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Chaque mois, l'essentiel de l'actualité du droit et de la gestion de la création artistique
  
Annexe 8 - 2.
Extraits et commentés du rapport de la
Chambre régionale des comptes


Avant qu'il ne devienne une association en 1981, le corps de ballet, créé en 1972, était un service communal, rattaché à l'Opéra.

Les deux tiers des recettes du ballet (1) ont été assurées, en moyenne sur la période, par les collectivités publiques.

Pendant la période examinée, les recettes publiques du ballet ont dépassé 130 MF TTC. Les collectivités les plus généreuses furent l'État et la Ville, qui versèrent environ 50 MF chacune (2). La parité qui existait entre ces deux collectivités a été rompue par la ville en 1992, qui a réduit de 2 MF la subvention qu'elle accordait jusque là, ce qui explique en partie le résultat fortement déficitaire (1,7 MF) de cet exercice. Depuis cette année là, la ville met des locaux neufs, situés près du parc du château Borely, à la disposition du ballet et de l'école nationale de danse.
La région et le département participent, à un degré moindre, au fonctionnement du ballet. La région a réduit son aide, qui est passée de 3 MF par an avant 1992 à moins de 2 MF. Le département ne participe qu'à hauteur de 0,8 MF par an, ce qui peut apparaître faible, eu égard à l'attractivité des représentations données à Marseille sur les habitants des Bouches du Rhône(3) .

L'École Nationale Supérieure de Danse (ENSD) et le ballet, s'ils sont deux entités juridiques différentes à finalité distincte, sont intimement imbriqués puisqu'ils partagent les mêmes locaux, ont une direction et des personnels administratifs et techniques communs. Ils perçoivent chaque année 10 MF de la ville et figurent ainsi parmi les organismes les plus aidés par la collectivité. Cet effort public résulte d'une volonté politique suffisamment forte pour obtenir un pôle chorégraphique important en province. " Cet objectif est atteint, mais il exclut toute aide à d'autres initiatives chorégraphiques, si tant est qu'elles existent et qu'elles puissent émerger " (Effectivement, il n’y a pratiquement pas de possibilité d’existence d’autres chorégraphes sur Marseille).

Le ballet doit assurer au moins trois séries de représentations par an. Pour l'une de ces séries, il y a mise à disposition gratuite de l'Opéra et de son orchestre. Une deuxième série est possible à l'Opéra sans orchestre, après entente avec la direction. Pour les autres séries, si le lieu appartient à la ville, la mise à disposition est aussi gratuite. Dans tous les cas, la totalité des recettes revient au ballet.

Les mises à disposition gratuites de salles ou de moyens constituent donc une aide supplémentaire apportée au ballet.

Si l'attachement des Marseillais pour le ballet n'est pas contestable, en dehors des représentations données sur le Vieux Port, les salles ne sont pas remplies, et le nombre d'invités peut même atteindre la moitié des entrées pour certains spectacles.

" Assemblée générale et conseil d’administration ne jouent pas leur rôle. "


Le Conseil d’administration de l'association est composé des quatorze membres de droit dont la moitié représentent la commune (4) . Il doit se réunir au moins deux fois par an. Le maire est président de droit. MM. DEFERRE, VIGOUROUX et GAUDIN ont donc été présidents de droit du ballet.

En réalité, les réunions des administrateurs ne sont pas aussi fréquentes que le prévoient les statuts. Les conseils d'administration ne se sont tenus qu'une fois l'an ou ne se sont pas tenus, comme en 1991. L'Assemblée générale et le bureau ne sont jamais réunis.

En outre, les conseils ne donnent pas lieu à débats, qui se tiendraient en amont, comme l’indique le ballet sans toutefois en rapporter des comptes rendus. Rapidement expédiés, ils respectent un rituel bref et sans surprise qui se limite, après une présentation formelle et succincte des comptes, à évoquer le financement incertain du spectacle donné chaque année sur le Vieux Port, et à regretter, comme l'exprime parfois le représentant de la région, de ne pas voir le ballet se produire davantage dans les localités provençales.

En dépit de l'importance des aides apportées au ballet, on ne peut que constater le désintérêt des collectivités à l'égard de l'association au plan artistique, mais aussi, au plan de la gestion, qui n'a jamais été contrôlée. Le versement des subventions a ainsi acquis un statut de reconduction automatique d'année en année, les variations constatées, pour importantes et brutales qu'elles aient pu être, n'étant pas motivées de manière explicite et rationnelle.

Le dysfonctionnement des instances collégiales est en grande partie dû à leur composition. Il faut reconnaître que la faible disponibilité des administrateurs ne permet ni de réunir le quorum exigé, ni de respecter les fréquences de réunion prévues dans les statuts, ni de consacrer suffisamment de temps pour débattre.

" L'information donnée aux administrateurs est insuffisante, parfois inexacte. "


Le rapprochement des prévisions et des réalisations aurait permis de constater que les résultats des tournées ne sont pas conformes aux prévisions, dans lesquelles ils apparaissent en équilibre parfait (1994 et 1995), ou en excédent (1992 et 1993) alors qu’en dehors de l'année 1993, où le résultat est proche des prévisions, les autres exercices sont clos avec des résultats de tournée nettement négatifs puisque, selon les années, les charges y ont dépassé les recettes de 1 à plus de 3 MF.

Ces écarts sont dûs soit à des événements imprévisibles (5), soit à des estimations parfois trop optimistes, soit encore à une présentation très incomplète des spectacles qui doivent se dérouler.

Ainsi, en 1995, seulement 13 tournées sont prévues, mais plus de 20 sont réalisées. Certains spectacles, non mentionnés dans le prévisionnel présenté aux administrateurs, s'avéreront très déficitaires. C'est le cas en 1994 et 1995 de " Zizi spectacle Gainsbourg " qui a, en deux ans, cumulé un déficit de 4 MF, hors amortissement des décors et costumes, alors que le déficit prévisionnel ne s'établissait qu'à 2 MF et que la plupart des spectacles donnés, notamment à Toulon et Marseille, ne figuraient pas au programme prévu présenté aux administrateurs.

La présentation équilibrée des tournées peut laisser croire que les subventions publiques ne financent que les charges communes, et donc pour l'essentiel les frais de personnel. Les déficits en réalité constatés sur les spectacles démontrent que les collectivités financent aussi les tournées.

" Le ballet est apparu globalement bien géré. Ses comptes sont bien tenus. Ils reflètent des insuffisances de trésorerie. Leur continuité est faussée par des changements de pratique. Les recettes propres du ballet, si elles ne suffisent pas à autofinancer les spectacles, restent quand même importantes. "

Les comptes du ballet sont bien tenus et reflètent de manière fidèle la situation financière de l'association. Les observations que la Chambre émet dans ce domaine ne les remettent pas en cause, de même qu'elles ne remettent pas en cause la gestion générale de l'organisme, assurée avec sérieux.

Près de 4 MF d'insuffisance de trésorerie fin 1995.

Si le ballet a pu, en fin d'exercice 1995, restaurer ses capitaux propres en rétablissant un équilibre qui avait été rompu en 1992, il n'en connaît pas moins des besoins de trésorerie non satisfaits qui dépassaient alors 4 MF, soit près de six mois de charges courantes, hors frais de personnel.

Les insuffisances structurelles de trésorerie sont aussi aggravées par la perception tardive des subventions (6).

Les frais financiers qui en découlent, et qui évoluent (agios : 106 KF en 1992, 213 KF en 1993, 91 KF en 1994, 295 KF en 1995), sont surtout supportés par le ballet, mais aussi indirectement par l'État et la Ville. Ils atteignaient le montant de deux emplois en 1995.

Dans ces conditions, il serait de bonne gestion de supprimer les avances accordées pour raisons personnelles au directeur artistique (Roland PETIT) qui se situaient en moyenne autour de 100 KF en 1994, et qui ont, il est vrai, décru par la suite.

Un chiffre d'affaires conséquent.

Si, comme cela a été souligné, plus des deux tiers des ressources du ballet sont apportées par les collectivités publiques, il n'en reste pas moins que le reste provient de recettes propres, appelées aussi chiffre d'affaires. Cette proportion est importante, et évolue favorablement. Elle ne suffit toutefois pas à couvrir les charges directement affectées aux spectacles.

Les ventes de spectacles constituent les deux tiers du chiffre d'affaires, et, pour l'essentiel d'entre elles, les ventes à l'étranger. Certaines destinations sont privilégiées, l'Italie notamment. Le plus souvent, lorsque le spectacle est vendu, le ballets supporte les frais de déplacement et d'hébergement (sauf pour les tournées au Japon), ainsi que les frais de transport des décors. D'une manière générale, les ventes sont suffisamment bien négociées pour financer les frais directs, en dehors de quelques tournées choisies pour le prestige des salles d'accueil (États-Unis).

Le tiers restant provient des recettes de billetterie, pour les spectacles produits par le ballet. Ces spectacles se tiennent à Marseille (Opéra et Vieux Port le plus souvent), et exceptionnellement ailleurs (Paris en 1992 et 1995). Les déficits globaux des spectacles sont à attribuer à quelques spectacles de cette catégorie, produits par le ballet.

C'est le cas notamment des spectacles donnés chaque été sur le Vieux Port, dont le déficit, dû aux importantes installations scéniques, approche à chaque fois 1 MF. L'effort public se justifie par les qualités inhérentes au site. Les installations pourraient certainement être valorisées en y organisant d'autres spectacles, comme cela a commencé à être fait en 1996.

" Le principal poste de dépenses : les frais de personnel. "

Les charges d'exploitation sont particulièrement rigides, compte-tenu de la part prise par les dépenses de personnel, qui en représentent 60% environ (autour de 16 MF par an).

Les effectifs du ballet sont compris entre 60 et 70 selon les années, dont 40 à 50 danseurs. De nombreux types de contrats de personnels coexistent. Vingt trois profils différents sont gérés par la direction des ressources humaines.

Les personnels administratifs et techniques sont peu nombreux, ce qui pose des problèmes de continuité de service en cas d'absences imprévues.

Les danseurs.

La part la plus importante de la masse salariale (un peu plus de la moitié) concerne les deux corps de ballet. Le salaire brut mensuel des danseurs est de 8 500 francs ou 10 000 francs selon le corps d'appartenance. Bloqués pendant plusieurs années pour des raisons budgétaires, les salaires du corps de ballet ont été toutefois augmenté de près de 1 000 francs en 1996.

La situation juridique des danseurs n'est pas satisfaisante. La majorité d'entre eux est engagée sur des contrats à durée déterminée de 11 mois, de mi-août à mi-juillet de l'année suivante. Ces contrats sont adaptés aux besoins de l'association : les périodes d'activité correspondent aux saisons, et, comme le renouvellement n'est pas acquis, le ballet opère une véritable sélection qui lui garantit de conserver un niveau technique élevé. Le non renouvellement du contrat ne lui impose pas de verser d'indemnités de licenciement, notamment à la fin de la carrière du danseur, inévitablement précoce.

Cette situation, si elle satisfait aux spécificités de l'activité chorégraphique, s'écarte du droit du travail, fondé sur le principe du contrat à durée indéterminée. Le contrat à durée déterminée y est l'exception, admise dans des cas particuliers, et pour une durée limitée. Aussi, au regard du droit, il est douteux que la coupure imposée aux danseurs au mois d'août, entre deux contrats, suffise à gommer le caractère quasi permanent de l'activité du ballet. Il n'est donc pas acquis que la juridiction compétente assimile les contrats passés à des contrats à durée déterminée (7).

A contrario, la situation des danseurs ne permet pas non plus de les considérer comme des intermittents du spectacle. En définitive, le système actuel, s'il paraît adapté à l'activité, risque de ne donner satisfaction à aucune des parties.
A l'activité spécifique du ballet ne correspond pas un statut particulier de danseurs, lesquels, de plus, ne bénéficient pas de reconversion organisée.

Le directeur artistique.

En dehors des salaires proprement dits, les dépenses de personnel comprennent aussi une particularité, les " feux ", qui ne sont plus servis qu'à Roland PETIT. Les feux sont des primes versées en fonction des représentations (8). Sur la période examinée, ils ont représenté plus de la moitié de la rémunération du directeur artistique. Ils lui ont été accordés en 1972 pour maintenir sa rémunération, car son salaire était alors limité, du fait de son statut de contractuel de la ville, puisque le ballet était un service communal. Ils ont été maintenus ensuite, bien que le ballet soit devenu un organisme de droit privé.

Le directeur artistique bénéficie de versements directs ou indirects à chaque prestation du ballet. Il en découle un effet cumulatif à partir d'un répertoire captif : les feux, les droits d'auteur et éventuellement les cachets d'interprétation sont perçus par le créateur interprète lorsque le ballet qu'il dirige se produit, sachant qu'il ne se produit que sur les œuvres qu'il a créées, grâce au support matériel de la collectivité.

" Les dépenses de publicité et de déplacements représentent une part importante des charges de l'organisme. "

Les frais de communication sont variables, selon les productions réalisées dans l'année. Le poste est important, approchant 3 MF en 1992.

Il a été relevé que, dans ce domaine, le ballet a eu un prestataire exclusif pour les spectacles qu'il a produits de 1991 à 1993 à Marseille, mais aussi à Paris en 1992. Ces prestations représentent des montants substantiels, notamment en 1992 avec 2,5 MF, qui incluent des honoraires de coordination compris entre 50 000 F et 70 000 F par opération.

Les prix facturés par le prestataire sont apparus élevés par rapport aux prix que le ballet obtient depuis sur des prestations identiques : les affiches 40 x 60, par exemple, coûtaient deux fois plus cher et il n’est pas démontré par le ballet, comme il l’affirme, que le prix de ce type de prestations ait depuis baissé substantiellement.

De plus, les honoraires de coordination servis à ce prestataire semblent faire double emploi avec la fonction de communication qui venait d'être créée au ballet (9). Enfin, l'action de la société n'a pas apporté de résultats positifs, à en juger par les recettes encaissées pendant ses années d'exercice.

Les frais de déplacements, d'hôtellerie et de réceptions

" Dix pour cent des frais concernent les seuls directeurs administratif et artistique dont les postes locations de véhicules, voyages et déplacements, missions et réceptions et frais d'hôtel ont atteint 2,2 MF sur la période examinée. "


En outre, il a été relevé que de nombreuses dépenses concernaient la prise en charge de personnels extérieurs aux ballets. Ceci est compréhensible (bien que non prévu dans les contrats) pour les créateurs qui ont participé à l'élaboration de spectacles (décorateurs, couturiers). Cela l'est moins pour ce qui concerne les journalistes, dont nombre de déplacements et hébergements sont pris en charge par le ballet. Cette pratique, certes courante, permet d'avoir une couverture médiatique efficace, assurée à moindre frais (10). Mais elle autorise aussi le doute sur l'objectivité des articles de presse rédigés par ces critiques.

La rémunération de Roland PETIT.


Il perçoit, outre un salaire de directeur artistique de 35 000 F par mois, 160 feux, soit environ 90 x 9 958 francs pour une représentation en dehors des Bouches du Rhône, 80 x 4 979 francs pour une représentation locale, ce qui fait déjà 420 000 F + 799 664 F + 398 320 F = 1 617 984 F.

De plus, il doit percevoir au titre des droits d’auteur, dont le montant s’élève à environ 10 % des recettes ou du budget des spectacles. Si l’on compte 6 000 F par spectacle, ce qui est sans doute très faible, cela fait encore 960 000 F par an à ce titre.

A cela s’ajoutent les droits audiovisuels liés aux passages télé des ballets qui font régulièrement l’objet de captation et les frais professionnels qui atteignent des montants très conséquents.

Roland PETIT doit avoir des revenus directement dépendants de son activité de directeur du ballet de l’ordre de 3,5 à 4 MF par an. Roland PETIT a par ailleurs d’autres activités en tant que chorégraphe invité par d’autres compagnies. Il fait également des publicités et des programmes audiovisuels. Il convient par ailleurs de ne pas oublier que Roland PETIT est aussi responsable de l’École de Danse de Marseille, et il semblerait que le personnel du CCN perçoive également un salaire au titre de la direction et de la gestion de cette école.

Afin de mieux comprendre le contexte, voici les réactions (11) de Christophe MELY, responsable des relations publiques du ballet, et de Jean POCHOY, administrateur général actuel.

Christophe MELY, vous êtes responsable des relations publiques du ballet national de Marseille, pouvez-vous nous donner plus de détail sur le départ de Roland PETIT ?

" Roland PETIT a quitté le ballet en tant que directeur artistique, mais il reste en tant que chorégraphe. Il va continuer à travailler avec le ballet de Marseille. Il a simplement souhaité être un peu moins présent et prendre du recul. Le bureau va choisir, avec son accord, son successeur. "

Roland PETIT reste donc assez présent au sein du ballet national de Marseille.

" Roland PETIT a son mot à dire, car il laisse son répertoire à la disposition du ballet national de Marseille " à condition qu’il puisse s’entendre avec le futur directeur artistique ". On continuera donc à jouer ses chorégraphies, et Roland PETIT continuera à créer. Sa prochaine création, Le lac des cygnes , est d’ailleurs prévue pour le mois de mars. "

Ndla : Dans ces beaux montages pensés et mis en œuvres par les spécialistes du ministère de la culture, il n’existe bien entendu aucune cession de droits concernant les spectacles créés par Roland PETIT et l’association. Ainsi que nous l’avons vu dans le premier chapitre de cet ouvrage, les droits d’auteur créés par un fonctionnaire dans le cadre d’une mission de service public avec les moyens du service public devraient en principe appartenir à la collectivité publique. L’association " ballet national de Marseille " pouvant être à notre avis qualifiée de transparente, il s’agit en fait d’un démembrement de l’administration, Roland PETIT devrait en conséquence être assimilé à un fonctionnaire et ne pas avoir de droits sur les œuvres créées dans le cadre de la mission de service public du ballet, du moins pour les exploitations liées à sa mission de service public.

Ce départ pèse très lourd dans la redéfinition d’une politique de danse dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, jusque-là très liée financièrement et artistiquement au chorégraphe. Depuis sa démission, les réactions sont assez vives et les gens ont du mal à comprendre la situation .

" Marseille est une ville qui aime bien colporter les bruits. Roland PETIT est un personnage notoire de la ville et lorsqu’il est parti, beaucoup de gens qui ne le portaient pas dans leur coeur, ont fait circuler des bruits totalement faux. Moi, je suis responsable des relations publiques, je ne communique que les discours officiels que l’on veut bien me dire. Alors la vérité qui est en haut lieu ! Moi ce que l’on me dit, je le prends pour argent comptant, et je communique ainsi. La vie continue ici malgré le départ de Roland PETIT. On travaille toujours avec lui, mais plus en tant que directeur artistique. Mais il n’a vraiment aucun problème, ou alors il cache bien son jeu. Ce n’est pas un homme qui, comme on l’a dit à Marseille, est ruiné ! "

C’est le moins que l’on puisse dire, étant donné qu’il est devenu résident fiscal genevois !

" Personne n’est dupe. Il part en Suisse, tout le monde sait à peu près pourquoi. Au delà de cela, il continue à travailler avec le ballet national de Marseille et à faire des chorégraphies. "

Jean POCHOY, en tant qu’administrateur général du ballet, pouvez-vous nous expliquer pourquoi Roland PETIT avait un statut à part au sein du ballet ? Il était en particulier le seul à pouvoir toucher des feux !


" Lorsqu’il est arrivé à Marseille en 1972, Roland PETIT a créé le ballet de Marseille. Gaston DEFFERRE était alors maire de la ville. Roland PETIT était lui déjà très connu dans le monde. Il a donc dit à Gaston DEFFERRE, " je veux bien vous créer une compagnie ici, mais je suis conscient que vous ne pouvez pas payer le salaire que je touche actuellement à travers le monde ". Donc, ils sont tombés d’accord sur un principe de rémunération qui était un salaire de base qui lui permettait de se loger, de prendre en charge ses frais courants de vie, et un système de feux qui était corollaire au nombre de représentations dont le montant était payé par les organisateurs de spectacles. Et non pas par la ville et l’État. Ce système est resté. (ndla : Roland PETIT est le seul à en profiter au sein du ballet national de Marseille). "

Roland Petit cumule donc son salaire, les feux ainsi que des droits d’auteur ?

" Il avait toujours son salaire de base (de 35 000 F) en temps que directeur artistique et ses feux en tant que chorégraphe. "

En moyenne, combien de représentations donnez-vous ?

" Notre compagnie donne entre 80 et 160 représentations par an, car, nous sommes une compagnie itinérante. Nous n’avons pas de théâtre à Marseille. "

Comment interprétez-vous le fait qu’il y ait eu deux démissions, puis un rapport de la Chambre régionale des comptes ?


" C’est vrai que dernièrement, il y a eu trois événements importants. La démission du maire, en tant que président, démission qui n’a absolument rien à voir avec le départ de Roland PETIT.

Ensuite, il y a eu un rapport de la Chambre régionale des comptes. Si vous en avez eu connaissance, il est plutôt positif. On est bien géré, il n’y a pas de problèmes. Bon, évidement il y a des petits problèmes " normaux ". Le départ de Roland PETIT n’a absolument rien à voir non plus, avec le rapport de la Chambre des comptes. C’est une coïncidence ! Il n’y a pas de lien entre tout cela. Je ne vous cache pas que s’il y en avait un, c’est ma démission qui serait donnée. Car la gestion pure et administrative c’est moi qui en suis responsable, ce n’est pas Roland PETIT. "

On apprend dans le rapport de la Chambre régionale des comptes que les administrateurs n’étaient pas toujours au courant des tournées prévues. Pourquoi ?

" Lorsque l’on fait le budget d’une compagnie itinérante comme la nôtre, on ne connaît jamais le planning exact. De plus pendant des années, les conseils d’administration se déroulaient dans le bureau du maire, à la mairie de Marseille. Vous connaissez les agendas des maires, surtout de Marseille, le conseil d’administration durait à peu près de un quart d’heure à vingt minutes. Cela allait très vite ! "

Quels sont les projets de Roland PETIT ?


" Roland Petit a des milliards de propositions ! On lui a proposé l’Opéra de Paris, la Scala de Milan... Il a tout refusé. Car quitter Marseille pour une autre compagnie ne l’intéressait pas, il est mieux ici. Par contre, il veut faire des films sur des danseurs. Donc il a souhaité quitter ses fonctions de directeur artistique, mais rester en tant que chorégraphe. Ceci afin d’avoir plus de temps de libre.

(1) Les ressources totales du ballet national de Marseille sont égales à 30 MF par an en moyenne, 20 MF de subventions, 10 MF de recettes propres.

(2) Soit 8 MF par an.

(3) Pour les représentations données à Marseille, un spectateur sur trois est domicilié dans le département hors Marseille (donnée issue de l'exploitation de la billetterie de juillet 1993 à mars 1996).

(4) Les autres membres proviennent de l'État (4) et de la Région (3)

(5) C'est le cas en 1992 où la non conformité des tribunes installées au Vieux Port obligea au dernier moment à déplacer le spectacle à l'Opéra. Les charges supplémentaires et les annulations de places occasionnées par cet imprévu ne suffisent toutefois pas expliquer la totalité de l'écart entre le déficit prévisionnel (1,1 MF) et le déficit réalisé (2,5 MF).

(6) Chacun des exercices s'est clos avec des reliquats importants de subventions restant à percevoir. Les collectivités se sont parfois acquittées assez rapidement de leurs dettes, c'est-à-dire en début d'année suivante, mais parfois aussi bien après : ce n'est qu'en juin 1994 et juin 1995 que la région a versé respectivement 2 MF au titre de 1993 et 1,8 MF au titre de 1994 ; le département reste à devoir 1,6 MF fin 1995 au titre de l'année courante mais aussi de 1994.

(7) La jurisprudence sur ce point est constante, cette pratique est contraire au droit du travail. Dans un tel cas, les danseurs peuvent systématiquement faire requalifier leur contrat en contrat de travail à durée indéterminée et considérer leur fin de contrat comme un licenciement sans respect des formes et sans cause réelle et sérieuse.

(8) Pour 1995, les feux sont de 9 958 francs pour une représentation en dehors des Bouches du Rhône et de la moitié, soit 4 979 francs, pour une représentation locale dans le département (montants bruts soumis à cotisation).

(9) Les mécanismes de surfacturation des affiches et dépenses de communication permettent parfois à un imprimeur de constituer une cagnotte dont pourra bénéficier un organisme, par exemple un parti politique, pour le compte duquel l’imprimeur réalisera ensuite des travaux qui ne feront l’objet d’aucune facturation. Rien de tel n’a été prouvé pour le cas de Marseille.

(10)Réponse angélique du ballet aux observations provisoires : " le système journalistique français ne permet pas aux critiques de danse d'obtenir leurs voyages et leurs hôtels payés par leur journal. De ce fait le ballet, comme toute institution en France et en Europe, se trouve confronté à la nécessité d'un certain nombre de frais, faute de quoi le journaliste ne peut se rendre sur le lieu du spectacle et de ce fait ne peut assurer aucune couverture médiatique du spectacle ".

(11) Propos recueillis par Wilfrid ESTEVE.

 
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