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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Chômage :
indemnisation des professionnels du spectacle

Chaque mois, nous sélectionnons un article que nous mettons en ligne.

Cet article a été publié au numéro 146 de juillet 2005 dans la rubrique "les réponses des ministres aux questions des parlementaires". Nous opérons une sélection de ces questions au journal officiel et en réalisons un commentaire lorsque cela se justifie.

Question. - M. Henri Nayrou appelle l’attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la prise en compte par les Assedic des heures d’enseignement des intermittents du spectacle intervenant par l’intermédiaire d’employeurs associatifs. En effet, dans la plupart des cas, les Assedic ne prennent pas en compte les interventions des intermittents du spectacle salariés par des associations et plus précisément par des associations intermédiaires, pour le calcul du quota d’heures leur permettant d’accéder ou de conserver le statut d’intermittent du spectacle. Cette situation provoquée par une interprétation restrictive de la circulaire de l’Unedic n° 04-25 du 30 décembre 2004, article 2.1.2.2.2, pénalise fortement les personnes relevant de l’insertion par l’activité économique (IAE) et les incite à recourir à des solutions illégales. Dans le cadre de leur mission de structuration de l’emploi, des associations intermédiaires mettent à disposition des artistes relevant de l’IAE, pour des interventions dans des établissements de l’éducation nationale ou du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative (écoles, CLAE, CLSH, contrats éducatifs locaux et autres établissements). Ces établissements restent les employeurs commettants. L’article 2.1.2.2.2 de la circulaire n° 04-25 de l’Unedic devrait faire l’objet d’une modification en prenant comme référence l’employeur commettant pour la prise en compte des heures d’interventions dans ces établissements, que le contrat de travail soit direct ou par le biais d’un intermédiaire. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser la position du Gouvernement en la matière.

Réponse. (1) - La charte pour l’emploi dans le spectacle proposée à la signature des professionnels du secteur et des collectivités territoriales engage les futures parties signataires à déterminer ensemble, le cadre dans lequel doit être définie la part pertinente des actions de formation dispensées par les artistes et techniciens du spectacle. Cette mission fait en effet partie intégrante des métiers des artistes et techniciens, au titre de la nécessaire et irremplaçable transmission de leur savoir et de leur expérience, dans le cadre de la formation professionnelle ou de l’éducation artistique. C'est à partir de ces réflexions que pourront être précisées les conditions de financement de ces activités et modalités techniques de leur prise en compte dans le dispositif d’assurance-chômage qui sera défini pour le 1er janvier 2006. D’ores et déjà, à compter du 1er janvier 2005, les modalités du fonds spécifique transitoire financé par l’État ont permis la prise en compte des heures de formation dispensées par les artistes et les techniciens à hauteur de 120 heures, dans certains établissements.

Commentaire de Roland LIENHARDT (rédacteur en chef de Nodula) : nous touchons là à un des problèmes essentiels du conflit actuel. En effet, les collectivités territoriales et les établissements d’enseignement artistique utilisent un grand nombre d’intervenants artistiques. Normalement, ce personnel devrait avoir un statut de contractuel de droit public.

Afin de permettre à ces personnes de bénéficier des Assedic, les administrations passent par des associations intermédiaires qui leur font des factures et salarient ensuite ces artistes. Dans la plupart des cas, ces associations ne sont que des associations fictives, constituées de prête-noms et dont l’unique objet réel est de salarier l’animateur-artiste de l’association qui est en réalité chef d’entreprise.

Il convient de rappeler que l’article L. 762-1 du code du travail écarte la présomption de salariat des artistes lorsque ceux-ci interviennent dans des conditions impliquant leur inscription au registre du commerce, ce qui est le cas lorsque l’artiste est en réalité le chef d’entreprise.

Ce qui est le plus scandaleux, c’est que le tarif auquel les prestations dans les écoles sont payées rend obligatoire le recours aux Assedic. En effet, alors qu’une intervention nécessite un temps de préparation et de répétition, le cachet offert ne couvre que le temps de la prestation et ne permet aucunement de rémunérer la préparation. Les administrations ne vérifient d’ailleurs jamais que ces associations intermédiaires salarient réellement les artistes et elles savent pertinemment que cela n’est pas possible étant donné le tarif des animations.

Ce n’est pas pour rien que les élus des collectivités territoriales ont été les premiers à lâcher Aillagon, ils savent pertinemment qu’ils ont besoin des Assedic pour financer les animations dans leurs communes.
De fait, ce sont les salariés du régime général qui financent des artistes chefs d’entreprises afin de leur permettre de travailler à bas tarif pour des entreprises publiques…

La réponse du ministre est un parfait exemple de la langue de bois technocratique. Le projet de protocole d’accord sur l’emploi dans le spectacle qu’il présente comme la solution à tous les problèmes est le prototype de document creux qui a pour seul but de faire que rien ne change jamais. Évidemment, seuls sont invités à la discussion les syndicats associés à l’action du ministère.

Les dispositions de cette charte sont un monument de mauvaise foi. Les pouvoirs publics promettent de lier les aides publiques au respect du droit du travail alors que dans la pratique, ils favorisent largement et continuent à développer le para-commercialisme et le travail dissimulé, en évitant soigneusement toute possibilité de structuration et de professionnalisation du secteur afin que producteurs et artistes aient toujours plus besoins de la manne publique et soient toujours plus dépendants de subventions. Les inspecteurs du ministère de la culture continuent à subventionner des entreprises en sachant pertinemment que les répétitions ne sont pas payées et que les emplois permanents sont financés par les Assedic. Au plus haut niveau de l’administration des établissements publics culturels, on engage des permanent sur des CDD, quant on ne les paie pas en droit d’auteur.
Les seules qui subissent réellement les contrôles et la pression des directions du travail, ce sont les entreprises de spectacles indépendantes et non subventionnées, qui voient leurs possibilités d’intervention de plus en plus restreinte ou de plus en plus risquée. Le ministère de la culture et les syndicats qui contrôlent le marché sortent donc renforcés de cette crise qui leur profite en supprimant encore un peu de ce qui reste d’activité culturelle indépendante.

Le protocole d’accord sur l’emploi s’attache ensuite à démontrer que le mécanisme d’indemnisation du chômage du spectacle et de l’audiovisuel au sein de la solidarité interprofessionnelle mais les mêmes s’offusquent lorsque l’on ose envisager que les professionnels du spectacle participent à la solidarité interprofessionnelle en déclarant leurs revenus d’activités ayant la nature de droits d’auteur ou leurs redevances d’artistes.

Le protocole d’accord contient ensuite des articles insistant sur le respect des conventions collectives et du code du travail alors que les collectivités locales qui embauchent des artistes ne relèvent pas du code du travail. De plus, la politique d’extension des conventions collectives menée depuis 1992 a eu pour effet de paupériser toute une partie de la production qui n’a absolument pas les moyens de respecter le niveau des protection établi par ces conventions qui relèvent pour certaines d’entre elles d’une logique protectionniste et anti concurrentielle. Comment exiger le développement de ces conventions alors que la plupart des entreprises ont déjà du mal à respecter les règles de base du code du travail, lequel est de plus largement inadapté aux réalités de la production artistique.

De plus, dans le secteur du spectacle, comme ailleurs, il faudrait instituer des seuils, ne rendre les conventions collectives qu’à partir d’un certain chiffre d’affaires, de l’ancienneté de l’entreprise, d’un nombre de salariés minimum afin de ne pas nuire au développement des nouveaux créateurs et des nouveaux producteurs.

Des secteurs entiers de la création artistique vivent en dehors du droit et tous les professionnels le savent. Le fossé entre les discours des institutions publiques et des syndicats d’une part et la réalité d’autre part n’a jamais été aussi profond.

Il faut oser relire les discours de la plupart des syndicats et coordinations officielles qui prédisaient en 2003 la sortie du système de 25 à 30 % des salariés. Tout cela était totalement faux, et nous l’avons toujours soutenu.
Étant donné que tout le monde triche, ou presque. À partir du moment où l’on change les règles, il suffit d’adapter les règles de détournement aux nouvelles données, ce qui a été fait dès janvier 2004 et les sorties du système n’ont guère été plus importantes que les autres années, il existe en effet un " turn-over " naturel dans les professions du spectacle.

Le système social des secteurs du spectacle est d’ailleurs à l’image de la politique de l’emploi suivie par les pouvoirs publics en général, quels que soient les gouvernements. Le protocole pour l’emploi met en avant l’importance du financement public et des interventions institutionnelles, notamment dans les politiques de formation. Au lieu de simplifier le droit et le coût de la gestion des emplois pour les entreprises culturelles, on crée ou développe encore des agences intermédiaires, qui ne satisfont vraiment que les syndicalistes et les fonctionnaires qui y trouvent des emplois et du pouvoir, et qui captent toujours plus d’argent public au détriment des initiatives indépendantes et de la création artistique.

Ce n’est pas de conventions collectives dont a besoin le secteur, c’est de simplification et d’adaptation des lois à la réalité du secteur, ce qui ne peut pas se faire au niveau conventionnel.

Il n’est pas certain que la diversité culturelle sorte renforcée de cette stratégie institutionnelle qui ne repose que sur du très court terme et la défense des intérêts corporatifs acquis sans aucune prise en compte de l’intérêt général et de la défense de l’identité et de la diversité culturelle française. En effet, les syndicats et le ministère de la culture continuent à défendre une politique de nature clientéliste et mafieuse dans laquelle l’État de droit n’a pas sa place. Cette politique n’a pas d’avenir, elle a atteint ses limites, il s’agit d’une insulte à la démocratie qui plombe la culture française.


(1) QAN 7 juin 2005 p. 5841.



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