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                      mois, nous sélectionnons un article que nous mettons 
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 Cet 
                      article a été publié au numéro 
                      153 de Mars 2006 . 
 Le décret du 3 mars 2006 modifie les modalités 
                      de versement des aides dÉtat à laudiovisuel 
                      pour les mettre en adéquation avec le droit européen(1). 
                      En effet, malgré la reconnaissance de lexception 
                      culturelle dans le traité CE (article 87§3 d) 
                      autorisant le versement daides dÉtat 
                      à la production audiovisuelle, ces aides ne sont 
                      pas exemptes de respecter les règles européennes 
                      relatives à la libre concurrence.
 
 La dérogation culturelle au principe de linterdiction 
                      des aides dÉtat
 
 Les activités culturelles sont soumises à 
                      lexamen des aides dÉtat prévu 
                      par le Traité CE aux articles 87 et 88. Les aides 
                      dÉtat sont définis par le Traité 
                      CE comme :
 
 - Des aides financières dorigine étatique 
                      (taxe perçue sur lexploitation des salles de 
                      cinéma)
 - Des aides fixées par voie légale
 - Des aides qui faussent ou menacent de fausser la concurrence
 - Des aides sélectives, elles ne sont versées 
                      quà certaines productions audiovisuelles (en 
                      raison de la nationalité du producteur, réalisateur, 
                      ou de la qualité artistique, innovante de luvre,...).
 
 Ces aides données par lÉtat sont généralement 
                      interdites en vertu de larticle 87 du Traité 
                      CE, car elles faussent ou menacent de fausser la concurrence. 
                      Les États sont donc obligés de notifier préalablement 
                      à la Commission les aides dÉtat quils 
                      désirent verser, selon larticle 88§ 3 
                      c du Traité CE pour obtenir son autorisation.
 
 Pour que les aides dEtat soient autorisées 
                      sans notification préalable de la Commission européenne, 
                      il faut quelles soient inférieures à 
                      un montant défini ou quelles entrent dans le 
                      cadre de la dérogation culturelle.
 
 Lexception culturelle
 
 Les aides dÉtat en faveur du secteur de laudiovisuel 
                      entrent dans le cadre de larticle 87§3 d) du 
                      Traité :
 
  (...) 3. Peuvent être considérées 
                      comme compatibles avec le marché commun: (...)
 d) les aides destinées à promouvoir la culture 
                      et la conservation du patrimoine, quand elles naltèrent 
                      pas les conditions des échanges et de la concurrence 
                      dans la Communauté dans une mesure contraire à 
                      lintérêt commun, (...) 
 
 Ladmission de cette exception culturelle est conditionnée 
                      au respect du principe de légalité général 
                      et des critères de compatibilité spécifiques 
                      à ce secteur. En raison de lobligation pour 
                      les États membres de lUnion européenne 
                      de respecter la légalité générale 
                      du Traité CE, les aides dÉtat concernant 
                      lindustrie cinématographique et la production 
                      audiovisuelle ne doivent pas créer de discrimination 
                      entre les nationaux des États membres. En effet, 
                      les principes de libre circulation des personnes et de libre 
                      prestation des services interdisent un traitement différencié 
                      entre les citoyens européens. Les États ne 
                      doivent pas conditionner leurs aides en raison de la nationalité 
                      des travailleurs, de la production de luvre 
                      dans le pays et de la réalisation du film dans la 
                      langue du pays.
 
 De plus, les aides dÉtat à la production 
                      audiovisuelle doivent répondre aux conditions posées 
                      par la Commission pour admettre la dérogation culturelle 
                      prévue à larticle 87§ 3, point 
                      d) du traité CE (2) :
 - Il faut que le produit soit culturel selon des critères 
                      définis au niveau national,
 - En excluant le financement des activités spécifiques 
                      qui sont considérées comme des aides directes 
                      à lindustrie :  les suppléments 
                      daide destinées à des activités 
                      spécifiques de production de films (par exemple la 
                      postproduction) ne sont pas autorisées, afin de garantir 
                      que laide ait un effet dincitation neutre et, 
                      par conséquent, que leffet de protection/dattraction 
                      de ces activités spécifiques dans lÉtat 
                      membre qui accorde laide soit évité  
                      (3).
 - La condition de territorialisation des dépenses 
                      (que les dépenses pour luvre soient réalisées 
                      dans lÉtat qui verse laide) doit être 
                      limitée à 80 %.
 - Laide versée doit se limiter à 50 
                      % du budget de production. Une exception est admise pour 
                      les films difficiles et à petit budget.
 
 Le montant limite des aides dÉtat
 
 La commission a fixé dans son règlement du 
                      12 janvier 2001 (4) le plafond en dessous duquel les aides 
                      dÉtat ne sont pas soumis au régime de 
                      larticle 87 du Traité CE, qui oblige à 
                      la déclaration préalable à la Commission 
                      européenne, parce quelles naffectent 
                      pas la concurrence en raison de leur faible montant.
 
 Les aides ne doivent pas excéder 100 000 euros sur 
                      une période de trois ans par entreprise.
 
 Ladaptation du droit interne 
                      au droit communautaire
 
 Tirant les conclusions de la réglementation européenne 
                      sur les aides dÉtat et plus particulièrement 
                      du règlement du 12 janvier 2001, le décret 
                      du 3 mars 2006 (5) modifie le régime 
                      des aides dEtat à la promotion des uvres 
                      audiovisuelles à létranger.
 
 Les aides supprimées
 
 Certaines aides sont supprimées comme lallocation 
                      complémentaire pour la promotion des uvres 
                      à létranger qui était de 25 % 
                      du montant des sommes investies par lentreprise de 
                      production à la condition que les uvres remplissent 
                      des conditions de réalisation, notamment artistiques 
                      et techniques (6).
 
 Les aides limitées dans leur montant
 
 Certaines aides sont limitées à 100 000 euros 
                      par entreprise pour 3 ans, les aides dites de promotion 
                      versées aux entreprises de promotion et de distribution 
                      (7), la subvention versée par 
                      le Centre National de la Cinématographie (CNC) pour 
                      la formation (8), la subvention du 
                      CNC pour lutilisation de nouvelles technologies images 
                      et son pour les uvres cinématographiques de 
                      longue durée (9) et pour les 
                      uvres cinématographiques de courte durée 
                      (10) et les subventions spécifiques 
                      versées à certaines entreprises de distribution 
                      (11) que sont les cinémas dart et dessai 
                      (catégorie définie à larticle 
                      1er du décret n° 91-1131 du 25 octobre 1991(12)), 
                      lorsque leur travail est de qualité.
 
 Les aides aux conditions moins 
                      limitatives
 
 Pour dautres aides, une diminution de la condition 
                      de territorialisation de luvre est introduite 
                      par le décret. La condition de territorialisation 
                      du film est limitée : pour les aides dinvestissement, 
                      de garanties de prêt et de promotion lorsque luvre 
                      a été produite dans le cadre dune coproduction 
                      internationale et que la participation française 
                      est inférieure à 80 % de son coût définitif. 
                      Cette uvre doit faire lobjet de dépenses 
                      de production en France à un taux réduit de 
                      30 % à 24 % (13). Les aides 
                      de réinvestissement aux entreprises de production 
                      étaient majorés de 25 % si les dépenses 
                      de production étaient intégralement réalisées 
                      en France, le décret de 2006 réduit la condition 
                      de territorialisation à 80 % pour bénéficier 
                      de la majoration (14). Et cest 
                      uniquement 80 % des dépenses dans le budget de la 
                      production des uvres audiovisuelles effectuées 
                      en France qui sont prises en compte pour le calcul du soutien 
                      (15). Enfin, larrêté 
                      du 3 mars 2006 (16) modifie larrêté 
                      du 3 mai 1995 (17), laide nest 
                      plus subordonnée au fait que les prestataires techniques 
                      de luvre soient établis en France.
 
 Plus généralement, une plus grande souplesse 
                      dans les règles de versement des aides dEtat 
                      est apportée. En effet, les aides dÉtat 
                      aux entreprises pour la promotion et la vente à létranger 
                      des uvres audiovisuelles sont fixées en prenant 
                      en compte tous les frais généraux dépensés 
                      et plus uniquement les frais techniques (18). 
                      Le champ des aides pour les frais techniques dus à 
                      la fabrication dinstruments de promotion et pour les 
                      promotions spéciales est élargi, à 
                      la place dune liste limitative des frais pouvant faire 
                      lobjet dune aide, larrêté 
                      de 2006 introduit une liste non exhaustive de frais. Le 
                      texte indique :  notamment : 
                      doublage, sous titrage.... Désormais, des aides à 
                      la fabrication dinstruments de production peuvent 
                      être versées pour des uvres de coproduction 
                      et de préachat avec des entreprises établies 
                      à létranger quand la promotion est faite 
                      dans la langue du pays coproducteur et acheteur 
                      .
 
 Il est intéressant de noter que si la réglementation 
                      organisant les aides en matière audiovisuelle est 
                      désormais en phase avec la réglementation 
                      européenne, dans le domaine du spectacle, la réglementation 
                      des aides dÉtat au regard du droit européen 
                      nest pas commencé, et nous sommes en présence 
                      dun vaste désert juridique. Il serait intéressant 
                      danalyser la compatibilité de lensemble 
                      des dispositifs mis en place en ce domaine au regard des 
                      traités communautaires. Le résultat risque 
                      fort dêtre décapant.
 
 Nous présenterons le mois prochain de manière 
                      plus générale : la comptabilité 
                      du régime de droit français des aides dEtat 
                      au cinéma et à laudiovisuel avec la 
                      réglementation communautaire (décret n° 2006-324 
                      du 20 mars 2006, décision de la Commission européenne 
                      du 22 mars 2006).
 
 (1) Nous avons déjà traité 
                      ce thème dans la lettre n° 122 de mai 2003 
                      p.919, n°123 de juin 2003 p.934 et n°143 davril 
                      2005 p.1174.
 
 (2) Décision de juin 1998 sur 
                      le régime français daide automatique 
                      à la production de films et qui sont rappelés 
                      dans la communication de la Commission du 26 septembre 2001 
                      concernant certains aspects juridiques liés aux uvres 
                      cinématographiques et uvres audiovisuelles.
 
 (3) idem.
 
 (4) Règlement (CE) n°69/2001 
                      de la Commission du 12 janvier 2001 concernant lapplication 
                      des articles 87 et 88 du Traité CE aux aides de minimis.
 
 (5) Décret n° 2006-258 
                      du 3 mars 2006 JO du 5 mars 2006 p.3374.
 
 (6) Suppression de larticle 121 
                      du décret n° 99-130 du 24 février 
                      1999 relatif au soutien financier de lindustrie cinématographique.
 
 (7) Article 1er cinquième aliéna 
                      du IV du décret n° 95-110 du 2 février 
                      1995 relatif au soutien financier à la production, 
                      à la préparation et à la distribution 
                      duvres audiovisuelles.
 
 (8) Article 5 du décret n°98-35 
                      du 14 janvier 1998 relatif au soutien financier de lindustrie 
                      audiovisuelle.
 
 (9) Article 74 du décret n° 99-130 
                      du 24 février 1999.
 
 (10) Article 95 du décret n° 99-130 
                      du 24 février 1999.
 
 (11) Article 113 du décret n° 99-130 
                      du 24 février 1999.
 
 (12) Décret n° 91-1131 
                      du 25 octobre 1991 portant définition et classement 
                      des salles de spectacles cinématographiques dart 
                      et dessai.
 
 (13) Article 4 au 2° du III, décret 
                      n° 95-110 du 2 février 1995.
 
 (14) Article 6 cinquième alinéa 
                      du III, décret n° 95-110 du 2 février 
                      1995.
 
 (15) Nouveau article 8-1, décret 
                      n° 95-110 du 2 février 1995.
 
 (16) Arrêté du 3 mars 
                      2006 JO du 5 mars 2006 p.3375.
 
 (17) Arrêté du 3 mai 1995.
 (18) 
                      Article 1er deuxième aliéna du V, décret 
                      n° 95-110 du 2 février 1995.
 Droit 
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