoirs dintervention 
                    de ladministration du ministère de la culture 
                    qui se voit même confier une mission de commercialisation 
                    générale des uvres et des interprétations 
                    en ligne !
 
 Dans lensemble cette loi complique à outrance 
                    le droit dauteur et va encore élargir le fossé 
                    entre la pratique et un droit positif de plus en plus ignoré 
                    par le citoyen et de toute façon fort peu sanctionné 
                    par les juges.
 
 Nous continuons à vous en présenter chaque mois 
                    les nouvelles dispositions.
 
 Les droits des auteurs 
                    de plus en plus encadrés
 
 Larticle L. 111-1 contenait une disposition indiquant 
                    que le fait de créer une uvre dans le cadre dun 
                    contrat de travail nemportait aucune dérogation 
                    aux droits dauteur. Cette disposition est modifiée 
                    afin de tenir compte des exceptions de plus en plus nombreuses 
                    qui avaient été intégrées au code 
                    de la propriété intellectuelle ces dernières 
                    années. Outre les auteurs de logiciels, les auteurs 
                    duvres audiovisuelles ont des droits différents 
                    selon quil existe ou non un contrat de travail. La loi 
                    de 2006 corrige sur ce point une disposition quelque peu anachronique. 
                    Surtout, elle ouvre le terrain à la conventionnalisation 
                    du droit dauteur. En effet, le nouvel alinéa 
                    3 de larticle L. 132-25 permet désormais au ministère 
                    de la culture de rendre obligatoire à lensemble 
                    dun secteur dactivité les accords relatifs 
                    à la rémunération des auteurs conclus 
                    entre les organismes professionnels dauteur ou les sociétés 
                    de perception et de répartition des droits dauteur 
                    avec les organisations représentatives du secteur, 
                    à lidentique de ce qui existe en matière 
                    de conventions collectives et de rémunérations 
                    avec une différence de taille. Cest que les barèmes 
                    de rémunération organisés par les accords 
                    ou conventions collectifs sont des barèmes minimaux, 
                    ne sappliquant quà défaut de dispositions 
                    contractuelles plus favorables pour le salarié.
 
 Or, le nouvel article L. 132-25 ne pas fait dans la dentelle. 
                    Il indique que les accords relatifs à la rémunération 
                    des auteurs peuvent être rendus obligatoires, sans autre 
                    précision. Que reste-t-il de la liberté contractuelle 
                    ?
 
 Un auteur conservera-t-il le droit de négocier une 
                    rémunération plus conséquente que celle 
                    prévue par laccord collectif ? Ce sera aux tribunaux 
                    de répondre.
 
 De plus cette disposition est en exacte contradiction avec 
                    une autre disposition nouvelle insérée par la 
                    loi, celle de larticle .122-7-1 qui énonce que 
                    " Lauteur est libre de mettre ses oeuvres gratuitement 
                    à la disposition du public, sous réserve des 
                    droits des éventuels coauteurs et de ceux des tiers 
                    ainsi que dans le respect des conventions quil a conclues. 
                    "
 
 La notion de mise à disposition du public nest 
                    pas clairement définie. Que signifie-t-elle exactement 
                    ?
 
 En effet, larticle L.122-2 du CPI définit le 
                    droit de représentation comme la communication de luvre 
                    au public par un procédé quelconque.
 
 Larticle L. 122-3 définit quant à lui 
                    le droit de reproduction comme la fixation matérielle 
                    de luvre par tous procédés qui permettent 
                    de la communiquer au public dune manière indirecte.
 
 Jusquà maintenant, cette distinction permettait 
                    de classifier lensemble des exploitations. Elle est 
                    importante puisque larticle L. 131-3 du CPI, non modifié, 
                    énonce toujours que " Les contrats de représentation, 
                    dédition et de production audiovisuelle définis 
                    au présent titre doivent être constatés 
                    par écrit. Il en est de même des autorisations 
                    gratuites dexécution. "
 
 Un juriste moyennant intelligent aurait donc pu penser quil 
                    nétait pas nécessaire de rajouter quoi 
                    que ce soit aux dispositions antérieures, et que larticle 
                    L. 131-3 du CPI autorisait déjà la conclusion 
                    dun contrat gratuit, sous réserve de respecter 
                    le formalisme inhérent aux contrats dexploitation 
                    des auteurs, à même de permettre dattirer 
                    lattention de lauteur sur les conséquences 
                    de son accord de gratuité.
 
 Or, le nouvel article L. 122-7-1 ne figure pas dans le Titre 
                    II consacré à lexploitation des droits, 
                    mais dans le Titre I consacré à lObjet 
                    du droit dauteur. Comprenne qui pourra !
 
 Faut-il conclure de linsertion de cette nouvelle notion 
                    de " mise à disposition du public " et son 
                    mode particulier dexploitation à titre gratuit 
                    quelle englobe les anciens droits de représentation 
                    et de reproduction ?, ou sagit-il dune notion 
                    nouvelle uniquement limitée à la mise en ligne 
                    en vue de lécoute et/ou du téléchargement, 
                    deux notions qui relèvent pourtant pour la première 
                    du droit de représentation, et pour la seconde du droit 
                    de reproduction.
 
 Cette nouvelle disposition censée reconnaître 
                    la liberté des auteurs, est dune totale hypocrisie. 
                    Dans la pratique, les producteurs et le ministère de 
                    la culture qui contrôle une part conséquente 
                    des entreprises de production française, vont systématiquement 
                    imposer aux jeunes auteurs dautoriser gratuitement la 
                    mise à disposition du public de leurs uvres, 
                    en collant aux dispositions de cet article L. 122-7-1 dune 
                    simplicité rédactionnelle extrême.
 
 Cette mesure na absolument rien de libéral. Il 
                    sagit uniquement de la liberté du fort de manger 
                    le faible. Les auteurs français qui ne sont pas protégés 
                    par le droit du travail, sont avec cette disposition de moins 
                    en moins protégés par le droit dauteur.
 (1) 
                      Loi n° 2006-961 du 1er août 2006, Jo du 3 août 
                      2006. Droit de reproduction à usage commercial et professionnel 
                      réservé.
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