| Quand on saperçoit que le droit dauteur 
                      à la française est économiquement plus 
                      intéressant pour les producteurs que le système 
                      du copyright américain  lhistoire dune 
                      formidable escroquerie intellectuelle qui ressemble également 
                      souvent à de lescroquerie tout court
 
 Il n'est pas possible de porter un regard sur la gestion 
                      de la culture en France sans parler de la SACEM, de loin 
                      la plus importante de nos sociétés dauteurs 
                      .
 Tout le monde s'accorde à saluer son efficacité 
                      et sa rigueur en matière de perception de droits. 
                      Là où le bât blesse, c'est sur les moyens, 
                      souvent contraires à la loi, mis en uvre pour 
                      obtenir de tels résultats, sur la façon dont 
                      cette manne est répartie, et enfin sur le comportement 
                      de plus en plus " impérial " de 
                      cette institution.
 
 Par sa position dominante, la SACEM répond parfaitement 
                      au profil de " l'Imperium " : non seulement 
                      elle jouit, en contravention avec le droit sur la libre 
                      concurrence, d'un monopole de fait sur la musique, à 
                      telle enseigne que beaucoup pensent qu'il s'agit d'une administration 
                      et non d'une société privée, mais elle 
                      affiche désormais ses prétentions à 
                      exercer une influence prépondérante sur le 
                      marché du droit d'auteur en France, en lançant, 
                      à travers le secteur du multimédia, une sorte 
                      d'OPA sur les autres sociétés.
 
 Si une bureaucratie d'argent comme la SACEM, dispose du 
                      pouvoir d'intimider la justice et même de conduire 
                      l'État, arbitre et garant des lois, à fermer 
                      les yeux sur ses agissements, c'est la dissolution progressive 
                      de la démocratie qui est en train de se jouer.
 
 Examinons dans le détail ce que recouvre notre critique 
                      :
 
 SACEM signifie : Société des Auteurs, Compositeurs 
                      et Éditeurs de Musique. À lénoncé 
                      de ce sigle, la première question qui peut venir 
                      à l'esprit est de savoir ce que les éditeurs 
                      viennent faire dans un tel cercle ? On touche là 
                      à un des plus gros problèmes posé par 
                      la SACEM.
 
 Ce vice de principe est aggravé encore par le fait 
                      que lédition de musique étant aujourdhui 
                      réalisée par la gravure d'un disque plutôt 
                      que par l'édition d'une partition, tant qu'à 
                      trouver des agents économiques dans les assemblées 
                      d'auteurs, il serait plus normal que ce soient les producteurs 
                      qui y figurent. Ils sont souvent à l'origine de la 
                      première divulgation de l'uvre par le biais 
                      du phonogramme, après avoir pris les risques financiers 
                      sur des enregistrements dont les coûts sont sans commune 
                      mesure avec ceux quentraîne la réalisation 
                      d'une partition, effectuée très facilement 
                      aujourd'hui par les moyens informatiques.
 
 Survivance d'une époque révolue où 
                      les éditeurs graphiques prenaient à leur charge 
                      d'imprimer les partitions puis de faire le tour des kiosques 
                      à musique pour les vendre aux chefs d'orchestre, 
                      les éditeurs continuent non seulement d'occuper une 
                      présence statutaire à la SACEM mais reçoivent 
                      une part importante des droits collectés sur les 
                      uvres. L'Édition musicale, récupère 
                      souvent au moins 50 % des droits de reproduction mécanique 
                      et 1/3 des droits de représentation.
 
 Les éditeurs qui, de par la loi, ne sont pas titulaires 
                      de droits dauteurs mais peuvent néanmoins être 
                      membres des sociétés dauteurs, sont 
                      rémunérés de fait par la SACEM comme 
                      ayants-droit.
 
 Dans le projet de loi qui a abouti à la loi de 1985, 
                      laquelle réglemente pour la première fois 
                      en France les sociétés dauteurs, les 
                      éditeurs n'étaient pas reconnus comme associés 
                      possibles. Le texte ne parlait que des auteurs et de leurs 
                      ayants-droit. Cest lors de la seconde lecture au Sénat, 
                      après pressions des lobbies, que les éditeurs 
                      ont sauvé " in extremis " leur " nid 
                      de coucou". La SACEM avait eu chaud. Charles LEDERMAN, 
                      représentant du groupe communiste au Sénat 
                      fut l'un des rares élus à s'être opposé 
                      à cet amendement illégitime dénonçant 
                      la présence d'intérêts économiques 
                      dans les collèges d'auteurs alors que ces derniers 
                      ont déjà à subir les contraintes des 
                      éditeurs sur le marché.
 
 Philippe DOUSTE-BLAZY, alors qu'il était encore ministre 
                      de la culture, est revenu plus tard sur le sujet en déclarant 
                      que " le régime des sociétés 
                      de perception et de répartition des droits définis 
                      par le titre II du livre III (du Code de la Propriété 
                      Intellectuelle - CPI) ne permet pas à ces sociétés 
                      de comporter parmi leurs sociétaires des usagers 
                      des uvres dont elles assurent la gestion collective. 
                      Une telle participation serait contraire à la volonté 
                      du législateur de 1985 de constituer des organismes 
                      représentatifs des titulaires des droits de propriété 
                      littéraire et artistique ". Il est vrai 
                      que le ministre disait alors nimporte quoi puisque 
                      le Code reconnaît ce droit aux éditeurs depuis 
                      1985, mais il navait visiblement pas tout compris... 
                      Or, lorsquun auteur ou un producteur aujourd'hui va 
                      déposer ses uvres à la SACEM, et cela 
                      à loccasion de leur début dexploitation, 
                      celle-ci lui demande systématiquement quel est léditeur, 
                      et fait croire aux auteurs quil est obligatoire den 
                      avoir un alors que c'est totalement faux. On pousse ainsi 
                      les jeunes auteurs, si ce n'est pas déjà fait, 
                      à se lier avec un éditeur qui ne sera souvent 
                      quun accapareur de droits ou, dans le meilleur des 
                      cas, un banquier pratiquant des méthodes proches 
                      de lusure.
 
 Si en matière de droits de représentation, 
                      la répartition des droits entre auteur et éditeur 
                      est encadrée par le règlement de la SACEM, 
                      ce qui nempêche pas certains éditeurs 
                      de se mentionner également comme co-auteurs et de 
                      prendre plus que leur part, la répartition est libre 
                      en matière de droit de reproduction. De ce fait, 
                      un certain nombre dauteurs débutants, dont 
                      les préoccupations et les compétences sont 
                      loin de l'ordre juridique, cèdent jusquà 
                      95 % de leurs droits de reproduction à léditeur 
                      ! Le producteur exige souvent des artistes-auteurs la cession 
                      des droits dédition pour entrer en studio et 
                      enregistrer les premières maquettes de disques.
 
 Dans les documents relatifs à la répartition 
                      quelle publie chaque année, la SACEM se garde 
                      bien de faire apparaître le tableau des ventilations 
                      entre les différentes catégories d'associés.
 
 La SACEM présente ses chiffres en parlant de répartition 
                      aux ayants-droit et non de répartition aux auteurs, 
                      et pour cause ! Si elle distribue bien, comme elle l'affirme 
                      près de 80% de ce qu'elle perçoit, et encore, 
                      sans prendre en compte les revenus dune trésorerie 
                      pléthorique, il est clair que ce ne sont pas les 
                      auteurs qui en profitent principalement.
 
 Que font les éditeurs à 
                      la SACEM ?
 
 Au-delà du fait que le recours à l'éditeur 
                      n'est pas obligatoire, les cessions dont ils bénéficient 
                      présentent de surcroît un caractère 
                      largement fictif. Si l'auteur en effet, en adhérant 
                      à la SACEM cède ses droits à cette 
                      société, comment peut-il les céder 
                      dans le même temps à un éditeur ?
 
 La SACEM, qui a acquis les droits dun auteur, va en 
                      effet les acquérir une seconde fois auprès 
                      de léditeur.
 
 La SACEM semble ne s'être jamais posée la question 
                      de la validité de la cession à léditeur 
                      dun droit qui lui avait déjà été 
                      cédé. Elle paie cependant une partie des droits 
                      aux éditeurs, conformément au contrat de cession 
                      intervenu entre lauteur et léditeur.
 
 Pourtant, sans ambiguïté possible, au terme 
                      de ses propres statuts, l'adhésion à la SACEM 
                      emporte cession exclusive à cette dernière 
                      des droits de représentation et de reproduction.
 
 Il n'y a que l'auteur dans cette affaire pour agir de bonne 
                      foi. Il n'a aucun moyen de percer les raisons de tels montages 
                      structurels que sa propre société de protection 
                      lui présente comme impératifs.
 
 La plupart des jeunes auteurs sont ainsi persuadés 
                      quil est aussi nécessaire davoir un éditeur 
                      pour percevoir ses droits par le biais de la SACEM que d'avoir 
                      un numéro d'assuré pour être remboursé 
                      par la Sécurité Sociale.
 
 Victimes d'un véritable abus de confiance, ils se 
                      retrouvent souvent complètement phagocytés 
                      et dans tous les cas dépossédés d'une 
                      partie de leurs revenus.
 
 La SACEM agit délibérément au préjudice 
                      de l'auteur qu'elle est censée protéger, puisqu'elle 
                      soustrait une partie des redevances qui lui sont dues en 
                      vertu d'un contrat qu'elle sait entaché de nullité 
                      pour défaut d'objet.
 
 L'acte frauduleux repose d'une part sur le fait de verser 
                      indûment une partie du revenu de l'auteur à 
                      l'éditeur de musique, dautre part sur le fait 
                      que ce versement a lieu sous forme de droits d'auteur et 
                      bénéficie ainsi d'avantages sociaux et fiscaux 
                      tout aussi conséquents quils sont dénués 
                      de fondement.
 
 Au regard des éléments de droit, on peut considérer 
                      que la SACEM commet à cet égard un véritable 
                      délit d'escroquerie car :
 
 - elle trompe l'auteur en lui faisant croire que le montage 
                      juridique auquel il souscrit est valable, indispensable 
                      et protecteur de ses intérêts ;
 - elle détourne frauduleusement une partie importante 
                      des sommes qui sont dues à lauteur ;
 - elle rémunère enfin l'éditeur au 
                      moyen de droits d'auteur en fraudant au passage le fisc 
                      et la sécurité sociale .
 Quant à l'éditeur, il est passible du même 
                      chef d'inculpation pour s'être fait octroyer une partie 
                      des redevances de l'auteur par le biais de la SACEM/SDRM 
                      sur la base d'un contrat d'édition illicite.
 
 Compte tenu que la SACEM, par son ascendant, est de fait 
                      une bonne négociatrice et que si elle ne répartit 
                      pas de façon équitable, elle perçoit 
                      néanmoins à un très haut niveau, on 
                      pourrait considérer que bon an mal an les auteurs 
                      s'y retrouvent plus largement quen allant eux-mêmes 
                      à la pêche de leurs droits et que cela vaut 
                      bien quelques arrangements et entorses juridiques.
 
 Le réalisme commanderait alors de s'arranger avec 
                      la morale. Eh bien, surtout pas ! Un réalisme bien 
                      placé et une vraie morale ont fort heureusement sort 
                      lié.
 
 Il faut bien avoir conscience en effet que seuls les auteurs 
                      confirmés profitent de ces mécanismes qui 
                      en revanche permettent de " plumer " les débutants, 
                      sans compter que d'une façon plus générale 
                      il est particulièrement malsain pour notre vie culturelle 
                      nationale que des règles de droit soient aussi massivement 
                      détournées.
 
 Cela fausse la concurrence, appauvrit la diversité 
                      des dynamiques culturelles, inhibe enfin l'émergence 
                      dinitiatives nouvelles, à plus forte raison 
                      l'apparition de sociétés dauteurs alternatives 
                      qui ne bénéficieraient assurément pas 
                      de la même bienveillance de la part des pouvoirs publics, 
                      témoins attentistes jusqu'à ce jour de toutes 
                      ces transgressions.
 
 A un tel point, du reste, que l'on est en droit de se demander 
                      si cette tolérance de l'État qui revêt 
                      la forme d'un énorme cadeau, n'est pas payée 
                      de retour.
 La SACEM rend en effet bien des services. Elle intervient, 
                      par exemple, dans un certain nombre dassociations 
                      mises en place de façon illégale par le ministère 
                      de la culture et en finance même quelques-unes.
 
 En 1997, par exemple, au titre de l'aide à la promotion 
                      et à la production du spectacle vivant, la plus grosse 
                      subvention qu'elle ait versée l'a été 
                      à Manon LANDOWSKI, sur du directeur de la musique 
                      et de la danse au ministère de la culture, à 
                      savoir Anne CHIFFERT . Dans la même veine, on note 
                      également une subvention de la SACEM à CEFEDEM, 
                      association illégale, comme on l'a vu précédemment, 
                      qui vient d'être intégrée dans le tout 
                      nouveau Centre national de la danse.
 
 La SACEM assiste également la puissance publique 
                      française à l'échelon international. 
                      Ainsi certains auteurs étrangers ne peuvent adhérer 
                      chez elle quavec laccord de la société 
                      de droit de leur pays d'origine. Quand on sait que les responsables 
                      de ces sociétés surs sont parfois nommés 
                      par les gouvernements locaux (pas toujours très passionnés 
                      par la liberté d'expression et la démocratie) 
                      et non par les auteurs, et que ces derniers ne perçoivent 
                      en définitive quune toute petite partie de 
                      leurs droits, on comprend mieux que les facilités 
                      ainsi faites à des gouvernements étrangers 
                      amis de la France puissent procurer quelques compensations 
                      occultes à ceux qui en procurent les moyens.
 
 Si le mécanisme de captation par les éditeurs 
                      des droits dauteur est le préjudice le plus 
                      important commis au détriment des auteurs, il nest 
                      hélas pas le seul.
 
 Une partie conséquente des droits versés au 
                      titre des auteurs ne bénéficie pas forcément 
                      à ceux qui ont pris part à la création. 
                      Au premier rang des spoliés figurent les auteurs 
                      d'adaptation.
 
 De la même façon que les éditeurs gardent 
                      leurs privilèges grâce à la SACEM, celle-ci 
                      conserve souvent aux auteurs originaux des uvres musicales, 
                      ainsi qu'à leurs héritiers, la totalité 
                      des revenus de l'uvre adaptée, alors que l'adaptation 
                      figure aujourd'hui parmi les fers de lance de la production 
                      contemporaine, quand elle ne va pas jusqu'à relever 
                      de l'essence même de certains genres musicaux. Cest 
                      le cas du jazz, où l'artiste-interprète, souvent 
                      improvisateur, peut " tisser " à 
                      l'infini autour d'un thème, voire d'une simple grille.
 
 Adapter une uvre en musique, cest créer 
                      une uvre nouvelle par transformation dune ou 
                      plusieurs uvres préexistantes. Il peut alors 
                      s'agir dune modification de lorchestration ou 
                      du texte de la chanson, souvent à loccasion 
                      de sa traduction, dune interprétation réalisée 
                      par improvisation et/ou variation dun thème.
 
 Du reste, larticle L.122-3 du CPI énonce que 
                      lauteur dune adaptation jouit de la protection 
                      du droit dauteur sur son uvre. Le code précise 
                      cependant que cette adaptation ne doit pas causer de préjudice 
                      aux droits du ou des auteurs de luvre originale 
                      et qu'on doit obtenir une autorisation, de leur part, ce 
                      qui est tout à fait normal.
 
 Les arrangeurs et adaptateurs ne sont pas toujours comptés 
                      dans la répartition des droits, alors que leur nom 
                      est pourtant mentionné au crédit de création 
                      des album.
 
 À ce titre, la société dauteurs 
                      pourrait même être accusée de contrefaçon 
                      car elle délivre une autorisation de reproduction 
                      ou de représentation sur une uvre avec un bulletin 
                      de déclaration qui ne comporte pas la signature de 
                      tous les auteurs.
 
 Le ministère de la culture pourrait également 
                      intervenir et faire jouer son pouvoir de tutelle pour veiller 
                      à ce que La classification des uvres adoptée 
                      par la SACEM respecte la loi sur le droit dauteur. 
                      Mais là encore, silence assourdissant.
 
 Pour clore cette énumération de manquements 
                      et d'infractions, il faut parler enfin de ceux que l'on 
                      peut appeler les exclus de la SACEM, qui ne sont ni rémunérés 
                      ni nommés.
 
 Dimportantes catégories dauteurs sont 
                      en effet occultées non seulement dans la répartition 
                      des droits, mais aussi dans la simple reconnaissance de 
                      leur travail créatif.
 
 C'est le cas des auteurs dun certain nombre duvres 
                      relevant du régime de la collaboration, et qui sont 
                      alors la propriété commune des coauteurs.
 
 En foi de quoi, lorsque la SACEM négocie dans le 
                      cadre de ses contrats généraux ou particuliers 
                      lexploitation des droits sur les uvres de son 
                      répertoire, elle ne peut le faire sagissant 
                      des uvres de collaboration que si elle représente 
                      vraiment lensemble des coauteurs. Or, comme elle nadmet 
                      pas la possibilité dadhésion de certaines 
                      catégories dauteurs qui ont par ailleurs le 
                      statut de coauteurs des uvres en question, ces auteurs 
                      là passent purement et simplement à la trappe. 
                      C'est le cas en particulier des vidéomusiques. La 
                      SACEM gère les droits des auteurs-compositeurs de 
                      la musique. Elle se fait fort de représenter les 
                      réalisateurs, mais oublie souvent les chorégraphes, 
                      quand bien même la partie visuelle du produit composite 
                      relève essentiellement de ce genre.
 
 Le succès de certains titres comme la Lambada , la 
                      Macarena, Un dos tres, ou plus récemment encore, 
                      Around the world par exemple, est largement dus au clip 
                      et à sa chorégraphie.
 
 Ce qui n'empêche pas que les chorégraphes sont 
                      exclus de la répartition des droits générés 
                      par les clips. Parfois même, on exclut par la même 
                      occasion le réalisateur en lui interdisant par contrat 
                      de déposer son uvre. Dans de tels cas, les 
                      auteurs de la musique et leur éditeur saccaparent 
                      la totalité des droits perçus au titre de 
                      ces uvres de vidéomusique.
 
 La SACEM ferme les yeux sur ce problème pour ne pas 
                      se mettre à dos la SACD (Société des 
                      Auteurs et Compositeurs Dramatiques) avec laquelle elle 
                      partage par ailleurs de gros intérêts stratégiques. 
                      On voit encore là le poids de vieux modèles 
                      académiques auxquels plus personne ne croit mais 
                      qui ont le mérite de servir de justification au maintien 
                      de privilèges matériels et corporatifs. La 
                      SACD considère les chorégraphies des vidéo-clips 
                      comme de simples habillages techniques.
 
 Cest bien sûr un chorégraphe issu du 
                      sérail couvé par la Culture et qui ne devrait 
                      même pas, en sa qualité de fonctionnaire de 
                      fait, bénéficier de droits dauteurs, 
                      qui décide quelles sont les chorégraphies 
                      de ses pairs dignes de prétendre à la qualité 
                      d'uvre plénière ouvrant droit à 
                      attribution de redevances.
 
 Ce qui rend la chose encore plus inacceptable, c'est que 
                      la plupart des chorégraphies contemporaines reconnues 
                      comme telles sont en général de pures créations 
                      de danse, dénuées de tout aspect narratif. 
                      À tel point que ce sont souvent les administrateurs 
                      ou les responsables de communication des compagnies qui 
                      s'occupent de rédiger un livret qui ne sera en général 
                      pas pris en compte par le chorégraphe, histoire de 
                      rentrer dans la norme intellectuelle des octroyeurs de subventions.
 
 La SACEM/SDRM délivre allègrement des autorisations 
                      de reproduction et de représentation de vidéomusiques 
                      en méconnaissance des droits de l'auteur chorégraphe. 
                      Elle se livre donc à une exploitation de luvre 
                      sans lautorisation de lun de ses coauteurs. 
                      Cette exploitation des uvres à laquelle seule 
                      une partie des coauteurs est associée, tombe bien 
                      sous le coup du délit de contrefaçon...
 
 Bilan final de tous ces escamotages, la part des droits 
                      répartis par la SACEM aux auteurs des uvres 
                      est, semble-t-il, bien mince.
 
 Notre enquête à la recherche de ces chiffres 
                      a rencontré les mêmes difficultés et 
                      les mêmes mystères qu'une chasse au trésor 
                      . Lanalyse des données disponibles nous permet 
                      d'estimer que leur montant global oscillerait entre 10 et 
                      30 % des sommes perçues.
 
 Le Canard Enchaîné, dans un article en date 
                      du 25 février 92, écrivait à propos 
                      de cette question, que le pourcentage sélèverait 
                      seulement à 8,6 %. À notre connaissance, le 
                      journal n'a fait l'objet d'aucune attaque en diffamation 
                      ni même d'un droit de réponse de la part de 
                      la SACEM.
 
 Toutes ces irrégularités venant de la SACEM 
                      sont graves car elles touchent à l'essentiel de ce 
                      qu'elle a pour mission de préserver et de défendre 
                      : les droits d'auteur. En application de larticle 
                      L. 321-11 du Code de la Propriété Intellectuelle, 
                      le ministère de la culture serait fondé à 
                      demander à la justice de prononcer la dissolution 
                      de la SACEM et à lui interdire en attendant, de poursuivre 
                      ses activités de recouvrement.
 
 Les auteurs nauraient pas grand-chose à craindre 
                      de cette décision, le personnel et les outils de 
                      la société dissoute pouvant parfaitement être 
                      réutilisés par de nouvelles sociétés 
                      civiles, comme ce fut le cas pour la SPADEM par exemple.
 
 Le tout étant que d'indéniables compétences 
                      et d'importants moyens puissent retrouver le chemin des 
                      vocations premières, cest-à-dire le 
                      développement de la création artistique et 
                      la protection de ses intérêts professionnels. 
                      Bien sûr, les éditeurs seraient exclus de cette 
                      configuration nouvelle. La part ainsi récupérée 
                      permettrait aux auteurs de retrouver l'intégralité 
                      de leurs droits, de reconnaître d'autres catégories 
                      d'auteurs aujourd'hui ignorées et même, de 
                      pondérer le coût de la musique, c'est-à-dire 
                      d'en étendre l'utilisation et la jouissance publique.
 
 La mésaventure SPADEM : lindépendance 
                      à la trappe ou le sort réservé aux 
                      francs-tireurs
 
 Il existait une société dauteurs qui 
                      nhésitait pas à critiquer le ministère 
                      de la culture. Cette société, née au 
                      siècle dernier, avait réussi à conserver 
                      une certaine indépendance vis-à-vis des pouvoirs 
                      publics. La SPADEM défendait les droits des artistes 
                      dans le domaine des arts plastiques et graphiques. Dans 
                      ce domaine, il y avait fort à faire et des lobbies 
                      très influents. En effet, les premiers diffuseurs 
                      duvres relevant des arts plastiques sont les 
                      musées, dont limmense majorité dépend 
                      de lÉtat ou des collectivités publiques 
                      territoriales. Ces musées organisent de très 
                      nombreuses expositions. Et, bien entendu, le ministère 
                      de la culture nest pas très regardant quand 
                      il est producteur sur le respect des droits dûs aux 
                      auteurs.
 
 La SPADEM avait donc pour cheval de bataille de faire reconnaître 
                      le droit des plasticiens en matière dexposition 
                      et de citation de leurs uvres.
 
 La SPADEM bataillait également pour faire reconnaître 
                      les droits des plasticiens auprès des commissaires-priseurs 
                      et des galeries qui reproduisent souvent les uvres 
                      dans le cadre de leurs catalogues en invoquant laspect 
                      promotionnel et sans rien vouloir payer.
 
 La SPADEM avait même osé batailler pour lapplication 
                      du " droit de suite ". En effet, le CPI 
                      reconnaît aux auteurs duvres graphiques 
                      et plastiques un droit à percevoir 3 % du prix des 
                      ventes de leurs uvres faites aux enchères publiques 
                      ou par lintermédiaire dun commerçant. 
                      Cette réglementation a pour but de faire profiter 
                      lartiste de lévolution de sa cote afin 
                      que des artistes célèbres soient financièrement 
                      associés au succès de leurs uvres.
 
 Un décret doit venir déterminer les conditions 
                      dans lesquelles les auteurs feront valoir leurs droits à 
                      loccasion des ventes. Celui-ci se fait désirer 
                      depuis 1957.
 
 En attendant, on applique la loi précédente, 
                      qui date de 1920. Mais cette loi ne concerne que les ventes 
                      réalisées par les commissaires-priseurs dans 
                      le cadre denchères publiques.
 
 Le droit de suite ne sapplique donc toujours pas aux 
                      ventes réalisées par les commerçants. 
                      Il convient de savoir que 60 % des ventes réalisées 
                      en France par les galeries privées émanent 
                      de commandes publiques. Le droit de suite ne plaît 
                      donc pas forcément aux pouvoirs publics.
 
 La SPADEM a eu loutrecuidance dattaquer le ministère 
                      de la culture. Le Conseil dÉtat a condamné 
                      lÉtat au motif que, en labsence dune 
                      modification législative de larticle 42 de 
                      la loi de 1957 , le gouvernement avait lobligation 
                      dassurer la pleine application de cet article en prenant, 
                      dans un délai raisonnable, les dispositions réglementaires 
                      nécessitant sa mise en uvre.
 Toutefois le Conseil dÉtat na pas octroyé 
                      à la SPADEM les dommages-intérêts quelle 
                      réclamait, estimant quil ne lui était 
                      pas possible de calculer le préjudice que la carence 
                      des pouvoirs publics lui avait causé.
 
 Cest la première et unique fois quune 
                      société dauteurs sest attaquée 
                      au ministère de la culture.
 
 Curieusement, la SPADEM est la seule société 
                      dauteurs à avoir fait lobjet de critiques 
                      dans le rapport du ministère de la culture sur les 
                      sociétés dauteurs de 1993.
 
 Encore curieusement, la SPADEM na pas réussi 
                      à récupérer les sommes qui lui revenaient 
                      de la copie privée, les autres sociétés 
                      dauteurs traînant peut-être un peu plus 
                      que nécessaire afin de mettre la SPADEM en situation 
                      de gestion difficile. Le plus important des associés 
                      de la SPADEM, la succession PICASSO, sest retiré. 
                      Finalement, la SPADEM a été mise en liquidation 
                      en 1996.
 
 Il est vrai que cette société nétait 
                      pas exempte de critiques quant à sa gestion. Lassociation 
                      SPADEM avait déjà été déclarée 
                      en règlement judiciaire en 1988. La société 
                      civile SPADEM avait été autorisée à 
                      poursuivre son activité dans le cadre dun plan 
                      de redressement. Elle venait de vendre limmeuble de 
                      son ancien siège social et la situation avait été 
                      considérée comme apurée en 1993.
 
 Pour un total de perception de 45 MF en 1990 et de 27 MF 
                      en 1991, la SPADEM avait un budget de fonctionnement annuel 
                      de 12,5 MF. Sur ces deux exercices, la gestion de la SPADEM, 
                      dont les retenues pour frais de gestion sont statutairement 
                      encadrées, accusait donc à nouveau un déficit 
                      après encaissement des revenus financiers de 3,44 
                      MF.
 
 Nous avons contacté lancienne directrice-gérante 
                      de la SPADEM, Martine DAUVERGNE, afin davoir davantage 
                      dexplications. Elle prétend en effet que la 
                      mise en liquidation de la SPADEM a été directement 
                      pilotée par le ministère de la culture, la 
                      SACEM et lADAGP, afin de récupérer les 
                      artistes plasticiens et que, si on lui avait reversé 
                      dans les délais les fonds en provenances de la copie 
                      privée, la SPADEM naurait pas eu de problèmes 
                      financiers. Nous navons pas eu suffisamment déléments 
                      du dossier pour nous permettre un avis sur la question.
 
 Toujours est-il que la liquidation de la SPADEM a été 
                      étroitement gérée par le ministère 
                      de la culture qui a tout fait pour pousser les artistes 
                      plasticiens et les photographes à rejoindre la société 
                      labellisée ministère, lADAGP, oubliant 
                    au passage de rester neutre et impartial.
   © Roland LIENHARDT - 1998
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