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Délégations de services publics : obligations de mise en concurrence : le droit français en porte-à-faux avec le droit européen

Chaque mois, nous sélectionnons un article que nous mettons en ligne

Cet article a été publié au numéro 137 d'octobre 2004


Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service (1). La loi SAPIN (2) est venue préciser que les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes (3). Une décision du Conseil d'Etat du 3 mai 2004 est venue préciser que cette procédure s'applique aux seules délégations consenties par voie contractuelle (4), ce qui implique que les délégations consenties par acte unilatéral de l'administration, notamment par agrément ne sont soumises à aucune mise en concurrence. L'intérêt de cette décision et d'établir a contrario, que les délégations consenties par l'État dans un cadre contractuel sont quant à elles soumises à la procédure de mise en concurrence de la loi SAPIN. Nous préciserons également les évolutions possibles de cette question, il semble en effet que réglementation et jurisprudence française ne soient pas totalement en phase avec la position de la Commission des Communautés européennes et les traités.

Les dérogations légales à l'obligation de mise en concurrence
II est sans doute utile de rappeler, qu'indépendamment du caractère contractuel ou unilatéral de la délégation de service public, l'obligation de mise en concurrence ne s'applique pas aux délégations de service public dans les cas suivants :

a. Lorsque la loi institue un monopole au profit d'une entreprise. Il en est ainsi de l'institut national de la recherche archéologique préventive (INRAP) ;

b. Lorsque le service est confié à un établissement public et à condition que l'activité déléguée figure expressément dans les statuts de rétablissement. Il en est ainsi des Théâtres nationaux ou des musées créés sous forme d'établissement public industriel et commercial, et dont la mission est clairement définie à leurs statuts ;

c. Lorsque le montant des sommes dues au délégataire pour toute la durée de la convention n'excède pas 106 000 Euros ou que la convention couvre une durée non supérieure à trois ans et porte sur un montant n'excédant pas 68 000 Euros par an. Toutefois, dans ce cas, le projet de délégation est soumis à une publicité préalable et le contrat de délégation doit respecter les obligations de formes et de contenu prévues à l'article L. 1411-2 du CGCT.

Toutefois, le principe même de cette dérogation légale est contesté par la Commission qui considère que " les règles relatives au marché intérieur, y compris les règles et les principes en matière de marchés publics et de concessions, s'appliquent à toute activité économique, c'est-à-dire à toute activité qui consiste à offrir des services, des biens ou des travaux sur un marché, même si ces services ou biens visent à assurer un service public tel que défini par un Etat membre. " (5)

A titre d'exemple, il ne nous semble pas sérieusement contestable que les activités de production et de diffusion de spectacles s'analysent comme des activités économiques. L'article L. 110-1 du code de commerce considère que toute entreprise de spectacles publics est réputée commerciale. En conséquence, même structurés sous forme d'établissement public industriel et commercial, ainsi des EPCC (6), il n'est pas certain que ces établissements gestionnaires d'entreprises de spectacles et titulaires à ce titre de délégations de service public ne devraient pas être soumis aux principes de mise en concurrence. D'autant que la multiplication de ces établissements publics pourrait également être considérée comme une entrave au marché sur le plan du droit européen. Cela est d'autant plus vrai que le ministère de la culture développe ces activités économiques en revendiquant une politique de réseaux. La jurisprudence en ce domaine reste à créer.

Une dérogation générale : Le mécanisme d'agrément
L'article 1411-1 du CGCT précise que la délégation de service public est un contrat. L'administration française, comme le Conseil d'Etat qui en est une émanation, considère que les délégations de service public concédées par voie d'acte unilatéral de l'administration n'ont pas à être précédées d'une mise en concurrence et ne sont pas tenues au respect des dispositions de la Loi SAPIN, même si un contrat vient organiser la gestion du service.

Le Conseil d'État a considéré que si l'agrément résulte d'un texte légal ou réglementaire que le législateur a pris en considération d'un motif d'intérêt général, les décisions unilatérales prises par l'administration en application de ces textes, par lesquels elle confie à un tiers des missions de service public ont un caractère réglementaire. Par conséquent, la procédure définie par la loi SAPIN, ne s'applique qu'aux seules délégations consenties par voie contractuelle, " alors même que cet agrément a impliqué la conclusion ultérieure d'une convention pour fixer, dans des conditions qui ne conduisent pas à la requalifier en décision unilatérale, certaines modalités de gestion du service et que le gestionnaire est exclusivement rémunéré par les usagers. "

Le Conseil d'État a en conséquence considéré que la convention conclue avec le délégataire du service ne venait que préciser les modalités de gestion du service qui avait été concédé uniquement dans le cadre de l'agrément qui constituait bien un acte unilatéral, que son texte aurait pu être annexé à l'agrément sans en changer la nature, et qu'il n'y avait pas eu de négociation de nature contractuelle entre l'administration et le délégataire.

À contrario, quand la délégation de service public n'est concédée par l'administration qu'à l'issue de la conclusion d'une convention ayant fait l'objet d'une vraie négociation et organisant des obligations réciproques, notamment quand la délégation est accompagnée d'un financement, d'obligations en termes de créations, d'animations, d'emplois, il nous semble qu'il s'agit bien d'un accord de nature contractuelle et que les procédures de mise en concurrence de la loi SAPIN doivent alors être respectées.

Selon la commission européenne, les délégations de service public consenties par contrat doivent toujours être précédées d'une mise en concurrence
Si la Cour de justice des communautés ne s'est pas encore prononcée sur la légalité d'une délégation de service public consentie par voie d'agrément, elle a en revanche pris position sur la question des dé légations de service public conclues dans un cadre contractuel. Dans un arrêt en date du 7 décembre 2000 (7), elle a considéré que les entités adjudicatrices (personnes publiques ou privées concédant un service public) concluant des contrats sont tenues de respecter les règles fondamentales du traité en général et le principe de non-discrimination en raison de la nationalité en particulier. En effet, ainsi que la Cour l'a jugé dans son arrêt du 18 novembre 1999, Unitron Scandinavia et 3 S (C-275/98, Rec p. I-8291, point 31), ce principe implique notamment une obligation de transparence qui permet au pouvoir adjudicateur de s'assurer que le dit principe est respecté. Cette obligation de transparence qui incombe au pouvoir adjudicateur consiste à garantir, en faveur de tout soumissionnaire potentiel, un degré de publicité adéquat permettant une ouverture du marché des services à la concurrence ainsi que le contrôle de l'impartialité des procédures.

La Cour précise cependant qu'il appartient au juge national de statuer sur le point de savoir si cette obligation est respectée et d'apprécier la pertinence des éléments de preuve produits à cet effet.

(1) Article 1411-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), issue de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, art. 3-1. Cette notion s'applique tant à l'état qu'aux collectivités locales.
(2) Loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques.
(3) Article 1411-1, alinéa 2 du CGCT.
(4) Conseil d'Etat, 3ème et 8ème sous-sections réunies, n° 249832.
(5) Livre vert sur les partenariats public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions du 30 avril 2004 (Com (2004) 327 final). Les délégations de service public sont une forme de concession.
(6) Établissements Publics de Coopération Culturelle.
(7) Affaire C-324/98 Telaustria Verlags Gmbh.


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