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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Annexe 8 - 6.
Interview de Jacques FAVART


Vous êtes président de l’association des ADIAM, dans quel objectif ont été créées les ADIAM, comment fonctionnent-elles ?


" Les ADIAM, ADIM..., le générique c’est ADDM, Associations Départementales de Développement Musical. Ces associations sont issues du plan LANDOWSKY (ancien directeur de la musique et de la danse et père d’Anne CHIFFERT (1) ) qui a été mis en place dans les années 70. Ce plan, élaboré à l’époque pour dix ans, devait toucher tous les secteurs de la musique et de la danse avec un volet enseignement. Cela a été la pyramide des conservatoires, CNR, écoles agréées etc., un volet diffusion avec des orchestres symphoniques, orchestres de chambre dans les régions, un volet lyrique avec création d’opéras en province, et cela a moins bien marché, et enfin un volet de coordination, d’animation, de formation, d’action dans les écoles, sur le terrain qui a débouché sur la mise en place de délégués régionaux dans les DRAC et départementaux comme directeurs d’ADDM.

Marcel LANDOWSKY avait donc décidé de mettre en place des structures de terrain mais qui n’avaient pas de caractère obligatoire. Ces structures ne peuvent être mises en place que s’il y a un accord entre d’une part, l’État, le ministère de la culture et les DRAC, et d’un autre côté le Conseil Général pour se doter d’un outil commun, outil qui à la fois au niveau du conseil d’administration et au niveau des objectifs, sera déterminé par les uns et par les autres. "

Si je vous ai bien compris c’est une responsabilité à 50 -50 ?


" Ce n’est pas forcement cela. C’est simplement la représentation la plus large dans les conseils d'administration, avec côté État, le préfet, le directeur régional des affaires culturelles, le conseiller à la musique, souvent l’inspecteur d’académie, le directeur de la jeunesse et des sports... Du côté du Conseil Général, on a le président du Conseil Général, le vice-président chargé de la culture, membres du Conseil Général, responsable des affaires culturelles. Et donc une représentation à la fois des élus et des services. Et un troisième collège, composé d’utilisateurs qui siègent également. Après, suivant les départements, vous avez un équilibrage concerté. La plupart du temps, cependant, le Conseil Général est majoritaire. Il peut arriver éventuellement que ce soit aussi l’État qui soit majoritaire. "

Quel sont les rôles de telles associations ?

" D’abord un rôle d’information, puis de coordination et de médiation, et enfin un rôle d’opérateur et de mise en place d’actions nouvelles permettant le développement de tel ou tel secteur. Nous sommes passés du rôle d’animateur en faveur de la musique et de la danse au rôle d’opérateur d’actions, de festivals, etc. Aujourd’hui nous sommes réellement responsables des politiques départementales sous la responsabilité des conseils généraux et de l’État. "

Comment l’ADIAM 92 gère-t-elle de gros événements comme Chorus ou Jazz à la Défense ?

" Chorus est une des grosses opérations qui a été confiée à l’Adiam 92 par le biais du hasard et de la chance. Mais l’Adiam 92 existerait tout aussi bien sans Chorus. Quand je suis arrivé dans les Hauts-de-Seine fin 1981, Jack LANG venait de lancer les centres régionaux de la chanson, quatre en tout, dont un à Nanterre. A l’époque, on me demandait de tout faire, sauf des événements de ce type puisque c’était le centre régional de la chanson qui s'en occupait. J’étais au conseil d’administration comme membre de droit et pour les aider à monter des choses. Mais très vite au bout de huit mois, des conflits, une mauvaise gestion ont fait que le centre a explosé avec un déficit et l’association a été mise en liquidation. Cela s’est très mal passé. Après une bombe, il y a ensuite un terrain complètement déchiqueté. Deux à trois ans après, le hasard des rencontres a fait que j’ai découvert un théâtre qui souhaitait faire un tremplin pour de jeunes chanteurs. On avait un budget de 5 000 F et cela a drainé un public. On était les premiers étonnés de voir qu’il y avait un intérêt. Cela a ensuite grandi petit à petit. Jusqu’au moment où est arrivé à la présidence du Conseil Général des Hauts de Seine Nicolas SARKOZY. Lui a trouvé le tremplin intéressant et voulait aussi des vedettes. On a alors créé une semaine de la chanson. Tout cela a été regroupé pour devenir le festival Chorus des Hauts de Seine avec 17 villes comme partenaires. "

Aujourd’hui on voit bien que cela n’est plus aussi modeste qu’au départ. Quel est le montant des subventions nécessaires à un tel événement, quels sont les partenaires ?

" Nous sommes dans une situation tout à fait particulière et originale. Je veux dire que nous avons un peu inventé ce qui est aujourd’hui à la mode et qui s’appelle " la mise en réseau ". Sur le festival qui est à peu près d’un montant de 15 à 16 millions de francs, pour cent cinquante concerts, le Conseil Général nous a donné une somme de 6 MF, aujourd’hui elle est de 3 MF. Le reste, 6 à 7 MF, est pris en charge par les communes en supplément de la mise à disposition des salles et de la technique. "

Et le ministère de la culture ?

" Le ministère de la culture donne 100 000 F pour les tremplins, et depuis quatre ans nous avons pu obtenir par la réserve complémentaire du Sénat, une somme entre 400 000 F et 600 000 F du ministère. Il y a aussi la SACEM pour 200 000 F, l’ADAMI pour 100 000 F puis des échanges avec des médias. Comparés à des festivals comme Bourges ou les Francofolies, qui représentent 30 MF nous avons un festival très peu cher. "

En gros il y a 45 000 entrées en billetterie pour ce festival. Par rapport à votre statut d’association loi 1901...

" La billetterie ne nous revient pas mais va à chaque lieu. Chaque lieu achète les concerts et nous intervenons pour payer une partie des concerts à la ville. En gros si un artiste coûte 100 F, grâce à CHORUS, il ne coûtera que 70 F. La billetterie va à la ville, nous ne touchons aucun argent là-dessus. Bien que, pour rendre service au public, nous ayons mis en place une billetterie centralisée. "

Revenons sur la question que je n’avais pas terminée. Chorus, c’est un festival et vous êtes une association.


" Chorus est un événement et nous, nous sommes une association d’utilité publique (2). "

À cet égard, comment réagissez-vous par rapport à la loi SAPIN et à l’obligation de mise en concurrence sur des marchés culturels publics ?

" Nous ne gérons pas, nous n’achetons pas, nous ne faisons pas de commerce. Mon rôle n’est pas de faire du commerce mais de mener des politiques en faveur des artistes, des associations, du Conseil Général et de l’État. Il n’est donc pas question pour Chorus de devenir une activité commerciale. Par rapport au domaine de la chanson qui intéresse les villes et l’État, nous avons mis en place simplement un certain nombre de mesures, un certain nombre de dispositifs regroupés dans le cadre d’un festival. La moitié des artistes programmés sont inconnus, des premières parties, du cabaret... tous ceux que personne ne veut aider. Tous les éléments du risque qui nous permettent d’aider un nombre considérable de gens qui sans Chorus ne pourraient pas être aidés. "

Il y a pourtant des vedettes et par certains côtés on frise l’aspect commercial ?

" Je ne suis absolument pas d’accord avec vous...


Je ne sais pas où vous voulez en venir. Il faut être clair... je vous sens tourner... "

C’est simple, nous faisons une enquête où il semble que toutes les associations culturelles ne respectent pas forcément les dispositions légales dans certains domaines comme la libre concurrence. Là vous dites qu’il n’y a pas de problème !
" Je dis que le rôle des ADIAM est clair, c’est un rôle de service public, de développement de la musique et de la danse sous un certain nombre de formes. "
Et au niveau juridique...

" J’ai un expert comptable, j’ai un commissaire aux comptes, j’ai eu des contrôles incessants, normaux ou réguliers de toutes les caisses possibles et inimaginables. J’ai même eu des contrôles internes au cas où la Cour des Comptes nous ferait des contrôles. Un certain nombre d’ADIAM a d’ailleurs eu des contrôles. "

Mais ne pensez vous pas que le statut d’association loi 1901 par rapport aux grosses sommes que vous gérez, est un statut qui ne convient pas ?


" Je pense qu’il faut regarder quel est le moins mauvais statut. Bon, si vous voulez parler de municipalisation ou de la départementalisation, cela est catastrophique pour le dynamisme des équipes, c’est catastrophique car on ne sait pas ce qui sort, ce qui rentre, où va l’argent (3), on n’a plus d’éléments d’analyse et on devient des fonctionnaires. Donc cela, je peux vous dire que du point de vue de la culture, c’est catastrophique. Deuxièmement, l’établissement public c’est extrêmement lourd. Moi je ne suis contre rien. Il y a d’ailleurs un projet de loi visant à mettre en place un établissement local de développement culturel. Je ne suis contre rien, mais je dis que pour travailler il faut une certaine souplesse et un certain nombre d’éléments de contrôle. De cela on peut reprocher au secteur associatif d’avoir été trop peu contrôlé, et trop souple. À l’inverse, les autres sont trop rigides. Cela fait des années que l’on en parle.

Cherchons un système qui conserve la souplesse, et qui permette cependant un contrôle public (4). Pour le moment le système associatif me parait le moins mauvais, je ne dis pas qu’il est bon. Ceux qui sont proposés en alternative sont plus mauvais. "

Comment réagissez-vous par rapport au fait que Jack LANG juste avant de partir, ait mis en place des réglementations afin de mieux contrôler ces associations ?

" Il faut revoir tous les contextes, dans les années 80 à 90 c’était le " tout argent ". Tout le monde se croyait impuni que ce soit le football, les HLM ou la culture. Je crois qu’il y a eu des pratiques nocives venant de partout. Ces pratiques ont utilisé des outils et ces outils ont été détournés. Cette période a entraîné des abus qu’il est tout à fait légitime de condamner. Est-ce à dire qu’aujourd’hui il faut jeter le bain, le bébé dans le bain et l’eau du bain ? C’est cela le problème. "

C’est pourtant ce qui s’est passé parfois !

" C’est ce qu’a fait un peu tout le monde. Dès le moment où les élus ont vu que cela tournait mal, ils en ont pris deux ou trois pour faire des exemples, ils ont fait sauter deux ou trois associations. Et comme Ponce Pilate ils se sont lavés les mains, ont démissionné de toutes ces associations et ont mis des seconds couteaux pour ne plus être pris. Aujourd’hui vous vous apercevez qu’il n’y a plus aucun grand nom dans les présidents d’associations.

En ce qui me concerne, un service départemental souple comme le nôtre, qui est relié à la politique des élus, je pense qu’il est important que les élus soient présents et prennent leurs responsabilités. Moi je travaille pour le compte des élus et les décisions sont prises dans ce cadre là. "

En clair vous dites que vous êtes au service des élus et que ce sont eux qui prennent leurs décisions.

" C’est le jeu! Moi je propose une politique, ensuite les élus disent oui ou non. Après je réalise sur le terrain la politique qui a été décidée par les élus. "

Et avec le ministère de la culture, vous avez une concertation? Car vous n’avez pas beaucoup parlé du ministère, on a l’impression qu’il n’a que très peu de rôle dans votre mission ?


" Non, au contraire, elle est totale. Le reste est votre interprétation. Pour l’instant vous m’avez orienté sur les associations, sur le rôle des élus et sur la gestion de fait. Si vous voulez qu’on parle de l’État...

L’État a voulu ces associations, l’État les a proposées, imposées, les a vendues aux collectivités territoriales. "

On a l’impression que l’État a délégué un maximum de services sur des kyrielles d’associations. Qu’en pensez vous ?

" On pouvait réaliser d’autres modes de gestion de la culture, en particulier vous avez les DRAC au niveau régional. Il n’ y a pas de DRAC au niveau départemental, alors qu’il y a des directions départementales pour d’autres secteurs d’activités. Le ministère, pour des raisons qui lui appartiennent, par manque de moyens, n’a pas voulu ou pu mettre en place un service d’État au-delà de la déconcentration de l’État en région. C’est la raison pour laquelle la direction de la musique a souhaité avoir des relais et a inventé cet hybride que sont les associations départementales. Et entre ne rien faire et faire un hybride, il vaut mieux faire un hybride qui a d’ailleurs montré qu’il était assez efficace. "

Mais ces associations, semble-t-il, pourraient être considérées au niveau juridique comme transparentes et fictives ?

" Je ne vois pas ce que cela veut dire, on joue sur les mots !!! je ne sais pas ce que vous voulez démontrer et cela vous appartient.

Nous sommes un service, moi je dis un service public. Certes on peut discuter sur le plan juridique. Un service d’utilité générale qui a une forme d’association. Point !!! Si vous préférez nous sommes un service para-administratif. Mais depuis le départ, c’est très clair et très précis. Dans la mesure où nous sommes dans la mission qui nous a été assortie, où cette mission est positive, où elle est évaluée à longueur de temps par nos conseils d’administration, par les assemblées générales, par les contrôles X et Y que nous n’arrêtons pas d’avoir, tant que je suis dans la vocation de ce qui m’a été donné, je considère que je suis dans la vocation de ce qui m’a été confié. "

Donc, pour vous, il n’ y a pas de problème juridique ?

" Jj’ai une convention tripartite qui était signée tous les trois ans qui est maintenant signée chaque année avec le préfet, le président du Conseil Général et le président de l’association qui signent, définissant les missions de l’association, les obligations, ce pour quoi elle est faite, ce qu’elle doit faire, ne pas faire etc. et signé par l’État.

Cela fait dix neuf ans que cela fonctionne et je n’ai jamais été mise en cause sur quoi que ce soit. A chaque fois qu’il y avait des doutes, on a corrigé les éléments. Par exemple avec le département il fallait qu’il y ait une convention de mise à disposition des locaux, nous l’avons faite. Il y a une mise en conformité juridique constante de notre structure et nous sommes épluchés de très près. Nous sommes sur un département sensible, et si il y avait eu quoi que ce soit à nous reprocher, la presse n’aurait pas hésité à en parler. "

(1) Ndla.

(2) Cette affirmation est mensongère. L'ADIAM 92 n'a jamais fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique.

(3) Ce statut de fonctionnaire n'a justement pas été fait pour avoir des activités commerciales... (Ndla)

(4) Ce système existe depuis longtemps et est largement utilisé, il s'agit de la délégation de service public, mais conclue légalement.

 
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